L'Oeuvre au noir de Marguerite Yourcenar

L'Oeuvre au noir de Marguerite Yourcenar

Catégorie(s) : Littérature => Francophone

Critiqué par Jules, le 30 novembre 2000 (Bruxelles, Inscrit le 1 décembre 2000, 80 ans)
La note : 10 étoiles
Moyenne des notes : 9 étoiles (basée sur 17 avis)
Cote pondérée : 9 étoiles (43ème position).
Discussion(s) : 1 (Voir »)
Visites : 19 658  (depuis Novembre 2007)

L'harmonie du style, de l'érudition et de l'intelligence

Il faut un brin de folie pour oser faire une critique d'un livre tel que " L’œuvre au Noir " quand on n'est pas du métier !
Et cela en seulement une centaine de mots (impossible !). Avec Zénon, fils bâtard d’un gros marchand brugeois, Yourcenar nous entraîne dans les grands problèmes d'une époque de l'histoire et de la Flandre. Nous vivons les guerres entre François 1e et Charles-Quint, l’occupation espagnole en Flandre se poursuivant sous Philippe II ; le duc d'Albes et la " Très Sainte Inquisition ". La lutte des patriotes flamands et des iconoclastes appelés " briseurs d'images ". Les bûchers, les meurtres et la torture, courant à l’époque, au nom de Dieu qu’il soit d’une tendance ou d’une autre.
Zénon est un grand voyageur, parcourant le monde pour tenter d’apprendre la vraie médecine. Il fuit aussi les persécutions que lui valent certains écrits philosophiques ou médicaux qui ont attiré sur lui les foudres de l’église. Lassé de fuir, Zénon choisi de rentrer dans sa ville de Bruges en compagnie d’un dignitaire ecclésiastique à l'esprit ouvert. Il pense que ses longues années d’absence lui garantiront l’anonymat et que ses écrits ne sont pas venus jusque-là. En révéler plus n’a pas d’utilité.
Yourcenar met son érudition, la splendeur et la rigueur de sa langue au service de la pensée et de l'intelligence. On sent que, pour elle, Zénon est un compagnon de route depuis de longues années. Elle le dit d'ailleurs dans ses notes en fin de livre. Au fil des pages, et du déroulement de l'histoire, toutes les grandes questions que se posent certaines personnes seront évoquées.
La foi, l’existence ou l'inexistence de Dieu, l’utilité de la vie, que représente l’homme dans l'univers, le droit ou non au suicide, Dieu et l’église, Dieu et la politique, les grandeurs et lâchetés de l'âme humaine, le rôle de l'opinion publique etc.
Las d’une littérature française actuelle, plus préoccupée du style et de l'accumulation des phrases sans grandes profondeurs, je viens de terminer " L'Œuvre au Noir " pour la quatrième fois…
Les chef-d'œuvre survivent au temps parce qu'ils abordent les vrais problèmes : ceux qui préoccupent les hommes de toutes les époques. Non content de faire cela, ils le font avec brio !

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Grandeur alchimique

10 étoiles

Critique de Bookivore (MENUCOURT, Inscrit le 25 juin 2006, 42 ans) - 10 juin 2021

Comment décrire et parler d'un tel livre, en effet (allusion à plusieurs des critiques ci-dessus et ci-dessous) ?
Mon deuxième Yourcenar (et le dernier pour le moment), découvert l'an dernier en plein confinement, que j'aurais pu découvrir bien plus tôt, et je regrette de ne pas l'avoir, autrefois (voir ma critique éclair sur ce livre), acheté en même temps que les "Mémoires d'Hadrien".
"L'Oeuvre Au Noir", roman sur la vie et le travail d'un alchimiste fictif du nom de Zénon, en plein Moyen-Âge obscurantiste, est un chef d'oeuvre absolu, que je classe carrément, bien que je ne l'ai lu qu'une seule fois à ce jour (mais ça ne va pas durer), dans mes, allez, 10 ou 15 préférés, et pas en dernière position pour faire le poids.
Je ne sais dire à quel point ce roman terriblement facile à lire est enivrant, envoûtant, sublime, parfait.
Il donnerait presque envie de devenir alchimiste à quelqu'un qui, avant la lecture du livre, ignorerait tout, jusqu'au nom, de l'alchimie. Grandiose.

