L'homme révolté de Albert Camus
Catégorie(s) : Sciences humaines et exactes => Essais
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Des nécessités de la révolte
Quand j'ai lu ce livre, il y a de cela une bonne vingtaine d’années, il m'a fortement impressionné. En faire la critique est très difficile tant les idées qui y sont exprimées sont nombreuses et variées.
Il me semble essentiel d'expliquer le point de départ de la réflexion de Camus. Le monde est absurde et, de ce point de vue, nous pourrions accepter l'idée que ce siècle (le XXeme) qui a tué, exterminé, tant d’individus, ne serait pas plus mauvais qu'un autre et qu’il ne resterait à l’homme qu'à assister aux faits, puisque l'absurde, en lui-même, exclut les jugements. L'un vaut l'autre. Mais l'homme crie l’absurdité du monde et ce cri, en soi, le force à croire à sa protestation : c’est la révolte. « La révolte naît du spectacle de la déraison, devant une condition injuste et incompréhensible. »
La révolte suppose une notion de valeur et celui qui se révolte contre un état qu’il juge insupportable rend cet état insupportable pour tous les hommes. Sa révolte devient collective et rejoint la notion d'une certaine « condition humaine » comme le supposaient les Grecs.
Dans son livre, Camus évoque également longuement le problème des idéologies et constate qu'elles ont bien souvent pour effet de mener aux pires crimes. Il écrit : « L'idéologie, aujourd’hui, ne nie plus que les autres, seuls tricheurs. C’est alors qu'on tue. »
Dieu est mort, mais cette pensée n'a donné naissance qu’ à un humanitarisme « privé de justification supérieure » et Marx remplacera l'au-delà par le « plus tard ». Nietzsche avait prévu ce qui allait arriver, dit Camus, et avait écrit : « Le socialisme moderne tend à créer une forme de jésuitisme séculier, à faire de tous les hommes des instruments » et « Ce qu'on désire, c’est le bien-être. Par suite on marche vers un esclavage spirituel tel qu'on n’en a jamais vu. » Et Camus d'écrire : « Le grand rebelle crée alors de ses propres mains, et pour s’y enfermer, le règne implacable de la nécessité. Echappé à la prison de Dieu, son premier souci sera de construire la prison de l’histoire et de la raison. » Nous voyons ici pourquoi Sartre a « excommunié » Camus ! Et Camus ira bien plus loin dans sa critique de la pensée de Marx et du communisme stalinien que ce que je vous en montre ici.
La révolte ne peut se soumettre à une idéologie sous peine de bien vite se transformer en une nouvelle tyrannie et devenir une autre mécanique meurtrière. La révolte doit rester générosité, amour de la vie. Elle ne supprimera jamais les souffrances, ni les injustices, mais elle aura pour obligation de se lever contre elles à chaque fois qu'elles se présentent.
Voici seulement quelques idées de base développées par Camus dans ce livre qui en développe bien d’autres. Mon seul objectif serait de donner envie à certains de le prendre et de se lancer à sa découverte. On en ressort plus riche, plus ouvert aux autres, à la vie et, surtout, à la tolérance dans le refus des idéologies qui rétrécissent la vie, la pensée et donc l’homme.
