Le moulin de la Sourdine
de Marcel Aymé

critiqué par JEANLEBLEU, le 21 janvier 2008
(Orange - 56 ans)


La note:  étoiles
Quand Marcel Aymé fait dans le polar...
Quand Marcel Aymé fait dans le polar c'est forcément différent et un peu déjanté !

L'histoire se déroule dans le Dôle de l'entre-deux guerres.

Un notable de la ville, notaire de son état, commet un crime pour la "beauté du geste" en s'arrangeant pour que la responsabilité du crime soit endossée par un autre. L'histoire part de là et met en scène trois type de protagonistes : le milieu grand bourgeois de la ville (avec notamment, ses préjugés, ses magouilles électorales, ...), le quartier populaire et miséreux de la Malleboine (où règne une certaine solidarité) et une bande de collégiens dont les activités ludiques extra-scolaires créent un lien entre ces 2 univers.

Comme d'habitude avec Marcel Aymé, c'est non manichéen, plein d'humanité, d'humour, de poésie, de critique ironique de notre société, le tout écrit dans une langue vraiment superbe.

A lire !!!
Un coupable idéal 8 étoiles

Dans une petite ville de province, Buquanant et quelques camarades ont l’habitude de se retrouver à la sortie de l’école pour jouer quelque temps avant de rentrer chez eux. Il les incite à venir dans son quartier, un brin mal famé, à l’autre bout de la ville pour leur faire découvrir d’autres terrains de jeux et surtout une mystérieuse rivière souterraine, appelée La Sourdine qui doit être passionnante à explorer pour cette petite bande de gamins d’une douzaine d’années. De son côté, Maître Marguet, notaire de son état, voudrait convaincre le vieux Burtillat de vendre son terrain pour permettre l’extension de TDC, la petite usine locale. Sans y parvenir. Passant par là, Troussequin, pauvre hère peu gâté par la nature, demande aux deux hommes de lui accorder quelques heures de travail. Le notaire accepte de l’embaucher à repeindre sa cabane de jardin. Quelques jours plus tard, la jeune servante du notaire est retrouvée dans sa chambre, poignardée de bien vilaine manière. Le coupable est tout trouvé, ce sera Troussequin qui a déjà tâté de la prison pour tentative de viol. Mais c’est sans compter sur le témoignage des gamins juchés en haut du clocher de l’église…
« Le moulin de la Sourdine » n’est pas vraiment un roman policier dans la mesure où il n’y a pas d’enquête au sens classique du terme. Le lecteur devine le nom du coupable dès le début. C’est plutôt un roman noir ou un roman social et même une fable avec une morale du genre : « selon que vous serez puissants et respectables ou pauvres et peu recommandables, vous serez jugés de bien différente manière ! » La petite ville de province, que l’on peut supposer franc-comtoise, est un microcosme assez figé avec sa partie respectable et son quartier populaire, ses notables, le maire, le notaire, le juge d’instruction et ses gueux, tous bien pétris d’humanité. L’ironie teintée de mansuétude de Marcel Aymé s’en donne à cœur joie dans cette histoire sur la culpabilité, les préjugés et la facilité avec laquelle l’opinion se fait et se défait. Même si ce texte date de 1936, il est encore très agréable à lire aujourd’hui, ne serait-ce que pour le style élégant de Marcel Aymé, pour la description de personnages assez hauts en couleurs et pour le sujet intemporel, celui de l’erreur judiciaire.

CC.RIDER - - 66 ans - 24 septembre 2024