La création du monde
de Jean d' Ormesson

critiqué par Danriot, le 18 novembre 2006
(STRABOURG - 78 ans)


La note:  étoiles
Pour l’humour de Dieu et pour l’Amour de la vie, Saint-Jean d’Ormesson recréa et Dieu et le Monde. Un instant d’éternité. Un moment de bonheur. Plus qu’un livre : une Ecriture. Davantage qu’un ouvrage : un festival d’intelligence, une fête de l’esprit, un régal d’humour, un chef d’œuvre donc une œuvre rare, hors du commun, hors normes… Qui restera, j’en suis sûr, inscrit en lettres d’or dans les futures « histoires de la littérature française »"La création du monde", chez Rober Laffont.

D’Ormesson dans son meilleur rôle : « un appariteur de Dieu dans un monde sans Dieu », dit Claude Imbert… Un éclaireur des Hommes dans un monde en quête (et en panne) d’espérance, d’Espoir, d’avenir… Un jouisseur de ce présent qui n’existe pas puisqu’il est déjà passé quand il s’affiche…

Vertige devant les mystères de la vie, effroi devant les mystères de la nature humaine , angoisse devant la fuite du temps.

Vertiges, surtout, devant le « gouffre » des interrogations sans réponse sur le temps et l’espace (ces « frères jumeaux »), le zéro et l’infini, le hasard et le nécessité, le créationnisme et l’évolutionnisme, l’infini et la finitude, l’éternité et la mortalité, la vie et la mort.


Un roman ? Bien sûr. « Le romancier est, de tous les hommes, celui qui ressemble le plus à Dieu », disait Mauriac. « C’est le singe de Dieu »

Mais ce roman est aussi et surtout un livre littéraire (que de références affichées, cachées et masquées !), philosophique (dans le sens de Marc Aurèle : « la philosophie c’est la méditation sur son dieu intérieur »), théologique (« C’est simple, comme dieu et dieu font trois », disait Prévert), métaphysique (L’au-delà est toujours en deçà de l’entendement humain), cosmologique (« Nous sommes tous des poussières d’étoiles ») … Un livre qui ose , en tout modestie, se mesurer au Livre. Avec une écriture qui ose, sans blasphème, jouer avec les Ecritures…



Vous avez dit « écriture » ? Valéry disait que le travail doit « finir par effacer le travail ». Jean d’Ormesson le suit à la lettre. Quelle légèreté pour tant de profondeur ! Quelle fluidité pour autant de complexité ! Quelle simplicité et de lisibilité pour une telle exploration de l’obscurité ! Le bon écrivain, c’est celui qui sait faire de la nuit un jour. Notre académicien atteint ici le sommet de son art. A déguster sans modération.

« C’est le produit d’une vie », confie-t-il. « Et ce sont deux années d’écriture…Le jour où je réussissais à mettre huit lignes publiables était un bon jour ». Je le crois. Comme je le crois quand il me répète l’un des mots d’enfance de sa fille quand elle avait six ans : « Qu’est-ce qu’il fait mon papa ? Quand il écrit vite et beaucoup, il fait un article. Quand il reste longtemps devant une feuille blanche, il écrit un livre ». Ecrire, c’est attendre. « Comme une femme avant et pendant un accouchement ». Un « bébé » très réussi, cette « Création du Monde »…

Je résume …Le décors, une « île grecque ». parce que « les vacances sont une île ». Les personnages : Quatre amis comme les aimait Colette : usés, blasés,(un peu) rassis. Depuis dix ans, ils se réunissent chaque été sur une île grecque pour y passer ensemble leur unique semaine de vacances. Voici André, énarque, ministre sous Mitterrand et Chirac, futur sénateur, qui approvisionne les autres en cigares (parce que dieu est un « fumeur de Havane », comme chantait Gainsbourg ?) et vins fins. Edgar (« sans d, il y tient), qui enseigne la psychiatrie à Harvard et qui, malgré sa préférence pour le bourgogne, ne déteste pas le Pomerol. François, professeur au Collège de France où il enseigne la physique mathématique appliquée aux sciences de la vie. Et puis le narrateur, qui est écrivain. Et reste anonyme : la pire des vanités, c’est modestie, non ? Jean d’Ormesson le sait mieux que quiconque…

Entre les repas servis par Melina, les siestes sous le figuier de la cour, les baignades et les balades en mer, ces gros messieurs ne manquent pas d'occupations. A quoi s'ajoute un peu de remue-méninges, car Edgar a apporté un manuscrit sur lequel il aimerait l'avis des copains. Chacun à son tour en lira un chapitre à haute voix.

