Christophe colomb
de Samuel Eliot Morison

critiqué par Saint Jean-Baptiste, le 25 octobre 2005
(Ottignies - 88 ans)


La note:  étoiles
Un monde à découvrir
Cette biographie de Samuel Eliot Morison passe pour être la plus complète et la plus objective de toutes les biographies de Christophe Colomb.
Elle a le mérite d'avoir été réalisée par un marin passionné d'aventures, doublé d'un véritable Historien. Son histoire, Morison ne l'a pas seulement écrite dans les bibliothèques en cherchant des textes du XVe et du XVIe siècle, mais il a pris la mer dans les conditions les plus approchantes de son héros, pour découvrir la vérité sur le personnage et sur ses découvertes.
Bien que son livre traite surtout des expéditions, la personnalité de Christophe Colomb apparaît très nettement à travers son comportement, ses décisions, ses hésitations et ses erreurs. L'auteur a essayé de comprendre Christophe Colomb plutôt que de le condamner comme tant d'autres l'ont fait.
Il est incontestable que le Découvreur avait une personnalité des plus troubles ; c'était un dissimulateur voire un fourbe et il avait beau s'habiller en moine pour ramener les "sauvages" à la vraie foi, le premier but de son expédition, comme de toutes les expéditions jamais entreprises par les humains, était l'or !
Mais ce goût du lucre a toujours été pour l'humanité le principal ressort de toutes avancées de la civilisation et du progrès, en Amérique, comme partout ailleurs et à toutes les époques. Seulement, avant d'en arriver à des oeuvres de civilisation et de progrès, que d'atrocités, que de massacres, que d'ignominies ! Christophe Colomb, sans les avoir commis lui-même, en a été le témoin qui laissait faire malgré lui : il n'avait pas d'autorité, ce n'était pas un chef !
Un des intérêts de ce livre, et non des moindres, est de nous conduire à travers un des épisodes les plus affreux, les plus horribles, mais aussi les plus intéressants de l'Histoire de l'humanité !
A la suite de la découverte de Christophe Colomb il y a 500 ans, une poignée d'hommes commandités il est vrai par tous les royaumes d'Europe, assoiffés d'or, d'une cruauté et d'une fourberie à peine imaginable, en moins d'un demi-siècle, ont anéanti des peuples entiers, des civilisations splendides, et tout un monde d'un intérêt inestimable ! C'est une part gigantesque du patrimoine de l'humanité qui a été détruite en un rien de temps, par des contemporains de Léonard de Vinci, Michel Ange, Erasme, Rabelais, Luther ; des contemporains de la Réforme et de la Renaissance dont l'élévation culturelle et artistique nous étonnent encore aujourd'hui !
Ici on touche du doigt, jusqu'à l'écoeurement, ce que l'appât du gain et la stupidité des hommes peuvent produire comme abominations !
Einstein disait : j'ai connaissance de deux choses infinies, l'univers et la bêtise humaine ; mais pour l'univers, je n'ai pas de certitude absolue !
Je pense qu'au mot "bêtise", on pourrait ajouter "cruauté".
Ce livre épais se lit à toute vitesse ; il raconte par le menu tous les épisodes de la vie et des expéditions de Christophe Colomb ; et le récit de tant d'exploits finit par forcer l'admiration pour un des plus grands navigateurs de tous les temps. Il permet de cerner un des personnages les plus célèbres de l'humanité, et il est amusant à lire comme un récit d'aventures extraordinaires qu'aucun romancier n'aurait osé imaginer !
Un monde oublié 1 étoiles

Peu après sa rencontre avec le peuple Arawak sur une île de l'archipel des Bahamas, Colomb écrit dans son journal de bord. "Ils feraient d'excellent domestiques […] Avec seulement cinquante hommes, nous pourrions les soumettre tous et leur faire faire tout ce que nous voulons […] Aussitôt arrivé aux Indes, sur la première île que je rencontrais, je me saisi par la force de quelques indigènes afin qu'ils me renseignent et me donnent des précisions sur tout ce qu'on pouvait trouver aux alentours"

Témoin ? Certainement pas. Il a initié la politique qui prévaudra durant 500 ans : pillage, massacre et esclavage. Aussitôt arrivé à Haïti, il réduit la population Taino en esclavage, ordonne le massacre des hommes, des femmes et des enfants pour bien affirmer sa détermination à obtenir d'eux ce qu'il veut. L'or !

Mais il n'y a pas d'or et il lui faut absolument trouver de quoi rembourser les prêts qui lui ont été consentis pour organiser sa petite croisière. Alors il entreprend d'expédier les survivants en Espagne pour les vendre comme esclaves. En quatre ans, plus de la moitié de la population Taino est exterminée, et en 1550 il n'y a plus un seul Taino vivant.

Lors de la commémoration du cinq centième anniversaire de l'arrivée de Colomb en Amérique, un groupe d'indiens a interrompu un défilé pendant 45 minutes. Ils ont été traînés en justice pour refus d'obtempérer aux ordres de la police. Reprenant les termes de la convention sur le génocide (que les Etats Unis ont refusé de signer durant 40 ans), ils démontrèrent que cette commémoration était l'apologie du génocide et incitation au génocide - Colomb incarnant celui qui déclencha personnellement le génocide sur ce continent - ils obtinrent gain de cause et furent acquittés.

Colomb n'a rien découvert. A peine arrivé dans les caraïbes il retourne en Espagne pour raconter son exploit d'avoir trouvé une voie maritime vers l'Ouest qui mène… en Asie. Un espagnol bien avant lui a atteint l'Amérique du Nord, et encore avant lui des bretons et encore avant des vikings et encore avant des amérindiens et encore avant …

Oui Colomb est tristement célèbre pour tous les descendants des nations amérindiennes rescapées d'un génocide sans pareil.

Heyrike - Eure - 57 ans - 1 novembre 2005