L'invention du monothéisme
de Jean Soler

critiqué par Tchifto, le 10 janvier 2006
(Paris - 60 ans)


La note:  étoiles
A faire douter le Pape et le grand Rabbin d'Israël...
Ouvrage extrêmement bien document, écrit de façon à la fois très vivante, très sobre dans les termes (pas de jargon), agrémenté de notes très utiles et d'une bibliographie impressionnante.
La thèse est remarquablement étayée et très convaincante.

Clairement, si l'auteur est parti d'une intuition fondée sur des découvertes archélogiques, ce n'est pas sa seule intuition qui a guidé ses recherches et ses écrits, mais une connaissance et une maîtrise approfondies de son sujet.

En substance, Jean Soler explique comment les Hébreux, polythéistes jusque vers les 4-5-èmes siècles avec JC, sont devenus peu à peu monothéistes et comment "l'idéologie" monothéiste a peu à peu relu entièrement la Bible (puis ce que les Chrétiens ont appelé l'Ancien testament) à la lumière de ce nouveau paradigme religieux.

Comme tous les peuples de la région, les Hébreux célébraient plus qu'un autre l'un de leurs dieux, en l'occurrence Iahve ; ce privilège accordé à l'un des dieux (que Soler appelle "monolâtrie") devait assurer au peuple hébreu la prééminence (comme Assur l'apporta aux Assyriens etc...) ; si d'aventure tel n'était pas le cas, ce n'était pas le signe d'une infériorité du dieu national sur les autres dieux nationaux, mais que le peuple avait fauté contre son dieu et que celui-ci l'en punissait.
Peu à peu, et notamment sous l'empire perse, empire multinational qui laissait à chaque peuple la liberté de ses cultes, ce système est devenu inopérant : les Hébreux n'étaient ni les dominateurs de la terre (de leur propre terre, ou en tout cas de celle "donnée à eux par Iaveh", Canaan) ni écrasés par les Perses (ce qui aurait été assimilable à une malédiction envoyée par Iaveh). L'idée s'est donc fait jour, peu à peu et sans qu'il soit possible de déterminer à quel moment (puisque toute la Bible a ensuite été relue à la lumière du monothéisme) que si Iaveh ne favorisait pas le peuple hébreu ce n'était pas parce qu'il était moins fort que les autres dieux, ce n'était pas parce que les Hébreux ne lui obéissaient pas, c'est qu'il n'y avait qu'un seul Dieu pour tous les hommes.

Egalement paru en poche chez Hacette (collection pluriel)