Histoire hétérodoxe d'un lit brodé de Lü Tiancheng

Histoire hétérodoxe d'un lit brodé de Lü Tiancheng
( Xiu ta ye shi)

Catégorie(s) : Littérature => Asiatique

Critiqué par Dirlandaise, le 13 novembre 2008 (Québec, Inscrite le 28 août 2004, 69 ans)
La note : 9 étoiles
Visites : 3 844 

Érotisme poétique et raffiné

Ce roman, écrit en 1597 par Lü Tiancheng, un lettré, poète et dramaturge, est un des premiers romans libres Ming écrit en langue vulgaire, inédit en Occident (selon la quatrième de couverture).

Un bachelier nommé Yao Tongxin fin lettré, personnage aux mœurs relâchées, porté sur la bouteille, est un être faible et sans principes. Marié à une demoiselle Wei, celle-ci meurt à peine âgée de vingt-cinq ans. Yao se met alors à fréquenter un petit bachelier répondant au nom de Zhao Dali de douze ans son cadet et assez joli garçon. Le jeune Dali devient très vite le substitut de la femme décédée de Yao. Quelques années plus tard, Yao se remarie avec une belle jeune fille de dix-neuf ans répondant au doux nom de Jinshi. Mais même marié, Yao ne met pas fin à ses relations intimes avec Dali. Mais le jeune homme ne tarde pas à tomber amoureux fou de la belle Jinshi et a du mal à réfréner son désir pour elle. Jinshi éprouve pour lui le même sentiment. Yao, ne tardant pas à se rendre compte de la situation et désirant le bonheur de son épouse, lui offre de passer une nuit d’amour avec le jeune Dali. Le tout se concrétise mais Jinshi réalise que Dali a utilisé une drogue d’amour afin de pouvoir se servir d’elle au maximum sans défaillances. La jeune femme ressort très meurtrie et affaiblie de cette nuit car Dali s’est désaltéré de son liquide vital ce qui en Chine signifie le déclin rapide de la femme mais aussi un regain de force et de vigueur pour celui qui en bénéficie. Se sentant flouée, Jinshi se tourne vers son mari Yao et obtient son aide pour se venger de Dali d’une façon tout à fait odieuse.

Je ne suis pas friande de littérature érotique mais je dois avouer que j’ai beaucoup aimé ma lecture. Jamais je n’ai trouvé cela vulgaire ou choquant. L’écriture est d’une grande qualité et les mots employés sont jolis et poétiques. Les scènes d’amour sont décrites avec force détails mais ne sont pas lassantes ni trop répétitives. Cela ressemble à du théâtre ou à un conte. J’ai beaucoup aimé les illustrations explicites mais jamais choquantes. Au contraire, elles sont raffinées et les visages des amants sont d’une beauté et d’une finesse exquises. Bizarrement, ils ne se regardent presque jamais l'un l'autre mais souvent dans des directions opposées. Il est regrettable qu’aucune explication sur l'origine de ces illustrations ne soit incluse dans l’ouvrage. De nombreuses notes de bas de page sont très intéressantes et instructives sur les mœurs chinoises de l’époque. J’ai appris l’existence d’un instrument utilisé par les femmes chinoises pour se donner du plaisir : la clochette de Birmanie qui fonctionne d’une bien étrange façon. Il s’agit d’une boule d’argent contenant du mercure qui vibre lorsque la boule bouge. Plusieurs très courts poèmes occupent chacun une page entière et sont écrits en caractères chinois suivis de leur traduction française.

Bref, c’est un ouvrage d’un haut intérêt érotique et d’une grande qualité littéraire. Une littérature érotique exquise.

« De l’autre côté de la pièce, le regard du garçon s’attarda sur le lit, cerné d’un lattis de bambou moucheté, au motif du caractère wan, enveloppé d’une moustiquaire de gaze délicate décorée de cent papillons au clair de lune, recouvert d’une natte cantonaise de rotin finement tressé. Jinshi avait pris soin d’y mettre un oreiller pour deux tressé dans le même matériau et des draps de soie légère brodés de fleurettes et embaumant un lourd et entêtant parfum de bois d’aloès. Près de l’oreiller, Dali découvrit une boîte ronde d’époque Song, ornée de deux pivoines gravées dans l’épaisseur du vernis, dorée à l’intérieur et qui recelait une authentique clochette de Birmanie. »

« Bleu de martin-pêcheur, l’oreiller d’après boire
a glissé loin du chef des canards emmêlés.
La courbe du bras fin retient l’ensommeillé,
Reposant en biais sur la poitrine moite. »
(Faire de son bras un oreiller à l’amant)

Connectez vous pour ajouter ce livre dans une liste ou dans votre biblio.

Les éditions

»Enregistrez-vous pour ajouter une édition

Les livres liés

Pas de série ou de livres liés.   Enregistrez-vous pour créer ou modifier une série

Forums: Histoire hétérodoxe d'un lit brodé

Il n'y a pas encore de discussion autour de "Histoire hétérodoxe d'un lit brodé".