La double vie de Vermeer
de Luigi Guarnieri

critiqué par CC.RIDER, le 8 juin 2007
( - 66 ans)


La note:  étoiles
Le faussaire piégé
Né au Pays-Bas en 1889, Hans Van Meegeren est un peintre de style traditionnel ce qui se révèle être un véritable handicap vu qu'il tombe en pleine éclosion de la peinture moderne. Complètement à contre courant de la mode, il est éreinté par tous les critiques et ne rencontre que mépris, insuccès et vie difficile. Pour se venger de manière spectaculaire, il décide de réaliser plusieurs faux Vermeer, non par simple imitation d'un original mais par véritable création à partir de rien. Il faut dire que Vermeer de Delft (1632-1675) fut un peintre longtemps méconnu et peu prolifique.
Van Meegeren, s'appuyant sur l'hypothèse selon laquelle le maître aurait produit une série de tableaux à sujets religieux qui se seraient égarés et se servant des techniques de l'époque, réalise un véritable chef d'oeuvre, un magnifique « Christ à Emmaus » aussitôt reconnu comme authentique et vendu au plus haut prix. Encouragé par ce premier succès, le faussaire continue sur sa lancée, en produit une série et amasse une véritable fortune. Tout aurait été pour le mieux, s'il n'avait vendu ses faux aux principaux musées nationaux hollandais et un au maréchal Goering lui-même! A la Libération, en 1945, le pot aux roses est découvert, il est accusé de collaboration, l'Etat hollandais veut être remboursé et sa vie bascule...
Formidable roman historique basé sur une histoire vraie, ce livre se révèle passionnant et agréablement écrit. Il nous permet de visiter les recoins de la petite Histoire ( avec un luxe de détails qui empèche de douter du sérieux de la documentation de l'auteur, mais qui peut lasser parfois) et toucher du doigt la fragilité des réussites humaines et la grande relativité du savoir des fameux « experts »...
De l’art et du bluff 7 étoiles

Le singulier destin de l’œuvre de Vermeer, d’abord oubliée, ensuite ressuscitée. Le chapitre consacré à Proust - très inspiré.

Un autre paragraphe mémorable : pourquoi les modernes sont-ils fascinés par Vermeer ? Pour « le doute subtil qu’il insinue dans la réalité » (page 112). Je me souviens du mot de Leonard, l’art de la peinture est cosa mentale.

Pour moi cette première moitié du roman est une franche réussite. Les pièces s’imbriquent à merveille pour donner une construction virtuose. Hélas, la deuxième moitié manque totalement de panache. Cette chronique de l’enquête, du procès et de la paternité controversée d’un tableau respire le calme plat.

Béatrice - Paris - - ans - 11 avril 2009


De la subjectivité en art 10 étoiles

Han Van Meegeren, fameux faussaire hollandais, à qui l'on doit entre autres le célèbre "Christ à Emmaüs" de Vermeer. Un artiste dont l'oeuvre peinte fut décriée par toute la critique à l'époque et qui monta une vengeance machiavélique, mais ô combien géniale: produire de faux tableaux du XVIIe siècle et démontrer de la sorte à quel point la critique d'art est subjective et comme il est incertain que tel ou tel tableau soit réellement de tel ou tel peintre.

C'est une histoire extraordinaire que celle de Han Van Meegeren, personnage bien réel, que Luigi Guarnieri nous présente dans une fiction romanesque. Guarnieri, amoureux et de l'art et de la peinture, qui partage cette passion avec le lecteur, un peu comme le fait Metin Arditi dans "L'Imprévisible". Il y a une communication quasi fusionnelle, un sens du détail, un amour de la beauté et de l'élégance qui apporte énormément de charme à ce roman de qualité avec lequel j'ai pris beaucoup de plaisir.
J'ai apprécié la manière employée par Guarnieri pour humaniser, si besoin en était, le personnage de Han Van Meegeren, tout comme celui de Vermeer, considéré comme un dieu de la peinture, alors qu'on s'aperçoit tout de même que, en dépit de tout talent, ce sont encore trop souvent les experts qui font et défont la réputation d'un tableau et son identification peut s'avérer difficile mais aussi étonnamment subjective.
Je vais rapidement lire le dernier roman de Guarnieri, consacré à Rembrandt, pour y retrouver cet amour de l'art.

Sahkti - Genève - 50 ans - 14 décembre 2007