Une enquête de Mary Lester, tome 25 : La variée était en noir de Jean Failler
Catégorie(s) : Littérature => Policiers et thrillers
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Bien humide tout cela...
Certains d’entre vous ont déjà lu des enquêtes de l’inspecteur Mary Lester, capitaine de la police nationale, domiciliée à Quimper. Ces ouvrages étaient signés Jean Failler, un auteur breton vivant à l’Ile-Tudy. Mais, voilà, lors de la parution du volume intitulé Le renard des grèves, enquête en deux tomes, Jean Failler a été poursuivi en justice ! Pour plagiat ? Atteinte aux bonnes mœurs ? Non, rien de tout cela… En fait, une femme qui s’était reconnue dans l’un des personnages, pourtant plutôt sympathique, a demandé à la justice une condamnation du romancier, à moins que plus prosaïquement elle ait cherché à obtenir une petite somme en monnaie sonnante et trébuchante… Mais ce qui est plus surprenant, c’est qu’elle a obtenu gain de cause, comme si on poursuivait Balzac d’avoir regardé de près sa concierge, son voisin, sa grand-tante… et Zola d’avoir étudié les journaux de son époque pour certains détails des grèves et des manifestations qu’il ne pouvait pas inventer sans se faire traiter de menteur par tous ses lecteurs…
Jean Failler, fortement abattu et déçu, a failli tout arrêter. C’est alors que Mary Lester, elle-même, a mis tout son poids dans la balance. Non, il fallait que ça continue… avec Jean Failler ou sans, qu’on se le dise ! Comme les lecteurs et l’éditeur souhaitaient que l’aventure continue, Jean Failler a décidé que ses romans évolueraient. Le récit se ferait au nom de Mary elle-même, à la première personne du singulier et ils seraient signés Mary Lester. On verrait bien s’ils oseraient la poursuivre, elle !
Ce changement, somme toute technique, a eu une conséquence beaucoup plus importante sur le fond, sur le ton, sur la forme. En effet, en prenant ce mode autobiographique, l’auteur a été obligé de nous faire aller au contact de la personnalité même de Mary, de nous donner quelques éléments sur sa vie sentimentale, sur ses sentiments, sur son regard du monde, autant de choses qu’il avait laissées dans l’ombre… avec, parfois, un petit rayon de soleil. Certes, Jean Failler ne transforme pas ses romans policiers en romans à l’eau de rose. Quand Mary se laisse aller à une confidence, elle se reprend vite : « Je ne sais d’ailleurs pas pourquoi je vous raconte ça, c’est du domaine privé, personne n’a à y mettre le nez ». Mais, c’est ainsi que les lecteurs comprendront que le fameux Lilian que l’on avait croisé deux fois auparavant était bien l’amoureux de Mary.
Cette série avait deux points forts : la qualité de l’intrigue et l’immersion dans un petit pays breton. Les garderait-elle dans cette nouvelle version ? Pour l’intrigue bien ficelée, le fond policier de ce nouveau roman, La variée était en noir, nous met en présence d’un dangereux incendiaire qui n’hésite pas à faire brûler toutes les maisons des « étrangers ». Il faut dire que nous sommes dans une région marécageuse où les habitants cultivent une forte appartenance au groupe qui fait regarder comme un suspect par essence même toute personne née ailleurs… Mary arrive là comme un cheveu sur la soupe, doit faire équipe avec des gendarmes qui se croient du pays et elle se retrouve face à un suspect tout désigné par la vindicte populaire… Mais, est-il bien le coupable que l’on cherche ?
Plus l’enquête avance, plus Mary réalise que cette « petite affaire » d’incendie de maisons cache une plus sombre machination, une organisation plus dangereuse, plus grave, plus complexe, de moins politiquement acceptable… Mais, cela, vous le découvrirez vous-mêmes en lisant ce roman de très bonne facture.
Le cadre géographique et breton est la Brière. C’est une région de marécages, pleine de petites îles plus ou moins habitées. Nous sommes aux limites du Morbihan et de la Loire Atlantique, du côté de la Turbale, de La Baule, Pornic… C’est un parc naturel, protégé, où l’on trouve, encore, des oiseaux et des plantes rares, voir presque entièrement disparus… C’est d’ailleurs ce qui va permettre à Mary de se faire passer, du moins au départ de son enquête, pour une photographe-ornithologue. Je n’irais pas jusqu’à affirmer que, après la lecture du roman, on bouclerait ses valises pour la Brière mais, quand même… on a envie d’y aller marcher, se promener…
Et la variée, me direz-vous ? C’est, tout simplement, l’un des personnages du roman, plein de mystère et qui va intriguer Mary…
Très bon roman policier qui montre comme un auteur s’adapte à une situation qu’il n’avait pas souhaitée et qui laisse présager que son héroïne est loin de disparaître de nos bibliothèques…
Les heurts et malheurs rencontrés par Jean Failler posent aussi la question de fond, à savoir de la réalité romanesque : un romancier a-t-il le droit, la possibilité, consciemment ou pas, de s’inspirer de ce qu’il vit, voit, entend ? Et dans quelles limites ? Que se passerait-il si Emile Zola écrivait aujourd’hui son roman Germinal ? Tous les mineurs iraient-ils en justice pour toucher quelque monnaie sonnante et trébuchante ? Ils seraient nombreux à se reconnaître dans ces travailleurs des entrailles de la terre…
Jean Failler défend l’idée de romans incarnés dans une région qu’il adore, enracinés dans une culture qui est la sienne, peuplés de femmes et d’hommes qu’il connaît car il les a tous rencontrés… Mais c’est tout simplement la preuve que ses romans sont bien humains…
En tous cas, moi j’aime, j’en redemande et je ne m’en lasse pas ! Merci Jean !!!
Les éditions
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La variée était en noir [Texte imprimé] Jean Failler
de Failler, Jean
Éd. du Palémon / Les enquêtes de Mary Lester
ISBN : 9782907572620 ; 9,00 € ; 25/05/2004 ; 402 p. ; Poche
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Un excellent Roman Policier
Critique de Bebern (, Inscrite le 20 juin 2016, 65 ans) - 28 mars 2017
Depuis, je lis régulièrement les aventures de ce Capitaine de Police avec toujours autant de plaisir.
Jean Failler parvient toujours à décrire l'ambiance particulière d'un lieu. Dans ce roman, ce sont les marais de la Brière qu'il nous fait découvrir: des gens et des endroits hors du temps, tyrannisés par la grosse brute de service.
Heureusement, Mary Lester, (qui s'empare pour la première fois de l'écriture du roman) ne se découragera pas et parviendra à résoudre l'énigme malgré des pressions des notables locaux.
J'ai aimé que Mary Lester prenne la parole. Son personnage n'en a que plus de consistance et de charme.
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