Le deuxième souffle
de José Giovanni

critiqué par Grass, le 18 octobre 2008
(montréal - 47 ans)


La note:  étoiles
Rien de mieux qu'un ex-gangster pour conter la vraie affaire
Le deuxième souffle
Gallimard, 1958, Folio Policier, 280 p.

D’origine corse, Giovanni est né à Paris en 1923 et mort à Lausanne en 2004. Condamné à mort pour délit de grand banditisme, puis libéré après onze années purgées, il a mis à profit sa connaissance de la pègre et des casses dans la littérature. On pourra pas dire qu’il sait pas de quoi il parle. Autant les anciens policiers qui se mettent à la littérature apportent une sérieuse dimension de réalité (par rapport à ceux qui, à défaut d’expérience, auront fait des recherches), un vrai bandit, un criminel qui se met à la littérature (et pas pour écrire un témoignage bidon, mais des romans de qualité), c’est drôlement plus intéressant.

Ainsi, lorsque Giovanni nous raconte l’évasion de Gustave Minda, ci-dessous appelé Gu, on a envie d’y croire. Autant pour le fait qu’il arrive tout juste à temps pour sauver son vieux pote Alban et la belle Manouche d’une agression certaine par deux sous-fifres en mal d’expérience. Gu leur règlera vite leur cas pour se mettre à la recherche de celui qui a donné l’ordre pour cette agression.

Si je continue dans cette voie, je vais me mettre à dire n’importe quoi, parce que le livre, il y a deux semaines que je l’ai lu, et même quand je le lisais, j’étais pas toujours sûr de comprendre tous les liens entre les personnages. Quoi qu’il en soit, on demande à Gu de participer au braquage d’un convoi de lingots d’or. Gu est de la vieille école, et même si, depuis le temps qu’il est en dedans, on fait désormais les choses autrement, la réputation de Gu n’est plus à faire, et c’est avec un certain respect qu’on prononce son nom.

Mais lorsqu’après le braquage, Gu, planqué incognito en attendant le partage du magot, se met à sortir pour aller jouer à la pétanque au parc le plus près, son imprudence le rattrape. Grâce à un malin stratège de l’inspecteur Blot, Gu se fait prendre et donne un nom. Jamais, de toute sa carrière, n’avait-il flanché aussi bêtement. De retour dans les mains de la police, avec les journaux qui clament que le vieux Gu en est rendu à balancer ses collègues, la réputation de Gu en prend un sacré coup. Mais il usera de son expérience afin de se refaire un nom et de prouver qu’il n’a pas flanché.

Même si, comme je l’ai dit plus tôt, ce roman étourdit un peu à grands coups de liens pas toujours faciles à saisir, il n’en reste pas moins que Le Deuxième souffle se lit en un rien de temps, en grande partie grâce à la langue colorée, truffée d’expressions corses et de patois qui n’ont rien à voir avec le français hexagonal auquel on est habitué.

Le deuxième souffle a été porté à l’écran par Alain Corneau, avec Giovanni au scénario, avec entre autres Daniel Auteuil, Monica Bellucci, Jacques Dutronc et Michel Blanc. Sûr que ça doit être bon.
Le meilleur polar de tous les temps 10 étoiles

Quand j'ose dire "le meilleur polar de tous les temps", ça n'engage bien sûr que moi, mais tant pis !

Le deuxième souffle, immortalisé par Melville avec une maestria qu'on parviendra difficilement à égaler, est un anti-roman. Le vieux Gu, truand affligé de repères dépassés, serait presque ridicule avec son code de l'honneur qui date de la cour des miracles: il campe l'image de l'homme qu'il se figure être correcte, mais qui n'est qu'image d'Epinal.

Les personnages sont très forts, chacun est épais, chacun dans sa logique, chacun sur son chemin dont il ne dévie pas parce qu'il ne peut dévier. "Le deuxième souffle" est une tragédie antique écrit dans un style simple, ravageur de simplicité.


Noir de Polars - PARIS - 56 ans - 29 mai 2011


un deuxième souffle qui annonce le dernier 8 étoiles

Gustave Manda s'évade avec deux autres détenus, dont un perdra la vie pendant l'évasion. Peu après, Jacques le Notaire est abattu dans le restaurant de Manouche, amie d'enfance de Gu, celui-ci intervient miraculeusement plus tard dans la soirée quand Manouche se fait racketter par des petit truand. Gu recherché par toutes les polices, dont le commissaire Blot, doit s'embarquer, mais où trouver l'argent? Surtout que la prison l'a bien diminué et le milieu a changé...

J'ai découvert "le deuxième souffle" par le film de Jean-Pierre Melville avec Lino Ventura (Gu) Paul Meurisse (Blot). L'adaptation est fidèle, Melville a diminué les dialogues jouant plus sur les silences et il a supprimé certains personnages pour simplifier l'intrigue. Le film de Melville est mis en scène comme un western, d'ailleurs le roman de Giovanni avec son évasion en train, le braquage et ses règlement de compte est un western et devait être traité comme tel, les acteurs sont tous excellent (Melville était exigeant avec ses acteurs au point d'être un peu tyrannique pour les pousser dans leurs derniers retranchements).

Giovanni a renié le film de Melville (il aimait Lino Ventura, mais pas dans ce rôle, dans son roman Gu n'a pas la carrure d'un truand, mais plutôt celle d'un "employé de banque") et il a travaillé avec Alain Corneau à une nouvelle version/adaptation, en 2007 sort finalement le film avec Daniel Auteuil (plus conforme au Gu de Giovanni) et Michel Blanc (Blot). Autant le dire tout de suite la lecture du roman a fait baisser le film dans mon estime car il s'agit plus d'un remake du film de Melville (bien que Corneau le nie, il y a trop de similitudes) et le casting ne fait pas oublier l'original, pas forcément à jeter mais il ne faut pas voir le film de Melville avant.

L'écriture de Giovanni et son vocabulaire rend réel et accessible au lecteur lambda le vocabulaire des "voyous". Giovanni nous montre des voyous qui ont des principes, des flics qui n'en ont pas et inversement. Un bon livre et des films à voir.

Killeur.extreme - Genève - 43 ans - 7 janvier 2011