C'est ainsi que les hommes vivent
de Pierre Pelot

critiqué par Fleur783, le 8 décembre 2006
( - 72 ans)


La note:  étoiles
Un très grand livre !
Merci à mon libraire de m'avoir conseillé ce livre et fait découvrir ce brillant auteur.
Après plus de 180 romans et nouvelles (dont L'été en pente douce) Pelot le Vosgien nous livre ici une fresque hallucinée de la guerre de Trente Ans.
Il ne faut pas se laisser désarçonner par le langage du 17ème siècle, simplement faire l'effort de lire.
Avec une écriture riche et généreuse, du rythme, de l'émotion et malgré la violence extrême de certaines scènes, on a plaisir à se laisser conter l'histoire de la Lorraine et des gens qui l'habitent.
L'histoire ? : 4ème de couverture :

" Automne 1999. Lazare Grosdemange, journaliste et grand voyageur, revient sur les lieux de son enfance. Un accident lui a fait perdre la mémoire dans des circonstances troublantes qu'il cherche de toutes ses forces à éclaircir.
Au début du XVIIè siècle, dans cette partie des Vosges, Dolat, fils d'une paysanne brûlée pour sorcellerie, apprend qu'il a été recueilli par une demoiselle de haut lignage. Il se retrouve impliqué avec Apolline, sa marraine
devenue sa maîtresse, dans les intrigues qui secouent le duché de Lorraine, et doit s'enfuir vers la Bourgogne voisine. La guerre de Trente Ans qui dévaste la Lorraine atteint bientôt ces régions sauvages et sépare les deux amants.
Par des voies secrètes et souterraines, la quête de Lazare Grosdemange va croiser, au-delà des siècles, les aventures de Dolat, fils du diable.
'C'est ainsi que les hommes vivent" est une immense aventure du langage et de la mémoire"

Pour tous les gens qui veulent un bon vrai roman français.
Juste un petit bémol : La violence inouïe et l'extrême sauvagerie de certaines scènes peuvent choquer le jeune public. A ne pas recommander aux ados (j'ai moi-même eu du mal à certains passages, mais il faut aller au-delà...)
Lost in translation 10 étoiles

Beaucoup de difficulté à lire un livre dont je ne comprenais bien souvent ni le vocabulaire, ni l'intrigue, ni le sens mais dont j'admire l'art. Je retiens en substance l'attachement viscéral à une terre et un don pour la peinture, un ensemble qui ferait penser à la fois à Jérôme Bosch et Picasso.

Iénot - - 76 ans - 24 janvier 2019


C'est ainsi que les lecteurs s'enlisent 5 étoiles

Ce roman abstrus est plein de mots archaïques, parfois mal employés, qui rebutent à la lecture. Il y a tellement d'autres livres à lire qu'on peut bien laisser tomber un auteur qui ne veut pas être compris !

