La vie rêvée des plantes
de Lee Seung-U

critiqué par Pitibeni, le 22 juillet 2006
(Marseille - 48 ans)


La note:  étoiles
Quand toutes les émotions s'en mêlent...
Présenté comme un triptyque, ce roman se fonde sur les histoires individuelles mais enchâssées d'une mère et de ses deux enfants. Roman de l'échec, de l'amour impossible et de la bestialité, le récit mène chacun des personnages vers la réalisation de soi, l'accomplissement de son destin. Kihyon, détective minable engagé pour suivre sa mère par un inconnu, va lui découvrir un passé qu'il ne soupçonnait pas. Le même Kihyon tentera de se racheter auprès d'un frère dont il a ruiné l'amour et les espoirs professionnels. Eperdument amoureux de la petite amie d'Uhyon, il se voit répudié par sa famille ainsi que par celle qu'il aime. Mû par la colère il s'empare alors de l'appareil photo de son frère qu'il revend pour se venger et retirer quelque argent de poche. Les photos compromettantes - sur les agissements de l'armée et la répression en Corée - qui se trouvent toujours dans l'appareil, deviennent alors indirectement la cause de l'invalidité de Uhyon, envoyé au front ou il perd ses jambes. Anéanti, ce dernier se déshumanise peu à peu, alternant entre les crises d'épilepsies et les putes... Chacun va peu à peu rejoindre la voie par les autres empruntée et tous se retrouveront dans un même lieu: celui de l'harmonie. Complexe en apparence, ce petit bijou coréen possède tout ce qu'on peut attendre de la littérature orientale, en plus d'une thématique bien ficelée et d'un style épuré, qui en font un plaisir de lecture.
Un beau roman touchant 8 étoiles

J'ai dévoré ce roman sud-coréen. Il se constitue de courts chapitres de 4 à 10 pages et possède un souffle qui transporte le lecteur. il ne ressemble pas à certains romans japonais contemplatifs. C'est un véritable page-turner qui possède suffisamment de magie pour nous captiver.

Dans ce roman, le lecteur découvre progressivement des secrets de famille. Kihyon, le narrateur, semblerait presque antipathique au début du roman. On sent son regard envieux envers ce frère plus âgé qui fréquente une belle femme. Kihyon est tombé sous le charme de la même jeune fille. Le père semble froid, distant, peu loquace alors que la mère semble accorder sa préférence au fils aîné. Ces informations concernent le passé.
Aujourd'hui le narrateur, sorte de détective privé est chargé d'enquêter ... sur sa mère ! Ce sera le moyen de pénétrer dans les secrets de famille.
Son frère aîné, désormais amputé des deux jambes suite à un accident, se renferme sur lui-même, a tiré un trait sur son passé, sur la jeune fille qu'il aimait et cette mère, figure sacrificielle, fait beaucoup pour ce fils profondément malheureux et sujet à des crises violentes.

Les simples histoires de famille m'ennuient profondément, ce qui n'est pas le cas ici. Il y a réellement du suspense dans ce roman et l'on découvre progressivement certains faits. Les dernières lignes des chapitres annoncent clairement les premières lignes du suivant. Lee Seung-U est parvenu à intriguer le lecteur et à attiser sa curiosité. Il mêle à la fois des scènes prosaïques et des scènes poétiques en lien avec la nature, principalement les arbres ici. Les rêves occupent aussi une place importante dans ce roman et éclairent sur le réel.
Le style est accessible et ne brille pas par des fioritures sans fin, mais certaines phrases sont très belles quand elles ont une portée universelle. Esthétiquement aussi, certaines scènes sont très belles, visuelles, picturales.

