Les pieds lourds
de Guy Louret

critiqué par Christophe H, le 15 septembre 2008
( - 63 ans)


La note:  étoiles
Une jeunesse embourbée
Avoir les pieds bien sur terre alourdit forcément les godillots. A force de patauger dans la fange et la boue de son enfance perdue, ce fils de paysans n’arrive pas à décoller. Dans ce premier roman, Guy Louret, homme de théâtre dans le sud-ouest de la France, reprend ses souvenirs des années Soixante pour conter la galère d’un gamin trop mal dégrossi pour avoir envie de prendre la vie à bras-le-corps. Chez lui, c’est la haine et le dédain qu’on se transmet de génération en génération. Par épisodes, surgissent des scènes épiques de paysannerie avinée, de famille fantasque, de campagne abrutissante. L’adolescent finit par quitter veaux, vaches, famille et camarades de classe pour errer de ville en ville, en lisière des Pyrénées, jeune homme sans avenir ni désir. Seules quelques rencontres passagères semblent donner un peu d’énergie à ce narrateur désabusé, ballotté de-ci, de-là. Il joue les saisonniers en Espagne, les figurants au théâtre, carbure au bourbon, approche les filles pour aussitôt fuir tout aventure sérieuse… La spirale mène aux enfers, mais sans drame, un peu comme une descente inexorable, une chute prévisible, quand on ne parvient plus à mettre un pied devant l’autre.
Les errances du narrateur sont servies par une plume qui nous balade un peu. Il y a aussi dans l’écriture quelque chose de désenchanté, d’effronté, de caricatural et en même temps de burlesque. Si les rôles secondaires de ce road-movie sont bien campés, Guy Louret use de l’outrance pour mieux dénigrer le destin embourbé de son personnage. Juste ce qu’il faut pour partager le dégoût de celui-ci pour l’existence. Allez… Il finira bien par croiser la lumière !