La cantatrice avariée de Pierre Jourde
Catégorie(s) : Littérature => Francophone
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Débordements de la fiction
Pierre Jourde ne manque pas de cran. Le nouveau roman qu’il nous propose, encore une fois, se démarque ostensiblement de ses textes précédents – du moins, de ceux que j’ai lus – au risque de dérouter le lecteur. Heureusement, il arrive qu’il aime ça, le lecteur : être dérouté. Oui : il arrive que le lecteur aime ne pas reconnaître au premier coup d’œil l’auteur qu’il a déjà lu et apprécié. Qu’on en juge : La cantatrice avariée retrace le destin singulier de deux petits voyous aux intelligences limitées qu’un apparent hasard place à la tête d’une secte à la dérive, l’Ordre des frères du Dernier Jour, dont les membres en nombre décroissant squattent un château à l’abandon aux environs de Clermont-Ferrand. Mystérieusement décapitée de son officiel gourou, la secte part à la dérive, perd ses ouailles. Bada et Bolo, nos deux héros, improbables hybrides entre les Pieds Nickelés, le Vampire de Düsseldorf et Bouvard et Pécuchet, entreprennent d’enrayer cette débandade, par des méthodes toutes personnelles et souvent benoîtement sanglantes. Ce n’est que le début de leurs macabres et picaresques aventures. Car c’est tout un long destin, mystique et dérisoire, cousu de coïncidences douteuses et de rebondissements abracadabrants, malicieusement mené par un dément démiurge, chef probable de l’orchestre sanguinaire qui accompagne tout le récit dans l’esprit perturbé de Bolo, où domine la voix de l’increvable mère de Bada, cantatrice intitulaire et tutélaire – le roman s’articule en mouvements in-ouïs, sauf peut-être par Erik Satie : Allegro feroce, Adagio con fagioli, Andante gluante – que leur a concocté l’auteur avec amour, si pris lui-même dans son élan qu’il lui arrive, m’a-t-il semblé, mais c’est sans grande importance, de s’emmêler dans ses personnages. On ne peut pas lui en vouloir, à l’auteur, de voir double ; il le fait dire lui-même à ses personnages : il a abusé du muscat – on aurait volontiers pensé à quelque plus stimulant psychotrope. Car lui-même en est un – personnage –, finalement ; et le lecteur aussi, pourquoi pas. Et ce débordement de la fiction, oui, ça fait plaisir.
Les éditions
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La cantatrice avariée [Texte imprimé], roman avec accompagnement d'orchestre Pierre Jourde
de Jourde, Pierre
l'Esprit des péninsules
ISBN : 9782353150359 ; 20,20 € ; 10/04/2008 ; 260 p. ; Broché
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Les critiques éclairs (8)
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Trop c'est trop
Critique de Sahkti (Genève, Inscrite le 17 avril 2004, 50 ans) - 30 septembre 2011
Le thème de cette troupe de rigolos ne m'intéresse déjà pas de prime abord, donc ça n'arrange pas vraiment les choses, d'accord, mais une fois encore, j'ai trouvé que Jourde en faisait des tonnes, employait des pirouettes de plus en plus faciles pour perdre le lecteur sur des chemins soit-disant non-balisés. Je n'ai rien contre le fait d'être baladée au fil des pages, de rebondir de surprise en surprise, d'errer au milieu d'éléments originaux, mais trop c'est trop.
J'ai du mal à trouver des qualités à l'écriture de Jourde lorsqu'il en fait ainsi beaucoup trop pour absolument capter l'attention du lecteur. Dommage car sa plume peut être pleine de verve et d'efficacité lorsqu'elle se drape d'un peu plus de sobriété. Je préfère le Jourde caustique au Jourde humoriste, le Jourde inventif au Jourde répétitif.
Tout n'est pas à jeter, il y a quelques passages dans lesquels il déploie malgré tout son talent mais ceux-ci sont trop peu nombreux à mon goût pour compenser ma déception, une de plus avec lui, hélas.
