La promesse d'Oslo
de Gilles Rozier

critiqué par Laure256, le 10 octobre 2006
( - 52 ans)


La note:  étoiles
Un bel élan de croyance au féminin
Sharon, 42 ans, vit à Jérusalem, où elle est cuisinière dans une maison de retraite. Elle a un fils de 20 ans, Eli, qui meurt dans un attentat. Comment survivre à cette absence ? Sharon est divorcée aussi, car dans la tradition juive, on se doit d’avoir plusieurs enfants (« la Loi dit Croissez et multipliez »). Comme elle n’a jamais donné la vie après Eli, son mari est allé voir ailleurs. Sharon va déménager, quitter son quartier ultra orthodoxe pour un autre petit appartement, dans un immeuble où elle va sympathiser avec sa nouvelle voisine, Magda.
Je me suis longtemps demandé où l’auteur voulait en venir… Il nous fait tout simplement partager le quotidien d’une femme juive qui vit sa religion dans le respect le plus strict des lois, et qui rencontre des personnages qui eux s’accordent des libertés avec celles-ci ! Il y a de l’humour, et on s’attache assez vite à ce personnage de femme qu’on sent à la fois « corsetée » par sa religion, mais satisfaite tout de même de ce « cadre ». Et puis quand sa voisine Magda, la quarantaine aussi, donne naissance à un petit garçon grâce à la fécondation in vitro, pourquoi n’essaierait-elle pas, elle aussi, de donner une nouvelle fois la vie ? Pas pour remplacer Eli, non, mais pour prolonger son existence justement, en parlant de lui à une fratrie. Mais voilà, pour respecter les lois de la Torah, seule la procréation avec donneur anonyme non juif est possible (si le père est juif, il faut qu’il y ait mariage, et Sharon ne veut pas de mariage !). Sur le conseil de son rabbin, ce sera Oslo, où le nombre de juifs est très faible, donc le risque que le donneur soit juif quasi nulle. Elle s’invente une vieille tante en Norvège pour s’absenter une semaine. Le temps aussi de réaliser que son pays lui manque, sa voisine et son collègue de travail aussi. Plus on avance dans le livre et plus on aime cette femme qui se débat entre ses envies et le respect des Lois. Aussi la fin qui se veut d’une grande simplicité (c’était pas si compliqué de faire quelques arrangements !) est un bonheur simple, pour le lecteur et pour le personnage de Sharon.
J’ai aimé découvrir ces traditions juives que je ne connaissais pas, mais aussi l’ouverture d’un peuple dans sa façon de vivre sa religion, ainsi que le cadre du conflit israélo-palestinien, même si chez Rozier on apprend moins que chez Zenatti de ce point de vue-là. C’est un roman prenant et attachant sur la façon de vivre sa judaïté, une réflexion personnelle sur l’amour, le couple, la maternité et le risque dans un pays en conflit permanent, où prendre le bus peut vous faire perdre la vie à tout instant. La fin aborde aussi l’homosexualité de façon très sereine et détachée, comme une évidence que l’on ne lit pas si souvent !