Lautremer, Tome 1 : La Société Socrate
de Yves Leclercq (Scénario), Stéphane Heurteau (Scénario et dessin)

critiqué par Shelton, le 23 avril 2008
(Chalon-sur-Saône - 68 ans)


La note:  étoiles
Très beau !
Merveille ! Divine surprise ! Eblouissement après un matin brumeux, soleil après la tempête, nous voilà en présence d’un très bel album… Heureux êtes-vous si vous vous retrouvez avec cet ouvrage dans les mains. On ne partagera pas nécessairement mon point de vue, mais les premiers à qui j’ai donné cette bédé à lire partagent mon avis, alors élargissons le cercle des lecteurs…
En lisant les deux premières pages j’avais en tête une complainte musicale chantée par Tri Yann : « Sur la lande déserte, une femme fredonne, elle chante pour elle et son enfant… Je connais ton père petit bonhomme, il vit très loin d’ici. Un soir de tempête, il est entré,… »
Oui, cela peut vous sembler particulier, mais… Marcia a bien été abandonnée sur une lande, un soir de tempête… « L’homme était venu sur un bateau… La Dulcibella »…
Marcia n’a, dès le moment où on lui révèle tout ça, plus qu’un seul objectif, retrouver son père, comprendre pourquoi elle a été abandonnée…
Pour cela, elle doit commencer par retrouver le bateau, c’est son seul indice avec un sac de vieilles pièces de monnaie…
Un bon début de série avec une héroïne qui recherche ses origines, une société secrète qui, dans l’ombre, cherche à profiter des ses découvertes… mais dont le lecteur ignore tout ! Et, enfin, il y a la mer, avec son infini, son horizon lointain, son caractère imprévisible, ses dangers, ses mystères qui font dire à Socrate : « Il y a trois sortes d’hommes : les vivants, les morts et ceux qui vont sur l’eau ».
Comme il s’agit d’un premier tome, il est délicat d’en dire beaucoup plus sur le scénario, mais pour ce qui est de la narration graphique on retrouve dans cet ouvrage deux choses capitales : la qualité du scénario d’Yves Leclercq et la douceur et l’émotion du dessin de Stéphane Heurteau que j’avais tant aimé dans ce chef d’œuvre « Itinérêve d’un gentilhomme d’infortune » (trois volumes aux Editions Le cycliste). Tout y est magnifique comme les couleurs, fruit du travail de Stéphane, qui participent pleinement à la narration. Les bordures des pages peuvent passer du blanc au noir, en fonction du moment du récit, voir même disparaître quand Marcia est plongée dans le journal de bord d’Aleister Crowley…
L’ensemble est d’une grande beauté, teintée d’une belle poésie serais-je tenté de dire même si certains pensent que c’est impossible pour une bande dessinée de se positionner entre le récit de mer, la quête des origines, la poésie… Pourtant ! ça fonctionne…
Nous n’avons plus qu’à attendre la suite pour avoir la confirmation de la finesse narrative de ce duo d’auteurs. Série pour un large public qui devrait satisfaire hommes et femmes, jeunes et moins jeunes, lecteurs habituels de bédés et lecteurs plus accidentels, voir même qui pourrait donner envie de lire de la bédé à des débutants (quel que soit leur âge)…