Bestiaire de Éric Dupont

Bestiaire de Éric Dupont

Catégorie(s) : Littérature => Francophone

Critiqué par Aaro-Benjamin G., le 25 février 2009 (Montréal, Inscrit le 11 décembre 2003, 55 ans)
La note : 7 étoiles
Moyenne des notes : 8 étoiles (basée sur 5 avis)
Cote pondérée : 6 étoiles (15 544ème position).
Visites : 6 754 

Enfants du divorce

Les souvenirs et anecdotes d’enfance deviennent des réflexions drôlement amusantes dans ce bestiaire dont chacun des chapitres est consacré à un animal ou une bestiole quelconque. Je me suis beaucoup identifié au narrateur, car moi aussi j’avais son âge lors des jeux Olympiques de Montréal. J’ai vécu le référendum de 1980 de la même façon - par une guerre de macarons. Et, je me souviens du boycott des produits Cadbury qui trouble tant le jeune junkie de sucre dans cette autobiographie: « Je suis le seul Montréalais pour qui manger une Caramilk est un acte subversif et révolutionnaire. »

Derrière l’humour, se cache néanmoins la souffrance d’un enfant trimbalé, isolé à son école, en quête d’identité et vraisemblablement mal aimé par son père et sa sixième femme. Ces derniers sont d’ailleurs affublés des titres de ‘Henry VIII’ et ‘Anne Boleyn’ pour illustrer leur autorité royale.

Si le premier chapitre est un bijou de dérision et d’ironie qui atteint parfaitement son but de nous introduire à cette famille déracinée, le reste est en quelque sorte une répétition de la même chose, mais en moins mordant et en perdant sa concision pour se vautrer dans d’interminables divagations.

Ce roman, c’est avant tout une musique, un rythme. Un souffle rafraîchissant dans le paysage généralement plat de la littérature québécoise.

Connectez vous pour ajouter ce livre dans une liste ou dans votre biblio.

Les éditions

»Enregistrez-vous pour ajouter une édition

Les livres liés

Pas de série ou de livres liés.   Enregistrez-vous pour créer ou modifier une série

Chronique d'une jeunesse gaspésienne

7 étoiles

Critique de ARL (Montréal, Inscrit le 6 septembre 2014, 39 ans) - 27 septembre 2015

Récit à fortes tendances autobiographiques, "Bestiaire" raconte l'enfance plus ou moins turbulente d'un jeune Éric Dupont grandissant à Matane entre les années 1976 et 1986.

Infortunée victime du boycott de Cadbury et des mesquineries de ses camarades de classe, ce garçon sensible tente de faire son chemin sous le joug d'un père alcoolique et d'une belle-mère autoritaire.

En toute honnêteté, l'histoire d'Eric Dupont ressemble à celle de bien des enfants de cet âge. Ce sont les petits problèmes de la jeunesse que l'auteur met en scène, non pas quelque scénario romanesque et pathétique.

L'intérêt de l'oeuvre se situe surtout dans l'originalité de sa construction (chaque chapitre est dédié à un animal ayant marqué la période couverte), dans l'humour caustique de l'auteur et dans la justesse du portrait qu'il fait de cette décennie importante.

À quelques reprises, l'auteur paraissait se perdre dans des divagations sans doute beaucoup plus intéressantes pour lui que pour le lecteur. C'est souvent mon problème avec les gens qui se racontent. Mais dans l'ensemble "Bestiaire" demeure un bon petit livre, divertissant et bien écrit.

Les Crevettes de Matane

8 étoiles

Critique de Libris québécis (Montréal, Inscrit(e) le 22 novembre 2002, 82 ans) - 18 février 2013

Les yeux pleins d'étincelles, comme Le Chat de Baudelaire, Éric Dupont attend du fond de sa solitude le vent favorable pour échapper à la monotonie gaspésienne. Le jeune héros, élevé par un père indépendantiste étriqué, parviendra-t-il à fuir un milieu qu'il juge inapte à son épanouissement ?

Le héros est l’alter ego malheureux de l’auteur. Enlevé du giron d'une mère cuisinière, il vit sous la férule de la nouvelle reine du cœur de son père, un Henri V111 qui détrône ses partenaires au gré des caprices saisonniers. Entre des amantes interchangeables, ce policier s'est établi à Saint-Ulric, près de Matane, où son fils devient le bouc émissaire des élèves de l’école. Aussi cruels que les marins baudelairiens, qui martyrisent un albatros gisant sur le pont, ses pairs le sacrent chevalier de la confrérie des tapettes (homosexuels) à cause de la sensibilité qu'il éprouve à l'égard de la culture.

Exilé au milieu des huées de compagnons qui sentent le fumier, il les accule au silence en développant sa musculature sur les engins reçus en cadeau de son père. Mais ce dernier lui a appris l'humilité en l'obligeant à élever des poules afin d’entretenir sa filiation paysanne. Ces leçons de vie ne portent pas ombrage à son imaginaire. Il se construit un bestiaire qui le confortera dans son choix de quitter son transit matanien, même si l'ululement du hibou le prévient que « l'homme ivre d'une ombre qui passe porte toujours le châtiment d'avoir voulu changer de place ».

