Lautremer, tome 2 : L'Héritage
de Yves Leclercq (Scénario), Stéphane Heurteau (Dessin)

critiqué par Shelton, le 3 février 2009
(Chalon-sur-Saône - 68 ans)


La note:  étoiles
De surprise en surprise...
Lorsque j’ai eu le second et dernier tome de cette très belle histoire, j’ai commencé par relire le premier que pourtant je vous avais déjà présenté. Ce n’était pas seulement pour rafraichir ma mémoire défaillante, c’était surtout pour me replonger avec délectation dans l’ambiance merveilleuse de Lautremer ! Oui, Stéphane Heurteau et Yves Leclercq nous offrent là un très beau conte, une histoire d’une grande qualité, une bande dessinée atypique car elle allie l’aventure et la poésie, la cupidité et la tendresse, la mer et la terre…
Si Socrate disait en son temps qu’il y avait trois sortes d’hommes : les vivants, les morts et ceux qui vont sur la mer, dans cette histoire, il y a deux camps, ceux qui veulent aider une certaine Marcia, Erskine par exemple, et ceux qui mettront tout en œuvre pour lui nuire, même si ce n’est pas elle qui est en cause… mais, d’ailleurs, qu’est-ce qui est réellement en jeu ? On dit que la Grande Bretagne ne serait pas une île, qu’il existerait des chemins spéciaux permettant de l’atteindre sans risque et, donc, de l’envahir… Jules César, Charles Quint, Napoléon ont cherché désespérément ces secrets et ont échoué dans leur conquête ! Maintenant, c’est Hitler lui-même qui en profiterait bien… Mais qui détient le secret de Carausius ?
Marcia, après avoir rénové le bateau de son père, la Dulcibella, part en mer et tente de comprendre le carnet sur lequel son père a tout noté… Mais, sur un autre navire, monsieur Carruthers est à sa poursuite… et il ne lui veut pas que du bien !
Marcia va faire la connaissance de son père. Certains diraient de lui : quel fou ! En fait, il est fou, c’est indéniable, mais aussi dangereux et complètement ravagé. Il a crucifié sa femme sur la proue de son bateau, rien que cela… Mais quand un homme est aussi hanté par la quête du pouvoir, il n’appartient plus à l’humanité.
Un nouveau personnage participera à sauver Marcia, son oncle, le frère de sa mère…
Je ne voudrais pas vous en dire beaucoup plus. Ce second volet de l’histoire est plus fantastique que le premier, plus beau aussi car la mort est présente et le drame en tombant sur les personnages leur donne une certaine grandeur…
La narration graphique est d’une qualité extraordinaire, tout simplement. Parfois, elle est dynamique comme une séquence de cinéma d’aventures (je pense là aux planches des pages 17, 22, 31), dans d’autres cas, nous sommes dans la bande dessinée littéraire avec des textes solides et prenants (comme par exemple les pages 10, 11, 14, 15, 36), enfin, la poésie arrive, avec ses silences, ses couleurs (et comment ne pas évoquer les pages 34, 35, 39, 40, 41 et 48).
Le dessin et les couleurs de Stéphane Heurteau sont d’une douceur ou d’une violence époustouflantes selon le cas et ne peuvent en aucun cas laisser indifférent ! De son côté, Yves Leclercq a écrit ici une histoire solide, avec des personnages forts et taillés dans le roc, mais, aussi avec magie, poésie et douceur… Un grand scénario, accompagné d’un graphisme adapté, un duo comme rarement on en trouve en bédé… Cela fait penser, sur le plan graphique, à une histoire que Heurteau avait racontée, seul, aux éditions du Cycliste, Itinérêve d’un gentilhomme d’infortune… une bande dessinée à découvrir, aussi !
Mais, franchement, préparez le plus rapidement possible votre baluchon et embarquez pour Lautremer… Bon voyage !