Récit franchement dégueulasse et d'une incommensurable platitude
Critique de Dirlandaise (Québec, Inscrite le 28 août 2004, 69 ans) - 19 août 2011
Pour ma part, j'accorde quelques morceaux d'étoiles pour le vocabulaire encore que les mots soient dégoûtants pour la majorité et pour le style qui est tout de même acceptable sinon plus mais tout le reste est à jeter à la poubelle à mon avis tellement c'est répugnant et malsain. Vague tentative d'explication de ce fouillis à la fin qui ne m'a nullement convaincue et qui n'excuse en rien cet alignement de descriptions grotesques et répugnantes. Ce récit est tordu et franchement dégueulasse. Quelques traits d'humour m'ont tout de même fait sourire mais si peu... Navrant !
Et je reste avec un fond d'amertume envers CL de m'avoir mise en contact avec une telle daube ! Je n'en avais vraiment pas besoin !
Étonnement nauséeux
Critique de Isad (, Inscrite le 3 avril 2011, - ans) - 3 juin 2011
On apprend certes quelques mots nouveaux (buron) car l’auteur est cultivé, et quelques passages sont poétiques mais, dans l’ensemble, je n’ai pris aucun plaisir à lire ce livre absurde. ... Et je n’ai donc pas du tout compris l’humour, s’il y en avait !
IF-0611-3735
Objet littéraire non identifié
Critique de Koudoux (SART, Inscrite le 3 septembre 2009, 60 ans) - 10 mars 2011
Cependant certaines descriptions risquent de déplaire aux âmes sensibles.
Roman déroutant avec des passages un peu lourds et d'autres captivants.
Comme dit Tistou : mi-chèvre mi-chou!
« Comment bien déchoir ? »
Critique de Débézed (Besançon, Inscrit le 10 février 2008, 77 ans) - 17 février 2011
Bolo et Bada, ou Bada et Bolo, Castor et Pollux picaresques de ce récit mythologique, de cette saga auvergnate, de cette quête d’un Graal protéiforme et mystérieux, dans un pays vidé de sa population et des ses activités par des autoroutes qui drainent la campagne comme des canaux assèchent un marais, sont les derniers maîtres d’une secte décadente qui cherche sa survie en une quête pitoyable et lamentable. Et, dans cette saga, la cantatrice, sorte de Gê, incontournable terre-mère de toutes les mythologies, renait à chaque fois de ses cendres pour redonner un nouvel espoir ou peut-être pour faire peser un nouveau fardeau sur les épaules des héros avachis, épuisés par leur déchéance et leur interminable recherche. Car cette mythologie n’annonce qu’un monde sans espoir, dégénéré et décadent qui devra peut-être, comme Jean Genet en son temps, aller jusqu’au bout de la déchéance et se vautrer dans la fange pour espérer entrevoir, un jour, la rédemption. « Lorsque je serai bien déchu, se disait-il, mais vraiment à la fin de moi-même, lorsqu’il ne restera plus rien à perdre, et par conséquent plus rien à sauver, je la retrouverai. »
Cette mythologie n’est peut-être qu’une parabole de la décadence de notre société qui n’a pas su comprendre les changements auxquels elle était confrontée et qui a laissé la déchéance s’installer dans le paysage, dans les villes, dans la société, dans les esprits et dans les âmes. « Ils voyaient les simulacres se démultiplier à une cadence infernale, les autoroutes s’additionner aux centres commerciaux, les ZUP engendrer les ZAC, les parcs de loisirs jouxter les parkings. » Bolo et Bada petits loubards devenus maitres d’une secte qui n’est peut-être que le résidu d’une communauté comme il en fleurissait un peu partout après le grand rêve « soixanthuitard », n’ont plus leur place dans cette société qu’ils n’arrivent plus pénétrer même par la violence la plus aveugle et la plus sadique.