Contre l'obscurantisme et les superstitions

7 étoiles

Critique de Veneziano (Paris, Inscrit le 4 mai 2005, 47 ans) - 30 juin 2014

Ce roman aussi sombre que rocambolesque n'est pas véritablement agréable à lire, à mon sens, mais reste intrigant, néanmoins : en effet, ce paradoxe s'explique par le fait que la lectrice et le lecteur découvrent le mode de vie d'une époque, le poids des traditions, de la structure inégalitaire de la société, d'une religion aux dogmes aussi sévères que pétris de superstitions.
Le protagoniste, lui-même empreint de contradictions, est à la fois quelqu'un de brillant et de foncièrement humain, ce qui le rend fragile. Il succombe à plusieurs de ses tentations, l'une touchant à l'une des activités "professionnelles", et cela le poursuivra bien sévèrement. On apprend donc que le passage à la Renaissance ne constitue pas encore une ouverture spirituelle et sociale, ce qui ne viendra qu'avec les idées des Lumières. L'ouverture n'est que culturelle et artistique, et notre protagoniste le paie au prix fort.
C'est intéressant, brillant, bien rudement amer.

Un grand moment de lecture

10 étoiles

Critique de Nathafi (SAINT-SOUPLET, Inscrite le 20 avril 2011, 57 ans) - 27 novembre 2012

Que puis-je ajouter suite à ces critiques toutes plus justes les unes que les autres ?
Je vous dirai que j'ai eu, au début, un peu de mal à entrer dans l'histoire, à cause de l'écriture peut-être qui n'est certes pas déplaisante, bien au contraire, mais qui demande un certain effort d'attention.
Ce livre ne se lit pas passivement, sa richesse de vocabulaire, les thèmes qu'il aborde et la trame de l'histoire sont autant de difficultés à appréhender.

Mais c'est un grand bonheur de suivre les pas de Zénon, de le voir scruter ce qui l'entoure, essayer de comprendre l'Homme, se situer dans cet environnement qui, somme toute, n'est pas celui qui lui convient...
On en vient à partager sa souffrance et, au fil des pages on s'attache à ce personnage.

Un grand moment de lecture.

Une autre forme de lecture

8 étoiles

Critique de Elya (Savoie, Inscrite le 22 février 2009, 34 ans) - 13 décembre 2011

Ah, un classique. J’ai décidé d’insérer entre mes lectures de romans très contemporains et d’essais couvrant différents thèmes des œuvres dites classique. J’entends cela comme des œuvres dont le nom de l’écrivain est connu par beaucoup, parfois lu -jamais compris- à l’école, souvent redouté, gardé bien au chaud tout neuf dans nos bibliothèques personnelles, au cas où, un jour, on ait le courage...
Marguerite Yourcenar est une valeur sûre. J’adore son style, cet immense talent qu’elle a pour tout décrire avec une précision exquise. A la lecture de L’œuvre au noir, il est clair que son style si raffiné est bien présent. C’est à chaque chapitre une kyrielle de mots inconnus, parfois désuets, toujours complètement appropriés au contexte, à la forme de la phrase. Ses tournures sont exceptionnelles, presque émouvantes, et cela constitue en soi une forme de suspense, quelque chose qui nous pousse à continuer cette lecture. C’est une lecture pourtant difficile et exigeante, car elle se déroule à une époque (le Moyen-âge) qui nous est inconnue, voire hostile ; une époque dont les mœurs, les enjeux, le quotidien nous échappent complètement.
Nous avons un autre compagnon de lecture, ce fameux Zénon, désespéré par l’obscurantisme, fervent-mais discret- défenseur de l’hérésie.