Les éditions
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L'Homme révolté [Texte imprimé] Albert Camus
de Camus, Albert
Gallimard / Essais
ISBN : 9782070323029 ; 9,20 € ; 02/05/1985 ; 382 p. ; Poche
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Révoltes et révolutions
Critique de CC.RIDER (, Inscrit le 31 octobre 2005, 66 ans) - 29 septembre 2024
« L’homme révolté » est un essai de philosophie politique de très haut niveau et pourtant relativement facile à lire car l’auteur présente les faits avec une grande clarté et une certaine simplicité, mais sans tomber dans la vulgarisation. Il en appelle à de nombreux exemples, autant de l’histoire ancienne que récente. Ainsi présente-t-il le marquis de Sade comme le premier théoricien de la révolte absolue. « Dans les chaînes, l’intelligence perd en lucidité ce qu’elle gagne en fureur. Sade n’a qu’une logique, celle des sentiments », écrit-il. Après ce précurseur, Camus en appelle à de nombreux autres comme Saint-Just, Dostoïevski, Nietzsche, Bakounine, Marx ou Hegel, pour ne citer que les principaux. Avec Lautréamont, Breton et quelques autres, il en vient même à la révolte des écrivains, des poètes, des musiciens ou des peintres dans un chapitre sur l’art contemporain (comptant pour rien), peut-être le summum de l’ouvrage. Datant de la moitié de l’autre siècle (1951), cet essai est donc tributaire de l’actualité politique de son époque avec une URSS menaçante et des Etats-Unis encore sur la défensive. Mais le discours reste exact et semble même presque optimiste aujourd’hui. Qu’aurait dit Camus s’il avait pu analyser l’incroyable fusion du capitalisme avec le communisme et le nazisme dont nous sommes aujourd’hui témoins et victimes ? Ce néo-totalitarisme soft et hyper technologique lui aurait-il même permis de pousser ce cri qu’il faut absolument lire ou relire pour mieux comprendre la problématique de la révolte ?
Une typologie des révoltes et colères
Critique de Veneziano (Paris, Inscrit le 4 mai 2005, 47 ans) - 24 juillet 2018
Cet ouvrage relève donc de la philosophie, bien qu'une bonne part de ses matériaux empiriques s'avèrent de nature littéraire. Il permet de prendre du recul sur un phénomène et d'en apprendre beaucoup par de brillantes mises en perspectives. Il nécessite d'être médité pour être pleinement apprécié. Ca ne se lit pas "comme un roman".
Nécessaire.
Critique de Ayat (, Inscrit le 4 novembre 2009, 46 ans) - 26 décembre 2009
Un document...
Critique de MOPP (, Inscrit le 20 mars 2005, 88 ans) - 13 février 2008
Certes le contexte a évolué, mais "le choc des civilisations" est-il à l'ordre du jour ?
Pour être plus précis, faut-il craindre un affrontement entre la civilisation judéo-chrétienne et la civilisation musulmane ?
J'avance une phrase de Camus (page 35) :
"La révolte est le fait de l'homme informé, qui possède la conscience de ses droits".
A C-S semble retenir les valeurs de base de "notre" civilisation (amour, droits de l'homme, ...) pour une civilisation utopique au niveau mondial, mais retient-il l'aspect "homme révolté" ancré au sein de "x" civilisations ?
J'apprécie Camus lorsqu'il écrit : (page 36) "L'homme révolté est l'homme situé avant ou après le sacré et appliqué à revendiquer un ordre humain où toutes les réponses soient humaines , c'est-à-dire raisonnablement formulées."
Et "la la pensée révoltée ne peut pas se passer de mémoire ", comme nous ne pouvons pas, non plus oublier "nos" valeurs à transmettre (respect de la femme, par exemple).
Je ne vois pas non plus Albert Camus comme un nihiliste mais plutôt comme un homme qui pointe le point vers les problèmes à résoudre, non pas en notre âme et conscience, mais bien, avec raison.
A lire ou relire.
Leçon d'espoir
Critique de Bételgeuse (, Inscrite le 7 décembre 2007, 46 ans) - 7 décembre 2007
Un testament d'humanité
Critique de FightingIntellectual (Montréal, Inscrit le 12 mars 2004, 42 ans) - 14 juin 2006
Le caractère de la révolte aura toujours eu comme geste moteur de se lever dans l'adversité et d'instiguer un nivellement dans les libertés de l'individu. Sans vouloir s'arroger la liberté absolue par l'acte du meurtre, elle est avant tout recherche de cohésion, avec un monde immanent, donc rejette quelconque injustice faite dans un nom divin.
Oui cet ouvrage aborde le nihilisme, mais écorchez moi si je me trompe, mais Camus lui.. a des tendances humanistes dans ses réflexions.
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