Sublimes paroles et idioties de Nasr Eddin Hodja
de Jean-Louis Maunoury

critiqué par Bouzouki, le 15 décembre 2007
( - 49 ans)


La note:  étoiles
L'idiot accompli
Nasr Eddin Hodja est un personnage légendaire qui aurait vécu en Turquie au XIIIe siècle, et dont les histoires sont racontées dans tout le Moyen-Orient. C'est en quelque sorte le "Toto" de l'époque et de la région. Le livre est un recueil de très courtes histoires très savoureuses mettant en scène ledit héros. Nasr Eddin joue les naïfs et les idiots complets, mais ses saillies sont autant de provocations et d'irrévérences contre les institutions de l'époque.
Un petit exemple pour vous mettre l'eau à la bouche:

"Un jour que Nasr Eddin passe au pied d'un minaret du haut duquel le muezzin lance son appel à la prière, il lui crie:
- Cesse de te lamenter! Tu as pu grimper tout seul à cet arbre sans branche? Eh bien débrouille-toi sans moi si tu veux descendre!"
Un grand classique drôle et jubilatoire.
Découvrir une autre culture avec le sourire 7 étoiles

La découverte d'une culture à travers des histoires très courtes, débouchant sur une certaine forme de sagesse.

Le héros apparaît d'abord naïf, voire candide mais il se fait aussi rusé et même roublard.
Chaque histoire puise ses racines dans la vie courante, dénonçant les travers de la société, de son fonctionnement, de ses citoyens, ne dédaignant pas non plus une satire de la religion et des puissants.
Tantôt sources de sourire de par leur absurdité, tantôt surprenantes par l'inattendu qu'elles contiennent, elles sont bien souvent source de réflexion sur les codes de la vie en société, les relations entre les personnes, les valeurs apportées aux choses matérielles comme aux choses de la vie.

L'amusant se trouve également dans la polyvalence de Nasr : un jour pauvre au point d'être endetté pour des années, le lendemain riche à pouvoir distribuer de l'argent. Un jour bastonné comme le pire des miséreux vivant de rapines, le lendemain en poste de juge pour ces mêmes personnages.
Si je rejoins l'avis de beaucoup évoquant son cousinage avec Maître Renart (et pourquoi pas parfois avec des personnages plus locaux comme Cafougnette ou même Bécassine), j'y vois également l'embryon de ce que deviendront des fables.

En conclusion, un livre facile à lire, prêtant assez souvent à sourire, mais plein de sources de réflexion universelle même s'il se déroule uniquement dans le Moyen Orient et plus loin à l'est.
L'Unesco n'est pas passée à côté de cette universalité en faisant de 1996 l'année Nasr Eddin.

Mimi62 - Plaisance-du-Touch (31) - 71 ans - 21 août 2019