« Il s’aperçut ensuite que les livres divaguent et mentent comme les hommes, et que les prolixes explications du chanoine portaient souvent sur des faits qui, n’étant pas, n’avaient pas besoin d’être expliqués. »

Cette lecture est une réussite, mais elle est aussi éprouvante. Il y a parfois des longueurs, et certains détails voire même des paragraphes entiers semblent complètement abscons. On est bien loin d’une lecture qui détend, dans laquelle on peut se plonger après une journée studieuse. Parfois, on redoute même de devoir se replonger dans le livre. C’est une question d’habitude, sans doute. Est-ce une habitude intéressante à acquérir ? C’est une autre histoire.

Une lueur

10 étoiles

Critique de Stavroguine (Paris, Inscrit le 4 avril 2008, 40 ans) - 12 avril 2011

Zénon l’annonce tout net en début de roman : avant que son crâne ne se vide pour devenir une tête de mort, il veut être plus qu’un homme. Il sera finalement ce dieu évoqué par un autre personnage marquant de ce grand roman, le prieur, un dieu loin d’être omnipotent, une petite lueur qui chancelle et risque à tout instant de mourir dans un monde d’obscurantisme.

Car L’Œuvre au noir, c’est avant tout l’histoire d’un homme qui, trop brillant, se heurte aux barrières imposées par le monde dans lequel il évolue ; qui, découragé par de vains combats, préfère renoncer au monde et s’en retirer, se faire oublier, plutôt que d’affronter ce qu’il ne peut pas battre ; qui, malgré tout, sera rattrapé par ces puissances qui craignent la pensée. La petite lueur qu’est Zénon jamais ne brillera ; jamais elle ne deviendra une de ces Lumières destinées à éclairer l’Europe deux siècles plus tard.

Zénon est né trop tôt – deux siècles plus tard, c'eut été différent. Peut-être ? Dans son siècle, l’obscurantisme auquel il se heurte prendra la figure de l’Inquisition venue d’Espagne dans cette Flandre à la Bruegel pour réprimer toute velléité d’indépendance politique, religieuse ou morale dans le peuple. Elle plane au-dessus de Zénon comme une ombre menaçant à chaque instant de le saisir. Si Zénon est à ce point pourchassé, c’est qu’il est un esprit libre, comme il y en eut sans doute de tout temps au grand malheur des puissants qui préfèrent toujours l’ignorance chez leurs subordonnés. C’est cela, sans doute, qui explique l’universalité du personnage et le fait qu’on se sente si proche de cet alchimiste du 16ème siècle. En effet, les prophéties qu’on fait brûler à la Sorbonne, les discours sur la courbe de la terre, les soins prodigués aux pestiférés par ce médecin à houppelande rouge… ne sont là que pour le folklore : ils font tout juste partie de ce décor moyenâgeux que Yourcenar nous décrit en s’intéressant plus à la pensée qu’à l’architecture. Ce qui compte vraiment, c’est cette vie d’errance passée à devoir solliciter le soutien des puissants pour éviter d’être sacrifié et brûlé vif sur le bûcher de l’ignorance, puis cette mise en retraite par dégoût d’un monde de courtisans. Ce qui compte encore plus, ce sont ces dialogues avec Henri-Maximilien, l’homme d’action et le jouisseur, avec le prieur, l’homme pieux et sage, et avec le chanoine, le vieillard conservateur et, pour ainsi dire, « comme il faut », ou « comme il faudrait ».

Dans ces moments d’échange lors desquels Zénon nous livre sa pensée, Yourcenar, en feignant de nous parler d’un autre monde, n’évoque que le nôtre. Seront abordés sous divers angles Dieu et la foi, les sciences, la politique, les rapports entre hommes et femmes, la liberté surtout, et cette malédiction des hommes brillants de se briser sans cesse contre les remparts érigés par des médiocres. Une des clés de l’œuvre nous est peut-être livrée dans le texte : « Toutes ces opinions passaient pour offenser Dieu ; en fait, on leur reprochait surtout d’ébranler l’importance de l’homme ». Toute la subversion réside en effet non pas dans ce que l’on avance, mais dans le système qu’on fait flancher en se permettant ainsi de contester ce qu’il a décrété.

