Spirou et Fantasio (Les intégrales), tome 1 : Les débuts d'un dessinateur
de André Franquin

critiqué par Shelton, le 1 avril 2007
(Chalon-sur-Saône - 68 ans)


La note:  étoiles
La genèse d'une narration graphique...
Contrairement à beaucoup d’entre vous, je ne suis pas de la génération de Spirou [j’entends là du magazine qui paraissait dans les temps héroïques de mon enfance, quand je lisais le Journal Tintin et Pilote]. Je croyais même que le personnage de Spirou était un héros belge… Ah ! Vous ne saviez pas que c’était un Français qui l’avait créé, un certain Rob-Vel, de son véritable nom Robert Velter. C’était le 21 avril 1938, à la veille de la guerre qui allait ravager l’Europe puis le monde… Cet auteur, atypique qui avait commencé dans l’hôtellerie avant d’enchaîner sur la marine pendant quelques années, avait la passion du dessin depuis son plus jeune âge. C’est après quelques petits essais que sa femme qui signe Davine lui offre le scénario de la première histoire de Spirou, parution dans le journal éponyme qui vient de démarrer [En fait, le nom avait été choisi pour le magazine par Emile-André Robert un ami de la famille Dupuis. Spirou est un mot wallon qui signifie écureuil, ou par extension espiègle].
C’est la guerre qui empêche Davine et Rob-Vel de prolonger les aventures de Spirou qui sont alors reprises par le grand Jijé qui est le créateur de Fantasio. La série Spirou sera alors poursuivie, à partir de 1946, par un jeune dessinateur inconnu, un certain André Franquin… Avec quelques jeunes artistes, il fréquente les studios CBA… Il y avait là Morris, Peyo, Eddy Pape…
Franquin va réellement donner vie à Spirou, va en faire une grande série, va y apporter son génie, son délire, en y plantant un animal extraordinaire, le plus étonnant de la bédé, le Marsupilami !!!
C’est cette période de Spirou dessiné et scénarisé par Franquin que les éditions Dupuis ont voulu mettre à l’honneur dans leur collection des Intégrales. Le premier volume englobera les années1946 à 1950, avec 14 histoires. Certaines de ces pages avaient été publiées dans des albums comme L’héritage ou Radar le Robot.
Bien sûr, le graphisme n’est pas encore aussi fluide que dans les aventures avec un certain Zorglub… Franquin pensait que c’était des péchés de jeunesse, son éditeur pense qu’il fallait (re)faire lire ces planches aux jeunes amateurs de Spirou et du Petit Spirou ! Moi, je suis tenté de voir les choses autrement. En effet, comme je n’étais pas très Spirou, c’est la meilleure façon de découvrir l’œuvre, de la prendre par le départ, de voir les personnages se mettre en place, construire leurs relations… Bref, c’est la meilleure des initiations, attaquer l’œuvre à sa genèse ! C’est à partir de l’histoire Les plans du robot que je commence à adhérer et que je me dis que je n’ai pas eu la chance de lire le journal Spirou dans mon enfance… Pour un peu, j’en voudrais à mes parents s’ils ne m’avaient pas offert Pilote dès sa parution, ou presque…
Contrairement à ce que je disais au départ, ces histoires initiales de Spirou fonctionnent encore assez bien avec des jeunes lecteurs… Mais elles sont aussi indispensables aux adultes qui ont eu leur jeunesse bercée par les histoires de Franquin, Gaston comme Spirou, et qui n’ont pas gardé leurs collections complètes…
C’est aussi une belle promenade dans l’histoire de la bande dessinée, car, franchement, Spirou a marqué tant de générations qu’il est impossible de l’oublier !