Pierre PELOT n'a pas su suivre les conseils de Stéphane MALLARME "un grand écrivain se remarque au nombre de pages qu'il ne publie pas", sans doute par manque d'humilité et de maîtrise littéraire ! "Roman dense", ai-je lu dans plusieurs critiques précédentes ! Hélas non, c'est justement le contraire, beaucoup trop dilué, un de ses défauts majeurs... Un pavé ne me rebute pas. J'ai lu d'affilée les six tomes des "Rois maudits" ; mais la maîtrise littéraire de Maurice DRUON n'est pas à démontrer. Déplacer une virgule et ... Alors que là, de nombreux passages peuvent être lus en diagonale sans pour autant nuire au récit.
L'idée de saupoudrer de mots de patois ou de vieux français les chapitres "dix-septième siècle" est excellente. D'autres auteurs se sont risqués avec succès au langage local ou ancien : Henri VINCENOT (Bourgogne), Martial CHAULANGES (Limousin), Jean-François PAROT (Français du dix-huitième siècle), pour ne citer que ceux-là. Hélas, en fait de saupoudrage, c'est ici une avalanche de mots vernaculaires et de (pseudo-)vieux français. En passant par la Lorraine, Pierre PELOT enfourne ses gros sabots et nous assène inutilement, sans doute par manque de mesure, un nombre indigeste de mots d'un français obsolète dont, parfois, même le GODEFROY* ne se souvient pas. Ceci est d'autant plus ridicule que, dans les mêmes chapitres, l'auteur utilise des psittacismes et tics verbaux du moment comme "bien évidemment", "en même temps", "échanger" pour "discuter, converser", "clôturer" pour "clore", etc. ; et, alors qu'il use (et abuse) de "alentir", "vironnant", "emplir", et autres formes désuètes (hélas !), il ne craint pas de "rajouter" en lieu et place de "ajouter", et de "rentrer" pour "entrer", à la mode télévisuelle actuelle !
Le style manque d'homogénéité, comme si le roman avait été écrit à plusieurs mains ou à des époques très distantes les unes des autres. L'écriture est parfois plaisante, quasi poétique. Mais l'auteur se fourvoie souvent dans des méandres abracadabrantesques dont il a parfois du mal à se tirer, et se perd allègrement, en perdant son lecteur : de nombreuses phrases sont tarabiscotées et s'égarent dans les entrelacs de digressions oiseuses noyées dans un excès de virgules ou de "et" à répétition. Dommage, car le récit est marqué par moments d'une profonde subtilité ; à titre d'exemple, la description de la pensée de Deo, enfant sinon autiste, au moins un peu retardé (chapitre 22).
Exception faite du déséquilibre flagrant entre chapitres "passé" et "présent", le roman est bien construit, avec des retours en arrière parfois déconcertants, mais intéressants. Et dans le fond, les différentes intrigues et rebondissements font preuve d'une imagination fertile. Encore une fois, dommage, une plus grande maîtrise littéraire nous aurait apporté un grand roman !
Autre point, il y a loin entre la description de scènes de violence dans un roman et la morbidité jouissive dont se délecte ici l'auteur tout au long de son récit. PELOT peut toujours écrire, il ne pourra jamais dépasser en horreur ce que rapporte Ernst JÜNGER dans "Orage d'acier", car cette horreur-là n'est pas fantasmée, elle a été vécue ! Il était sans doute inutile de se vautrer aussi plaisamment dans le foutre, la merde et le sang pour témoigner de la brutalité et de la bestialité des troupes errantes dans les régions ravagées par la guerre de trente ans.
À côté de ces erreurs rédhibitoires, il y a pourtant un beau roman, riche en sentiments, événements et anecdotes, qui a, sans doute, nécessité de longues et nombreuses recherches.
Les mœurs des différentes couches sociales, les us et coutumes des diverses corporations, les comportements sont bien étudiés et souvent bien rapportés. L'auteur possède une grande connaissance de cette région des Vosges, frontalière de la Lorraine, de l'Alsace, du Comté de Bourgogne (Franche-Comté), et sait nous la décrire dans les moindres taillis.
En conclusion, je suis un peu sévère, je le reconnais, mais il y avait tellement de substance dans ce livre pour faire un grand roman, que je suis très déçu !

* Vingt-neuf mots (sur deux cent vingt-neuf dont j'ai dû chercher la signification) pour lesquels je n'ai pas trouvé de définition ; j'ai pourtant utilisé :
- site du Centre National de Ressources Textuelles et Lexicales.
- Larousse (Paris, 1880).
- Glossaire de la langue romane (XI – XVème siècle) – J.B.B. Roquefort (Paris, 1808).
- Thrésor de la langue françoyse – J. Nicot (Paris, 1606).
- Dictionnaire Universel de la langue Française – Trévoux (Nancy, 1740).
- Dictionnaire comique, satyrique, burlesque, libre et proverbial - P.-J. Le Roux (Paris 1752).
- Trois sites de l'Internet consacrés aux dialectes Vosgien et Lorrain.

Pour ceux/celles que cela intéresse, je peux communiquer le résultat de mes recherches.

Homo.Libris - Paris - 58 ans - 11 novembre 2018


A l'aube des siècles 10 étoiles

Décembre 1599, à l'aube du basculement vers un autre siècle, au pied de l'abbaye des chanoinesses de la ville de Remiremont, un bûcher accueille en son foyer chaleureux Clauda la maudite, condamnée au supplice du feu rédempteur pour acte de sorcellerie attesté par plusieurs personnes et confirmé par ses aveux arrachés par la pratique de la question. Juste avant de partir en fumée, Clauda a mise au monde un fils. Une jeune fille, issue de la noblesse, venue parfaire son éducation au sein de l'abbaye, décide de prendre en charge l'éducation de cet enfant.