Le discours de Zénon est étonnamment moderne et le livre de Yourcenar n’est pas un roman historique : les inquisiteurs sont encore prêts à sévir contre ceux qui voudraient s’écarter de la voie par eux tracée. Yourcenar nous sert ce joyau d’intelligence dans un écrin d’érudition et de style à la hauteur de son propos. Son 16ème siècle est saisissant et, à la manière d’un grand conteur, elle nous transporte dans cette époque charnière entre le Moyen-Âge et la Renaissance, nous rend familier ce siècle d’ombre et de lumière, étrangement attirant, proprement fascinant. Ainsi, elle fait de L’Œuvre au noir un chef-d’œuvre véritable, aussi dépaysant qu’érudit ; elle nous fait découvrir, apprendre et réfléchir ; elle nous offre surtout un roman profondément humaniste, presque au sens maçonnique : pour le bien de l’humanité, dont ce qui vraiment la compose semble tout entier réuni dans ces quelques quatre cent pages. Le Grand Œuvre est réussi.

Une oeuvre humaine

9 étoiles

Critique de Mr.Smith (Bruxelles, Inscrit le 10 avril 2010, 40 ans) - 2 juillet 2010

Aucun héros, aucun anti-héros. Que de l'homme.
De tout temps, ce qui échappe le plus au savoir et à l'érudition de l'homme est paradoxalement lui-même.
Au-delà des intrigues fourbes et des croyances de l'époque, s'impose une vision épurée, juste et noble de ce que nous sommes. Ce livre est intemporel.
Qu'il est aisé de remplacer les puissances coercitives du seizième siècle par celles que nous connaissons !
Zénon vivra tant que l'homme perdurera.

Dans le bouillonnement intellectuel du 16ième siècle.

10 étoiles

Critique de Grégoire M (Grenoble, Inscrit le 20 septembre 2009, 49 ans) - 27 mars 2010

Une plongée dans le moyen-âge du 16ième siècle, celui des guerres de religions et de l’inquisition, des luttes des familles royales pour la gouvernance de l’Europe. On y suit avec Zénon le bouillonnement intellectuel de l’époque, celui de la naissance d’une médecine et d’une science moderne dans une démarche qui peine à se libérer de l’hermétisme de l’alchimie, de la superstition de l’astrologie ou du poids des auteurs antiques. Un esprit qui devra faire face à la persécution de l’Eglise. On y découvre aussi le bouillonnement des idées chrétiennes de l’Eglise, de la réforme et de sectes encore plus radicales qui fleurissaient à l’époque.
Le parcours personnel, intellectuel et philosophique de son personnage est tout aussi captivant.
Un livre exigeant de point de vue du vocabulaire (par l’emploi de termes anciens) et qui demande sans doute une bonne connaissance historique pour être apprécié dans toute sa profondeur (pour saisir toutes les implications des guerres de couronnes ou de religions).
Un chef d’œuvre incontournable d'une très grande richesse.

Un parcours exemplaire

10 étoiles

Critique de Le rat des champs (, Inscrit le 12 juillet 2005, 74 ans) - 9 août 2009

J'ai été fasciné par le personnage de Zénon, esprit scientifique, pragmatique, laïque et athée dans l'époque intolérante de l'inquisition. Ses dialogues avec le prieur et le chanoine sont d'une profondeur extraordinaire, mais avant d'en arriver à la quintessence du livre, il faut malheureusement se farcir une longue introduction dispensable sur la vie de sa mère Hilzonde, du falot Henri-Maximilien et d'autres personnages peu intéressants, ce qui est un peu dommage. Le style littéraire de l'auteure est irréprochable et d'une élégance rare dans la littérature contemporaine, ce qui en fait un classique indémodable. Zénon est un alchimiste au sens le plus noble du terme, puisqu'il a compris que la pierre philosophale sur laquelle il doit travailler, c'est lui-même. Son chemin est celui que les bouddhistes appellent le Dharma, fait de recherche de la connaissance et de compassion. Un livre merveilleux, d'une grande profondeur, pour lequel malgré les quelques réserves que je faisais, la cote maximale s'impose sans l'ombre d'un doute.

