Il était une fois en France, tome 2 : Le vol noir des Corbeaux
de Fabien Nury (Scénario), Sylvain Vallée (Dessin)

critiqué par Miss teigne, le 24 février 2009
( - 43 ans)


La note:  étoiles
L'argent n'a pas d'odeur
Lorsque nous avons quitté Joseph Joanovici dans le tome 1 de la série "Il était une fois en France" (6 volets annoncés), la Seconde Guerre Mondiale était déclarée et "Monsieur Joseph" venait de conclure un accord avec l’Occupant. Il s’engageait à lui fournir des métaux destinés à l’armement contre rémunération. Alors que le premier tome se composait de nombreux flashes-back et balayait une période qui s’étendait de la jeunesse de Joanovici à l’année 1947, ce deuxième opus se concentre sur les années 1940 à 1942. Un tome palpitant, tout en tensions, où le personnage principal veut d’abord fuir la barbarie nazie puis, contre toute attente, décide de rester en France. Il tente de manœuvrer, plus ou moins habilement, pour ne pas perdre l’empire qu’il a bâti jusque là et pour tirer profit autant qu’il le peut de la vénalité et des ambitions nazies. Mais cette fois, "Monsieur Joseph" n’est plus le chef. Il louvoie, doute, hésite. Les officiers allemands sont menaçants et nullement impressionnés par la réussite et les influences de celui qui ne reste pour eux qu'un "youpin". De fâcheux imprévus surviennent. Depuis longtemps, Joseph n’avait plus eu peur. Aujourd’hui, il tremble pour sa vie et celle de sa famille. Se mêle à la crainte la fureur de se voir contraint de courber l ‘échine. Il porte aussi la honte au front. Son argent et son influence lui permettent peut-être de monnayer son identité mais qu’en est-il pour les quelques milliers de Juifs dont il croise les regards terrifiés, terriblement conscients qu’ils feront peut-être partie des prochains convois à destination des camps de concentration. L’ambiguïté du personnage s’accentue, il balance entre générosité et opportunisme. Le cadrage réalisé par Vallée met bien en évidence l’atmosphère dramatique et oppressante. Une suite remarquable.
"Il doit y avoir un type aux questions juives, qui a décidé de s'acharner sur toi... Tu es convoqué à un contrôle médical, Joseph." 4 étoiles

L'Histoire, bien souvent, se répète de façon navrante, et c'est en fait un peu pareil pour le tome 2 de cette BD consacrée à Paris et à sa "faune" durant la seconde guerre mondiale: en effet, de la province (ou les gens migrent, parmi les explosions de bombes et les châtelains planqués) au quartier de St Ouen et de Passy en passant par le froid QG de la rue Lauriston jusqu'aux établissements de luxe et de détente à la clientèle triée sur le volet, les tableaux de ville se succèdent par quelques phrases et cases bien senties, tout en nous plongeant dans la Collaboration et ses multiples codes et manières qui font la loi dans la capitale.

Une période dégueulasse de diffamation, de délation larvée, de visages fermés, de peur, de harcèlement plus ou moins diffus, de suspicion, sans aucune chance pour les faibles, ou toute improvisation est tuée dans l'oeuf; donnant naissance à une ambiance délétére bien représentée par le pavé des rues de Paris uniquement éclairée la nuit par la faible lueur des réverbères, et ou l'on perçoit surtout que cris et chuchotements. Enfin le graphisme, naif, plus ou moins de style comic, ne fait pas dans la haute précision: le dessinateur brosse rapidement ses portraits afin d'avancer dans les événements. Un ton parfois quelque peu sommaire, toutefois... D'ailleurs la femme de Joanovici, dont le prénom est Eva; est forcée de copuler avec un SS (un Hauptsturmbahnfurher plus précisément) afin de protéger son mari après lui avoir offert, auparavant, un Corot. Glauque.
Toutefois, tout en nous présentant des gens constamment sûrs de leur victoire, les auteurs ont au moins le bon goût de poser les bonnes questions car l'intrigue place le récit en une société totalement gangrenée du haut vers le bas en dépit de ses bourgeois et dignes grosses huiles: Et puis que ferions-nous en pareilles circonstances ? Combien serions-nous réellement à entrer dans la sérénité de la rébellion, à risquer l'isolement et la solitude; à combattre contre plusieurs individus invisibles, tout en prenant le maquis ?



"C'est un cercle vicieux, dont Joano est la victime bien trop consentante..." [...]

"Un monde où Georges Boucheseiche, Adrien Estebeguy et Jo Attia croisent la route d'un certain "docteur", sinistre visiteur du soir, que la nuit amène puis recouvre une fois son sale boulot accompli." [...]

Antihuman - Paris - 41 ans - 24 décembre 2011


Un personnage ambigu 9 étoiles

Une suite à la hauteur du premier tome. Le récit de la vie de Joseph Joanovici permet à la fois de s'immerger dans l'époque de ce Paris occupé mais aussi de suivre les méandres de ce parcours privé, atypique et passionnant. Qu'en est-il de la réalité historique et de la fiction ? Je ne sais pas, mais ce qui est sûr, c'est que la réalisation du scénario est des plus captivantes et que ce deuxième tome ne saurait se passer de la lecture d'une suite.

Oguz77 - - 47 ans - 29 janvier 2010