La mémoire des flammes
de Armand Cabasson

critiqué par Micharlemagne, le 25 août 2008
(Bruxelles - 73 ans)


La note:  étoiles
Un roman policier historique ?
Ce genre, roman policier historique est assez à la mode. La collection Grands détectives, chez 10/18, s’en est fait une spécialité. On y trouve des auteurs aussi appréciés qu’Anne Perry, Robert Van Gulick, Patricia Wentworth, …
Pour faire un roman policier historique, il faut trois qualités :
* C’est un roman : il faut donc savoir écrire. Dans « La mémoire des flammes », nous trouvons à la page 6 : « Très vite, il ne put s’empêcher de se découvrir. L’âtre. Le feu. Les flammes, langues dorées qui léchaient l’air, attiraient son regard. Elles semblèrent le reconnaître et désiraient lui montrer quelque chose. Leurs courbes, leur agitation, leur façon de se mêler les unes aux autres ou de se séparer, les interstices noirs qu’elles ménageaient entre elles… » Sans commentaire.
* C’est un policier : il faut donc une intrigue qui tienne le coup. Ici, on devine la solution dès le chapitre VII (Il y en a 45). Et pourtant, je ne suis pas plus intelligent que cela, contrairement à ce que pense ma voisine de palier. Après cela, Cabasson, au prix de quelques contorsions rocambolesques, essaie de nous lancer sur des fausses pistes mais n’arrive qu’à nous faire perdre notre temps. Ne parlons pas de la fin, où l’auteur essaie d’introduire un suspense qui ne tient pas un instant.
* C’est un « historique » : il faut donc – au moins – ne pas se prendre les pieds dans le tapis dès le chapitre II. L’histoire se déroule durant les quelques jours qui précèdent la chute de Paris et se termine après l’entrée des Alliés, donc de fin février à début avril 1814. Nous voyons, dans ce chapitre II, le héros introduit dans un bureau des Tuileries où il rencontre, très secrètement, le prince Joseph, ex-roi d’Espagne, le frère de Napoléon et le prince de Talleyrand. Or, il faut savoir que, si Talleyrand faisait effectivement partie du Conseil de régence, il s’en tenait soigneusement éloigné. De Nogent, Napoléon écrivait le 8 février 1814 à son frère : « Méfiez-vous de cet homme. Je le pratique depuis seize années, j’ai même eu de la faveur pour lui ; mais c’est sûrement le plus grand ennemi de notre maison à présent que la fortune l’abandonne depuis quelque temps. » On voit donc bien mal Joseph et Talleyrand, qui conspirait à ce moment pour placer Louis XVIII sur le trône, confier de concert une mission délicate de haute police à un officier de la ligne versé dans la garde nationale. A partir de ce moment – le chapitre II – le doute s’instille dans l’esprit du lecteur et lui gâchera le plaisir jusqu’à une fin qui se fait attendre.
Un autre « détail » : le héros rencontre au cours de son enquête le docteur Pinel. Celui-ci est connu pour avoir innové dans le traitement de la folie. Mais ici, il tient un discours que Charcot n’aurait pas osé tenir trente ans après et que Freud ne renierait pas…
Faisons nos comptes. Une étoile en moins pour la tenue littéraire. Une étoile en moins pour l’intrigue. Une étoile en moins pour la « vérité » historique. Une étoile en moins pour le cadre psychologique. Ne reste plus grand-chose…