Décembre 1999, à l'aube du basculement vers un autre siècle, Lazare Favier se remet d'un infarctus qui a failli le faire passer de vie à trépas. Il réside, depuis cet incident, chez son frère qu'il avait perdu de vue trente ans auparavant. Lazare redécouvre le pays Vosgien de son enfance. Si son corps semble avoir tenu le coup, ce n'est pas le cas de sa mémoire qui présente une zone d'ombre de plusieurs jours. Intrigué par quelques notes qu'il a griffonnées sur son agenda dont il a oublié la signification et par le destin de son ancêtre Victor Favier déporté au bagne de Nouvelle Calédonie, il part à la reconquête de sa mémoire effacée et de celle de son ascendant perdue dans les méandres de l'histoire familiale.

En ce début du XVII siècle, où l'Europe est enlisée dans la guerre de Trente Ans, Dolat et Apolline d'Eaugrogne voient leurs vies basculer à tout jamais. Ils sont tour à tour acteurs et victimes des événements terribles qui sèment la mort et la désolation sur le territoire de la Lorraine. Une époque de terreur inouïe au cours de laquelle la loi du plus fort se promulgue à coup de hache.

L'amour impossible entre un vilain et une noble sert de fil conducteur à ce récit qui nous entraîne dans les soubresauts d'une période de l'histoire sombre et meurtrière. Le premier tiers du roman pose les personnages et le contexte avec une certaine lenteur calquée sur le rythme des saisons, pour mieux ensuite nous prendre de court tant l'enchaînement des événements s'accélère au point d'en devenir vertigineux. L'auteur ne nous épargne rien de toute l'horreur des violences subies et des massacres perpétrés. Il décrit en détail des scènes de mise à mort épouvantables qui pourfendent nos entrailles (il faut avoir le cœur bien accroché). Mais il me semble que cela est nécessaire pour bien comprendre cet abîme d'obscurantisme dans lequel l'occident, à cette époque, avait sombré, une époque où l'on croyait pouvoir décrypter le mystère de toutes choses en général et de la vie en particulier à coup de dogmes et de dagues, comme on l'aurait fait pour sonder le cosmos à l'aide d'une bougie à la flamme vacillante.

Il m'a fallu presque 200 pages avant de réussir à m'adapter au style d'écriture employé par l'auteur, mélange d'ancien françois et de patois, mais dépassé cet obstacle, tout à fait franchissable, j'ai pris un immense plaisir à me laisser transporter par celle-ci tant la tournure est virevoltante et jubilatoire. Une lecture gargantuesque (plus de 1000 pages) qui demande une grande attention et qui se mérite à la fois, mais qui à la finale rassasie le lecteur amoureux de la prose.

Heyrike - Eure - 57 ans - 12 octobre 2014


L'avis de Patryck Froissart 10 étoiles

Titre: C'est ainsi que les hommes vivent
Auteur: Pierre Pelot
Editeur: Denoël
Année de parution: 2003
ISBN: 2.207.25080.6
Roman
576 pages


«On attache aussi bien toute la philosophie morale à une vie populaire et privée qu'à une vie de plus riche étoffe; chaque homme porte la forme entière de l'humaine condition».

Le constat exprimé par cette citation de Montaigne figurant en exergue de ce tumultueux roman pourrait s'appliquer à chacun de ses principaux personnages, qui passent du bien au mal, qui sont capables du meilleur et du pire, selon l'ambiance et les circonstances...

J'ai été immédiatement séduit par le style et la langue. L'emploi savant de mots du moyen français et de termes des parlers vosgiens déporte le lecteur dans l'époque où se déroule la majeure partie du roman et le dépayse dans les lieux rudes, sombres, froids, peuplés de loups, que devait être cette région montagneuse et forestière.

Dans ces lieux inhospitaliers, l'auteur inflige à ses personnages d'effrayantes péripéties et les rend tour à tour acteurs, spectateurs et victimes des pires atrocités dont est capable l'homme.

