Les ombres du levant
de Olivier Delorme

critiqué par Spiderman, le 15 juin 2008
( - 62 ans)


La note:  étoiles
Autofiction biographique ou autobiographie-fiction ?
Etre le premier à écrire un essai de critique du premier roman d'un auteur que l'on a découvert dans ses dernières productions n'est pas un exercice facile. Ce roman est épuisé, mais il n'en mérite pas moins l'intérêt et le respect d'un lecteur qui a été séduit par « La quatrième révélation » et bouleversé par « L'or d'Alexandre ».
Avec l'historien qui écrit l'histoire comme illusion de cohérence inventée a posteriori à partir d'une succession incohérente de faits aléatoires, il sera ici impossible d'aborder « Les ombres du Levant » sans un regard « révélé » ou « orifié »(cf titres susnommés).
Sur une île grecque, un vieil homme fait le bilan de sa vie sur différents fronts : militaires, diplomatiques et sentimentaux. Ce n'est pas un héros mais un combattant de la demi-ombre qui a défendu ses valeurs de liberté durant la deuxième guerre mondiale au Liban, au Proche Orient, à Paris, à Vichy ... et dans des eaux plus ou moins troubles.
L'historien guide le romancier sur des scènes assez inhabituelles qu'il a longuement étudiées et souvent fréquentées : le début de la guerre civile grecque est ici présenté par un helléniste pour qui l'histoire de la Grèce ne s'arrête pas avec la conquête romaine.
Alexandre Granier d'Hautefort mêle les styles (journal, récit, correspondance) pour nous faire traverser ses combats. On croise même le grand Charles qui est un des personnages (secondaires !) du roman écrit par celui qui fut sept ans directeur des études et recherches de l'Institut Charles-de-Gaulle.
Le narrateur a construit son identité sexuelle à partir du constat de son attrait physique et sentimental pour les hommes. Sans exubérance ni dissimulation, il va partager la vie de quelques garçons avec plus ou moins de plaisirs, d'illusion et de bonheurs.
« Les ombres du levant » est un roman qui se lit en douceur, sans le suspense que donne aujourd'hui Olivier Delorme à ses oeuvres (polars ? thrillers ?). Pourtant toute la force narratrice de l'écrivain est ici présente : une plume harmonieuse, soucieuse du détail et de légèreté, la méticulosité de celui qui, tout en refusant le roman historique, inscrit ses personnages dans un contexte historique rigoureusement étudié.
On y décèle déjà cette assurance dans la défense des libertés, cette opposition à toutes les formes d'exclusion, dont l'homophobie, qui utilise les armes les plus variées : humour, dérision, auto-dérision, et attaque frontale avec ou sans « clés » littéraires et allusions à l'actualité politique.
Ce livre est une vraie mine d'émotions humaines, de destins croisés et d'histoires dans l'Histoire, c'est aussi et surtout le journal d'un hédoniste qui confronte ses principes à une réalité ...romanesque