Et, dans ce récit burlesque et absurde, Jourde laisse gambader sa plume avec une allégresse sautillante et sanguinaire dans un monde chaotique où toute cohérence a disparu. Il laisse totale liberté à sa créativité, à son goût de l’innovation, à sa recherche de la formule au risque parfois d’en laisser filer de pas très heureuses : ses « appendices phalangées » ne sont tout de même pas très loin des « commodités de la conversation » des Précieuses ridicules ». Mais, nous lui pardonnerons ces quelques écarts car ils nous laissent certains passages assez hilarants comme : « Votre Manfred von Fanffula se fait appeler à l’heure actuelle Raymond Cassagnol, et il est crooner monégasque dans un casino de Caracas pour pédérastes californiens. » ou « … à l’heure où les chalutiers rentrent de la pêche au saint-nectaire. » La seule vraie divergence que je pourrais entretenir avec son texte, c’est, à mon sens, la façon dont il privilégie le mot et la formule par rapport à la phrase, à son rythme et à sa musique. Mais, ce n’est là que question de goût, et de toute façon, nous ne sommes que « des personnages dans les histoires que le Très-Haut se raconte pour tromper l’ennui de l’éternité. »
Un bal savamment orchestré
Critique de Sissi (Besançon, Inscrite le 29 novembre 2010, 54 ans) - 3 février 2011
On ne sait pas trop où on va, c'est vrai, mais on va quelque part.
C'est déroutant parfois dérangeant, cruel et drôle.
Le grand chef d'orchestre, c'est l'auteur bien sûr. C'est lui qui mène le grand bal, qui décide d'accélérer le tempo car il a un rendez-vous chez le dentiste, et qui décide, à un moment donné, qu'il n'y a plus rien à raconter.
C'est presque dommage, je m'étais un peu attachée à ces deux nigauds crétins, à la mère de Bada, inexorablement "là", et à ce monde étrange et incompréhensible pour qui est doté de raison.
La cantatrice avariée la lectrice a aimé.
Roman avec accompagnement d’orchestre
Critique de Tistou (, Inscrit le 10 mai 2004, 68 ans) - 2 janvier 2011
Quelle différence entre le Pierre Jourde de « Pays perdu », au cœur du pays profond, la France, de ses paysans, de la famille, véritablement enraciné, et celui de « La cantatrice avariée ».
La première chose qui me vienne en tête, c’est « quel dommage qu’il n’ait pas une histoire autour de laquelle écrire ». La plume de Pierre Jourde est conséquente, aucun doute là-dessus mais … cette « cantatrice … » ? L’impression que Pierre Jourde sait écrire mais qu’il n’a rien à écrire.
Il a du style.
« Bolo et Bada voyaient moins qu’ils ne se sentaient vus du fond de ces objets paradoxaux qu’on ne pouvait pas examiner sans s’y perdre. Certains d’entre eux ménageaient des entrées, de petites portes vertes (pas exactement vertes au sens scientifique du terme, mais l’objet était construit de telle sorte qu’on savait bien qu’il ne pouvait s’agir que d’une petite porte verte) ou de simples fêlures. On s’y glissait, tiré par l’œil. L’objet pouvait vous loger tout entier, et une fois qu’on y était, il se retournait comme un gant, et vous avec. On sortait à l’envers. »
Il n’y a pas de fond à proprement parler. Ce n’est même pas une allégorie – ou alors je serais passé à côté – c’est une non-histoire. Le démarrage peut passer pour poétique dans cette dérive bizarroïde de deux petits malfrats aux commandes d’une secte délirante dans les environs de Clermont-Ferrand. Le problème, c’est que plus on avance et moins ça tient debout. Ca reste très bien écrit. Mais qu’est-ce qui est écrit ? A-t-on besoin du marteau-pilon le plus sophistiqué pour casser une noix ? Moi je préfère prendre une pierre !
Dommage de voir tant de qualités littéraires perdues là. Je me prends à rêver à ce qu’il pourrait nous écrire avec un fond d’histoire telle que celles de Russell Banks, par exemple …
Alors 2,5*, c'est mi chèvre-mi chou. L'écartèlement total du style brillant et du fond inexistant.
Une cantatrice [un peu trop] avariée...
Critique de Le Cerveau-Lent (, Inscrit le 4 avril 2010, 31 ans) - 28 avril 2010
En voyant ce titre, je me suis tout de suite dit que ce livre révélait un auteur spécial, au style unique, alliant le loufoque et le burlesque. je ne me suis pas trompé...
Malheureusement, l'ennui arrive vite [trop vite même], et c'est dommage, car cela s'annonçait assez jouissif...
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