Imprégné de l'univers du conte, le roman précise la destinée des enfants du divorce nés au cours des années 1970. Ils semblent avoir vu le jour sous une bonne étoile comme le laissent supposer l'arrivée au pouvoir du parti souverainiste dirigé par René Lévesque et les exploits de Nadia Comaneci, la reine des jeux Olympiques de Montréal en 1976. C'était le début d'un temps nouveau pour les baby-boomers. Qu'en est-il de leurs rejetons, victimes des ajustements d'une époque transitoire, qui allaient amener les familles reconstituées et transformer les écoles en lieux d'apprentissages transversaux ? Hélas, les paramètres du bonheur transcendent les institutions même les plus laxistes. S'inspirant de la cour d'Angleterre, Éric Dupont démontre que, aujourd'hui comme hier, les enfants sont les sujets du despotisme familial, culturel ou idéologique.

Son roman ne serait qu'une chronique, intéressante certes, mais peu originale, sans l'ampleur poétique que l’auteur lui confère à travers des allégories animales pour soutenir les moments forts de la vie d'un enfant mal aimé. L'auteur le distrait de son inconfort en le consolant avec l’histoire de l’origine des crevettes de Matane. Comme lui, elles sont importées d’ailleurs même si elles font la renommée de son coin de pays. Telles ces crustacés, il faut s’incruster quelque part.

Pas si bête...

8 étoiles

Critique de Jonath.Qc (, Inscrit le 6 juillet 2011, 46 ans) - 17 février 2013

Critique sociale très réussie de la part d'un auteur pourtant assez jeune au moment d'écrire ce Bestiaire (38 ans). Je ne résumerai pas le livre, certains l'ayant déja fait avant moi. Je dirai par contre qu'Éric Dupont dépeint une vision fort originale du Québec des années "fin 1960/début 70, époque très importante de notre histoire. C'est à travers les yeux d'un enfant de 10 ans, disons "rejeté/trimballé", que le récit nous parvient. Le jeune garçon nous relate ses années de misère avec légèreté: brillant, curieux et intelligent il devient la cible de ses pairs à l'école. Il est arraché des bras de sa mère et vivra avec son père, le roi, policier alcoolique aux moeurs douteuses.

La forme est tout aussi intéressante à mon avis. Se basant sur les comportement d'animaux emblématiques des régions où il a vécu cette jeunesse (Bas-St-Laurent et Gaspésie), l'auteur forme un brillant parallèle entre la civilisation humaine et celle de la bête. Sommes-nous tellement plus civilisés avec nos semblables qu'une colonie de volailles dans un poulailler? Voici une question à laquelle Dupont s'attaque.

En résumé, je dois dire que j'ai passé un excellent moment à lire Bestiaire de Éric Dupont. Une écriture fluide, intelligente et subtile à la fois. Sujets intéressants, et personnage principal très attachant, sans tomber dans le piège de l'apitoiement. À conseiller.

Bestiaire de Éric Dupont

8 étoiles

Critique de Micka (, Inscrite le 20 mars 2004, 80 ans) - 13 mai 2009

Résumé : Éric Dupont nous raconte les souvenirs de son enfance. Issus lui et sa sœur d’une famille éclatée. Obligatoirement ils doivent se séparer de leur mère. Éric a alors 6 ans et sa sœur 8 ans lors de la séparation d’avec leur mère. Le père collectionne les épouses comme d’autres des voitures. Toute l’histoire familiale est une longue métaphore. Henri VIII roi d’Angleterre (le père) et sa cour. Micheline Raymond épouse et mère des enfants est écartée du trône, imaginée sous le portrait de Catherine d’Aragon. Succède dans la vie du roi Anne Boleyn (2e femme). Elle règnera 9 ans et aura autorité sur les enfants. Ensuite suivront Jeanne Seymour, Anne de Clèves, etc., etc. La vie à la cour du roi Henri VIII n’était pas le royaume des cieux.
La famille déménagera un grand nombre de fois. Ce qui n’aidera pas à l’intégration et à l’acceptation des enfants dans ces nouveaux milieux. Matane avait le défaut de ne pas être Rivière du Loup endroit que les enfants affectionnaient parce que leur mère y vivait. S’ajoute au fil des ans une série d’édits royaux implacables. Ces enfants souffriront en silence de l’absence de leur mère si gaie et si aimante. En cachette, les deux enfants, seuls sur la plage évoqueront le souvenir de leur mère. Éric dira :"Non je n’ai pas envie d’oublier tendre blessure dessous l’armure. Le doute, la tristesse et la mélancolie étaient solubles dans la rancœur’’.
Aussi longtemps qu’il a vécu à la cour du roi et de la reine, il a redoublé d’efforts en math, et s’appliquait à mieux accomplir les tâches ménagères pour un sourire de la reine.


Points positifs : Livre tout en métaphores écriture d’une grande originalité sur un thème maintes fois décrit : soit la famille éclatée.
Définition de bestiaire : Recueil de fables de textes sur les animaux.
Chaque chapitre est représenté par un timbre d’animal ou d’oiseau. C’est en appliquant le mode de vie de ces bêtes dans sa vie à la cour du roi qui est extraordinaire.

Appréciation globale : Quelle érudition ! Écriture exceptionnelle et originale. C’est par l’humour, l’ironie, le sarcasme, la dérision, qu’Éric Dupont nous décrit l’immense détresse, la grande tristesse de deux enfants en otage dans une famille éclatée. Livre qui émeut. Triste, triste à en mourir. Ce Éric est tellement attachant

Forums: Bestiaire

Il n'y a pas encore de discussion autour de "Bestiaire".