L'Ombilic des Limbes
de Antonin Artaud

critiqué par DomPerro, le 7 novembre 2006
( - - ans)


La note:  étoiles
Le mot juste
On ne peut demeurer insensible devant Artaud, car il trouble, il hante, comme son théâtre et sa poésie peuvent devenir poisons. Dramatique, son faciès exprime le tourment et l’angoisse qui animent l’homme. Sa maladie transperce deux sphères : biologique et littéraire. D’un point de vue clinique, c’est sa psychose de 1937 qui le poursuivit jusqu’à la mort. ''Il manque une concordance des mots avec la minute de mes états.'', écrit Artaud dans L’Ombilic des Limbes.

Sa hantise de l’immédiat, en poésie plus particulièrement, échappe aux diagnostiques des médecins de la maison de santé d’Ivry. Sa vie sera marquée par une recherche du mot : ''Ma langue se fatigue à tenter d’exprimer l’impossible, au point qu’elle se noue et m’étouffe.'', avoue-t-il à Anaïs Nin. L’enjeu de la problématique s’articule sur le choix très précieux du mot. Pour Antonin Artaud, le choix du mot (ou du terme qui signifie dans son esprit une terminaison de sa pensée) est absolument vital. Artaud est hanté par l’immédiat, c’est-à-dire l’écriture de l’instant même qui correspond exactement à sa pensée.

Le 6 juin 1924, il écrit à Jacques Rivière, des éditions Gallimard : ''Et voilà, Monsieur, tout le problème : avoir en soi la réalité inséparable et la clarté matérielle d’un sentiment, l’avoir au point qu’il ne se peut pas qu’il ne s’exprime à cette inconsciente minutes où la chose est sur le point d’émaner, une volonté supérieure et méchante attaque l’âme comme un vitriol, attaque la masse mot-et-image, attaque la masse du sentiment, et me laisse, moi, pantelant comme à la porte même de la vie.''

Il y aurait cette vérité en poésie qui enlèverait le factice, l’imposture. Artaud vise l’inimaginable : Être à l’originalité même de l’acte de la création. Un fiat lux qui partirait de l’esprit aux mots, dans le ici maintenant de sa pensée. Pas surprenant que ses poèmes, comme il l’explique à M.Rivière, doivent exister littérairement. ''Là où d’autres proposent des œuvres, je ne prétends pas autre chose que de montrer mon esprit. Je ne conçois pas d’œuvre comme détachée de la vie.''

L’Ombilic des Limbes, qui reprend de divers textes publiés entre 1924 et 1928, tente d’atteindre l’impossible quête de l’esprit et des mots.
3 étoiles! 6 étoiles

Assez bon!

Js75 - - 41 ans - 11 juin 2010


L'impossible concordance 10 étoiles

On ne se remet pas de la lecture d'ARTAUD écrivait un de ses préfaciers. Effectivement c'est le type même de rencontre littéraire qui- si vous y êtes réceptif- marque au fer un esprit, un coeur, en bref quiconque est assoiffé de vérité et d'authenticité.
Sorti de la matrice du surréalisme, sans d'ailleurs y être jamais entré, il aura par sa lucidité forcé les portes d'une autre perception de la littérature, tentant de faire pénétrer le verbe dans le corps lui même.
L'ombilic des limbes est un début déjà fracassant, les poèmes les plus riches en images et audaces s'entrechoquent avec des lettres ouvertes au Dalaï-Lama, aux procureurs, un texte sur la toxicomanie est frappant de lucidité et bien loin du politiquement correct!
Quête d'un esprit en recherche d'infini.

Hieronimus - - 48 ans - 9 décembre 2006