Les coups de hache pleuvent; les têtes se fendent et les cervelles se répandent; on tue, on étrangle, on éventre, on dépiaute, on brûle; les arquebuses et les mousquets fauchent; les viols sont actes banals; les vols, les trahisons, les tortures, les exactions, les supplices, les perversions, les émasculations, le cannibalisme, les pendaisons, les bûchers, les décapitations se succèdent, sur fond de Guerre de Trente Ans, de querelles religieuses, de luttes de pouvoir, de procès en sorcellerie, de passages de bandes de mercenaires et de déserteurs assoiffés de sang, de pillage et de sexe...

Le couple maudit que forment Dolat, bâtard de sorcière, et Apolline d'Eaugrogne, noble chanoinesse et riche héritière qui finira charbonnière, traverse tous ces évènements, y assiste, est partie prenante de ces horreurs, tantôt en y participant, tantôt en les subissant.

Ce roman noir des débuts du 17e siècle est inséré dans l'histoire, moderne, de Lazare Favier, qui revient en décembre 1999 dans son village natal, sur les mêmes lieux des Vosges, à l'occasion du décès de sa mère, et qui se trouve entraîné dans une quête irrésistible de ses ancêtres qui finira par rejoindre l'histoire de Dolat et d'Apolline.

Une lecture hallucinante, une atmosphère gore, une langue superbe!
A déconseiller aux âmes sensibles!

J'ai adoré ce livre!

Patryck Froissart, St Paul, le 31/05/2011

FROISSART - St Paul - 77 ans - 31 mai 2011


Monumental 10 étoiles

Des deux époques contées ici, c'est indéniablement la partie historique du début du 17ème siècle qui occupe la plus grande part de cette fresque monumentale. Tout commence par un procès en sorcellerie qui va aboutir à la réunion de deux jeunes êtres dans les murs des religieuses de Remiremont. Et c'est la vie de ces 2 personnages que tout aurait dû séparer que nous allons suivre au milieu des horreurs de cette époque qui verra son sommet dans les affres de la guerre de trente ans.
Un livre énorme dans tous les sens du terme, et qui devient d'emblée un ouvrage incontournable de ma bibliothèque aux côtés des Piliers de la terre et autres Shogun.

Frankgth - - 54 ans - 18 juin 2010


Une fin qui mérite la lecture des 1000 pages 9 étoiles

Voulant "me faire un pavé", j'ai vite choisi ce livre chez mon libraire.
Les premières 200 pages sont plus difficiles que les autres car le récit semble lent et le langage fort médiéval. Mais, étant habitué aux longueurs initiales chez Balzac par exemple, j'ai décidé de continuer.
Et bien m'en a pris, le rythme s'accélère, les intrigues sont dédoublées vu que les protagonistes sont séparés à certains moments. La violence qui est mentionnée dans certaines critiques n'est pas un vain mot mais explique les évolutions du personnage principal,Lazare. Il en a assez de la violence, cela le rend violent et fait qu'il a tendance à s'isoler. Apolline tombe de Charybde en Sylla au cours de tout le récit, mais reste toujours courageuse et aimante pour sa famille proche.

Un livre dur qui nous rassure face à nos problèmes quotidiens et nous évade au sein de la population civile lors de la guerre de Trente Ans. La fin est, je trouve, après plus de mille pages de tragédie et de têtes coupées, la seule raison pour ne pas clôturer le livre à regret. En d'autres termes, la fin est aussi émouvante, belle et tragique que le livre est long.

Lazercat - Haine-Saint-Pierre - 45 ans - 28 décembre 2008


Une oeuvre 10 étoiles

Bien sûr, voilà un très gros roman (le plus gros de Pelot), mais sans doute l'oeuvre principale de l'auteur.
Il faut s'accrocher au début, surtout que Pelot change de langage selon les époques alternées où se déroule son livre.

Mais que de bonheur, l'écriture est exceptionnelle, les paysages fouillés, on se prend souvent à relire des phrases, l'écriture de Pelot mériterait qu'il soit mieux reconnu.

J'avais déjà lu des Pelot (surtout "Méchamment dimanche"), et j'ai acheté celui-ci sur le texte de la quatrième (et puis j'aime les gros livres), aucun regret, car en plus le livre est prenant et jamais ennuyeux.

Seul regret, il arrive un jour où on lit le mot "fin".

Kristian22 - - 70 ans - 4 août 2007