Le club des cancres
de André Dhôtel

critiqué par Christophe H, le 18 juillet 2008
( - 63 ans)


La note:  étoiles
Une leçon de vie
Tandis que d’aucuns révèlent les abîmes de leur chagrin d’écolier, voici que resurgit de la mémoire buissonnière le plaidoyer d’André Dhôtel en l’honneur des cancres. C’est dans un numéro du Mercure de France, daté du 1er mai 1949, que Jean-Claude Pirotte dénicha il y a peu « Le club des cancres ». Ce court récit fut écrit par André Dhôtel à l’automne 1939. On pourrait, du coup, être tenté d’en faire une lecture politique, trouvant dans « la drôle de guerre », cette sorte de quête curieuse d’élèves doués et nonchalants qui, tels de petits soldats, se cherchent une ambition sans mesurer les dangers du monde : « Un gamin est plus dépourvu de ressources que le souriceau, mais il sent dans son cœur des germes de gloire… », apprend-t-on dès la deuxième page. Malgré tout, mieux vaut en rester à l’univers de l’enfance, à l’incitation à la fugue, à l’imprégnation de la nature, toutes choses faisant partie du monde dhôtélien.
En se moquant des règles mathématiques, on pourrait dire que Jean Cacheux, Simonet et Sésostris « font la paire »… Ces trois-là forgent un clan qui a pour double objectif de faire des farces au collège et de s’échapper dans la campagne le jeudi, jour de congés. Les blagues de potaches font surtout rire le directeur qui feint d’ignorer le trouble causé par les cancres pour se régaler d’un peu d’animation, enfin ! Ceux-ci, dans de grands serments, font par exemple ce qu’il faut pour que la cour soit inondée et bientôt traversée de petits rafiots de papier… Mais bientôt, par un détour amusant, les cancres n’auront de cesse que de parfaire leurs résultats scolaires.
« Si révolte il y a, reconnaissons qu’elle est souriante, et toujours tempérée d’une salubre ironie », commente, dans la postface, le poète et romancier Jean-Claude Pirotte. Avec un air innocent, André Dhôtel (1900-1991) révèle cette vive flamme de l’enfance, joyeuse et craintive, audacieuse et inquiète. Les cancres ne sont pas ici de mauvais bougres, mais cherchent à sauvegarder cette meilleure part de jeunesse qui, nez au vent, traverse champs et villages avec une naïve effronterie. L’écriture légère laisse croire à une petit histoire gentillette : c’est en fait un engagement vigoureux pour faire goûter le bonheur vrai des choses simples. Lui-même adepte de l’école buissonnière, André Dhôtel ne fut pas en reste pour cultiver de grands rêves. Bien loin d’être naïfs, ces cancres-là sont évidemment les inventeurs du monde futur. Une leçon de paresse qui ne manque ni de bon sens, ni de panache !