Un chef d'oeuvre

10 étoiles

Critique de Arval (Papeete, Inscrite le 8 mars 2008, 56 ans) - 5 mai 2009

Pour ma part, j'ai trouvé la lecture de ce livre difficile. Après cela, je sais que j'ai encore beaucoup à apprendre de l'art de la lecture et donc de l'écriture. C'est le genre de livre qui vous met une bonne claque sur la figure et toutes les pendules se retrouvent mises à l'heure. Mon petit "Ego" de lecteur en a prit pour son grade. J'ai lu "Les Mémoires d'Hadrien", sans éprouver tant de difficulté, bien au contraire. Mais là, c'est autre chose.
Ce roman, on ne le lit pas une seule fois, mais plusieurs fois, pour en puiser toute l'intelligence, toute la connaissance et toute la subtilité qu'il possède tant dans la forme que dans le fond. Je pense que "L'œuvre au noir" est un livre qui se mérite.
Je le relirai, c'est impératif !

Et si Marguerite avait rencontré Rabelais ?

9 étoiles

Critique de Débézed (Besançon, Inscrit le 10 février 2008, 77 ans) - 4 mars 2008

L'historien que j'ai essayé de devenir reste ébloui devant une telle érudition et une telle connaissance de l'Histoire avec un "H". Marguerite a tout compris car "L'oeuvre au noir" c'est aussi l'alchimie, la science de ceux qui savaient mais qui ne pouvaient pas le dire au risque d'être traités d'hérétiques.

"L'oeuvre au noir" c'est l'aventure du savoir en lutte contre l'obscurantisme qui favorise l'emprise des forts sur les faibles.

C'est aussi dans un style flamboyant une autre image de l'Europe de la Renaissance à l'époque où les moyens de communication étaient quasiment inexistants mais où les routes étaient peuplées de pélerins et autre svoyageurs en quête du savoir.

Et si Marguerite avait rencontré François Rabelais dans une autre vie ?

Et pour rester dans cette période luxuriante, lisez "L'éclipse" d'un jeune Japonais Keichirô Hirano qui connait mieux l'hisotire des Européens que les Européens eux-mêmes !

une marguerite fait le printemps

8 étoiles

Critique de Happy (, Inscrite le 22 novembre 2007, 52 ans) - 24 janvier 2008

Difficile de faire des jeux de mots sans être ridicule avec un auteur de cette trempe, et pourtant ce livre met du baume au coeur, et fait fleurir l'espoir.

Le grand oeuvre, c'est vraiment l'homme, et Zenon est merveilleusement attachant.

je n'ai malgré tout pas aimé la fin.

Livre magnifique !

10 étoiles

Critique de Dirlandaise (Québec, Inscrite le 28 août 2004, 69 ans) - 10 janvier 2008

Je termine tout juste l'Oeuvre au Noir et je ne peux que m'incliner devant tant d'érudition.

Zénon est un personnage que j'ai suivi avec beaucoup de passion et j'ai été vraiment bouleversée par les toutes dernières pages qui racontent sa fin. Avec ce livre, Marguerite Yourcenar brosse un portrait magnifique de cette époque moyennâgeuse avec ses idées, ses craintes, ses cruautés et surtout ses aberrations. Les classes sociales y sont très bien dépeintes à travers les différents personnages et c'est surtout Zénon avec ses angoisses, ses doutes, ses pensées et son parcours de vie qui rend le livre si passionnant. Un homme très humble mais aussi très en avance sur son temps qui supporte assez mal les contraintes et l'ignorance de l'époque. Il vit dans l'ombre un bonne partie de sa vie mais il rayonne intérieurement. Il soigne les malheureux pendant de longues années sans dévoiler sa véritable identité : ses écrits l'obligent à se cacher afin d'échapper aux persécutions de l'Église.

Une écriture très dense et extrêmement bien documentée ajoute au plaisir de la lecture de ce chef-d'oeuvre. Le chapitre intitulé "La promenade sur la dune" est tout simplement magnifique !