Un très bon entretien qui permet d'éclairer sur l'auteur et sur ce roman :
https://lelitterairecom.wordpress.com/2012/09/…

Pucksimberg - Toulon - 45 ans - 4 juin 2016


une histoire de famille 6 étoiles

Ce livre commence un peu comme le film Old Boy, on croit que l'on va lire une histoire de famille un peu tordue à la coréenne, mais non, c'est juste une histoire de famille emplie de non-dits et d'amour mal exprimé. Il y a effectivement de la poésie, et le récit se transforme presque en conte.
Ce roman se lit très bien, sans aucune difficulté, mais j'aurais aimé vraiment beaucoup plus de profondeur dans ces rapports familiaux, je trouve qu'il en manque pour nous toucher vraiment.
C'est dommage, je n'ai pas passé un mauvais moment, mais ça m'a juste donné envie de lire les Murakami que je n'ai pas encore lu...

Badzu - versailles - 49 ans - 11 mars 2014


Coréen, très coréen 6 étoiles

Kihyon envie son frère aîné parce que sa mère semble le préférer à lui. Un mystérieux commanditaire lui demande d’espionner sa propre mère ce qui va l’amener à découvrir un pitoyable secret de famille. Une famille assez bizarre où chacun vit dans son coin indépendamment des autres, sans jamais se parler ni manger ensemble. Le père quasi mutique, ne s’intéresse qu’à ses plantes vertes. La mère travaille dans la restauration et rentre tard tous les soirs. Quand au frère aîné, amputé des deux jambes suite à un accident arrivé alors qu’il était dans l’armée, il devient presque fou de ne pouvoir supporter sa nouvelle condition d’homme tronc. Pour ne rien arranger, Kihyon tombe amoureux de Sunmi, l’ancienne petite amie de son frère sans en être payé de retour…
Sur le ton d’une longue et douloureuse confession, voici un livre à l’atmosphère pesante où les sentiments sont décortiqués un à un, où le romantisme le plus éthéré côtoie la violence la plus extrême et la vulgarité la plus basse… Dommage que le style soit si lourd, les redites si nombreuses et le rythme si lent… Un ensemble très coréen, c'est-à-dire esthétiquement et poétiquement assez beau mais souvent bien ennuyeux…

CC.RIDER - - 66 ans - 31 octobre 2007


En Corée, les arbres sont l"incarnation d'amours brisées ... 8 étoiles

Avec Lee Seung-U et la vie rêvée des plantes nous poursuivons notre exploration de l'Asie littéraire.
Et nous voici de nouveau en Corée (du Sud) après le déjà remarquable Vieux Jardin de Hwang Sok-yong.
Le roman de Lee Seung-U débute dans une ambiance plutôt glauque dans une famille étouffée par le silence des secrets non dits.

[...] Bref, chacun de nous avait une chambre, chacun était enfermé dans la sienne. Les quatre portes restaient obstinément closes. Personne ne faisait irruption dans l'une ou l'autre ni n'en avait la moindre envie. Ma mère était la seule qui aurait pu enfreindre cette règle. Nous vivions là comme si nous ne connaissions pas. Nul ne s'en plaignait, nul ne trouvait cela gênant.

Mais bien vite, l'auteur nous entraîne au-delà de ces tristes apparences humaines et nous fait connaitre un peu de la vie rêvée des arbres puisque selon lui, "les arbres sont l'incarnation d'amours brisées".

[...] Certes, on ne voit pas les arbres se déplacer, mais est-ce une raison pour croire qu'ils ne bougent pas. [...] Je me disais même que la croyance en l'immobilité des arbres n'était qu'un préjugé désobligeant. [...] Il faut conclure, non que les arbres ne bougent pas, mais qu'ils ne se laissent pas voir quand ils bougent.

Et tout cela finira sur une note plus optimiste car derrière ces secrets de famille se cachaient de belles histoires d'amour :

[...] au début l'homme avait deux têtes, quatre mains, quatre pieds, quatre yeux, il avait deux sexes. Mais Zeus agacé de voir l'homme défier continuellement les dieux, a partagé son corps en deux. C'est pourquoi, les êtres s'aiment pour retrouver leur moitié. Ils tentent ainsi de reconstituer leur corps d'origine, leur esprit d'origine, de retrouver leur intégrité.

BMR & MAM - Paris - 64 ans - 8 août 2007