L'auteur de ce manuscrit? Un monsieur personne, un "n’importe qui"... qui fait n’importe quoi…Ce Français moyen est un archiviste paléographe, Simon Laquedem (comme Lequidam ?).Il a 33 ans, l'âge supposé du Christ à sa mort,(bien que les dernières découvertes scientifiques l’estiment à 42 ans : détail..) Célibataire et parisien un peu falot, il est troublé par des rêves qui deviennent obsédants : Dieu l'a choisi pour délivrer un message aux hommes. Un message qui dépasse (transcende) ceux délivrés à Abraham, Moïse, Mahomet, Socrate et d’autres…

Décoiffante, ébouriffante, époustouflante, la cosmogonie de Jean d’Ormesson ! Surtout sur ce « hasard et la nécessité » : « La nécessité, c'est moi quand je me promène en uniforme pour faire respecter la loi. Le hasard, c'est moi quand je me déguise en chenapan pour la contourner par en dessous. ». Ou sur le mal : « Dès le début, les hommes se sont séparés de moi. Je suis leur maître, et ils sont libres. Par ma volonté, et pour qu'ils puissent être libres, le mal s'est glissé entre les hommes et moi ». Ou sur l’avenir de l’ Homme, prisonnier de « l’irréversibilité » du Temps et de son orgueil qui le pousse à prétendre tout , y compris la « mort de Dieu ». Comme disait Christian Chabanis, « l’athéisme qui évince Dieu, évince-t-il les questions sur Dieu ?». Sûrement pas.


« La pire des choses, confie Jean d’Ormesson dans un débat à la Salle blanche de la librairie Kléber, à Strasbourg, serait que l’on prouve soit l’existence de Dieu soit son inexistence ». A qui et vers qui se tournerait-on ? Se souvient-on du cri de Fernando Passoa ? : « Dieu existe donc afin que je puisse te haïr ! ». Se souvient-on du trait d’humeur et d’humour de Bossuet ? : « Dieu se rit des créatures qui se plaignent des effets dont ils chérissent les causes »…

Comme disait Saint-Exupéry, « Que Dieu existe ou pas m’importe peu ! Dieu donne à l’homme de la divinité… ». Comme disait Thierry Maulnier : « La force de celui qui croit en Dieu, n’est pas en Dieu mais en sa foi ». L’essentiel n’est pas de crier, même sur le ton de la supplique « SEIGNEUR ! SEIGNEUR ! », mais de vivre en aimant les hommes et les femmes qui sont là, avec nous autour de nous, et d’aimer la vie… Dans ce présent qui est déjà du passé.

« Dieu ? Ce sont les hommes qui ne peuvent pas s’en passer », sourit Jean d’Ormesson… qui sait que même les « petits hommes verts » de l’Académie française n’ont rien d’immortels. « Heureusement »… Même si chacun meurt sans répondre à la question des questions : « Et toi qui dis-tu que je suis ? ».

« Je suis un homme de Dieu » : c’est la première phrase du livre de Jean d’Ormesson « Allez savoir » : c’est la dernière…

Daniel RIOT
Assez ennuyeux 5 étoiles

J'ai été assez déçue par ce livre. On m'avait tant vanté Jean d'Ormesson que je m'attendais à quelque chose d'extraordinaire...

Finalement, bien que très bien écrit (je lui dois bien ça, tout de même!), j'ai trouvé que ce livre ne faisait qu'enfoncer des portes ouvertes sur des sujets ésotérico-religieux, maintes fois travaillés.

Et puis toutes les références aux mythologies gréco-romaines semblent un peu trop conformes à l'académie des lettres... Quand en sortira-t-on? Il y a pourtant bien des associations pertinentes après cette période!

Le café de... - Perpignan - Bordeaux - 40 ans - 17 août 2008


Difficile à lire 8 étoiles

Le livre s'adresse surtout aux Catholiques.
Il m'a fallut un bon moment avant de me plonger complètement dans l'histoire, pas toujours facile à comprendre.

Sophie_752001 - Vitry sur Seine - 39 ans - 12 février 2008


De qui se moque t-on ? 1 étoiles

Je suis un fervent admirateur de Jean d'Ormesson dont j'attends avec beaucoup d'impatience les nouvelles parutions.

Celle-ci m'a déçue.

Je n'ai ABSOLUMENT rien compris à son ouvrage qui est, pour moi, le plus mauvais qu'il ait jamais écrit.

Mais, peut être que ce roman n'est, après tout, qu'une vaste fumisterie ou, si l'on veut, dans un langage plus direct, une vaste entreprise à se foutre du monde....

Alcofribas nasier - - 54 ans - 26 janvier 2007


qui est michel 8 étoiles

Je trouve votre synthese toute a fait pertinente.

N'etant qu'au début de ce livre, et trés fatigué je voudrais savoir si quelqu'un a compris qui est le Michel de la page 44.

Le narrateur? plus si annonyme...


Sans doute aussi ai-je fait trop attention a un détail, mais quand on est fatigué un rien devient vite obscedant?

Merci d'avance a ceux qui me repondront, et de bien vouloir m'excuser si ce n'est pas l'endroit pour ce genre de question.

pierre julien

Pierrej - - 39 ans - 30 novembre 2006