Un très beau livre que je relirais sûrement car il le mérite.

la découverte de l'humanité

9 étoiles

Critique de Vda (, Inscrite le 11 janvier 2006, 49 ans) - 19 février 2007

Relire L'oeuvre au noir (relire Yourcenar) n'est jamais vain. Il y a cette écriture à nulle autre pareille. Cette écriture qui se prête si bien à la lecture à haute voix et qui butte car les phrases y ont une construction bien différente de ces phrases paresseuses qui sont l'habituel de l'art romanesque contemporain.
Et puis, il y a les carnets qui suivent l'oeuvre et qui éblouissent par l'érudition et la sincérité de l'auteur.
Sans conteste l'un des plus grands écrivains.

Il y a l'humain qui transparaît dans Zénon comme dans chacun des personnages de ce roman si dense et si riche. L'humain tel qu'il est, sang et phyle, transcendant et brutal. Aucune simplification, aucune caricature. Les personnages de Marguerite Yourcenar sont plus que des êtres d'encre, ils ont une existence, une philosophie qui est leur être, ils sont. Et c'est un plaisir de les lire, et les relire, les découvrant un peu plus, un peu mieux à chaque fois.

Zénon ou la révolte de l'esprit.

9 étoiles

Critique de Philduch (Aix en Provence, Inscrit le 17 février 2006, 57 ans) - 6 mars 2006

Par-delà la rigueur historique du récit, situé au XVIème siècle, l'oeuvre au noir offre au lecteur un portrait intimiste de son personnage principal, Zénon, philosophe voyageur, alchimiste, esprit libre, conscient de la vaniteuse médiocrité des passions humaines, déterminé à ne céder ni aux dogmes de son temps, ni à l'engourdissement des sens que représente pour lui la recherche du bien-être.
D'un style limpide, caractérisé par la richesse de son vocabulaire, le roman de Marguerite Yourcenar délaisse les sentiers battus de l'aventure-fiction pour ceux, plus ardus, des méandres de l'esprit humain. N'y cherchez pas d'anecdotes croustillantes, de récits exotiques, de combats épiques; les personnages qu'on y croisent ont la noirceur du siècle, religieux à l'esprit obtus, marchands comploteurs, artisants laborieux. Véritable plongée dans les eaux troubles de l'obscurantisme, l'oeuvre au noir est avant tout une réflexion sur la science, un texte certes empreint de pessimisme, mais dont certains passages, étourdissants, donnent envie d'être relus tant ils nous éclairent sur l'âme humaine.
Loin de ces textes superficiels dont on nous abreuve, un chef d'oeuvre de sensibilité. Lancez-vous! Vous ne ressortirez pas indemne de l'expérience...

L'intelligence, le style, l'humanité

10 étoiles

Critique de Maroni (, Inscrit le 13 décembre 2004, 65 ans) - 30 décembre 2004

Pour ma part, j'ai relu l'Oeuvre au noir l'été dernier sur mon île préférée en Grèce. Je me suis forcé à le (re)lire lentement en savourant chaque page et chaque phrase. Vraiment je trouve que ce roman est une grande leçon d'intelligence, de style et, au final, d'humanité. Et puis Yourcenar cela change tellement des plumitifs mis en avant dans le Monde des livres, le Figaro littéraire et autres feuilles peu ragoûtantes...

Un chef d'oeuvre

10 étoiles

Critique de Sallygap (, Inscrite le 18 mai 2004, 47 ans) - 29 août 2004

Certains livres sont inoubliables..."Mémoires d'Hadrien" en est un pour moi, et "L'oeuvre au noir" va certainement le devenir.
Difficile de faire une critique après Jules, la sienne résume tellement bien l'histoire, le contenu, les questionnements...
Ce livre n'est pas seulement l'histoire d'un personnage passionnant, c'est un document d'une richesse étonnante sur une époque, une période de l'histoire, une réflexion sur un monde en pleine mutation, entre Moyen Age et Renaissance...tout ça sous la plume de M.Yourcenar.
Que dire de plus? Jetez vous sur ce livre...(et aussi merci à Jules dont la critique m'avait donné envie de le lire).

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  A propos de Yourcenar et de "l'Oeuvre au noir" 12 Jules 27 novembre 2012 @ 21:54

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