Sodome et Grammaire
de Jean-Pierre Verheggen

critiqué par Kinbote, le 16 avril 2009
(Jumet - 65 ans)


La note:  étoiles
Poèmes pour tourner en dérision la langue et ceux qui la malmènent
Jean-Pierre Verheggen nous propose une trentaine de poèmes à l’oreille, très sonores donc, en vers mais non rimés. Rythmés, oui, par des consonances récurrentes, et les inénarrables jeux de mots de l’écrivain. Poème pour les fêtes de fin d’année, poème en forme de chapeau chinois, poème pour arrêter la frite et les marchands de frites, poème au féminin pluriel, poème pour arrêter la cigarette ou encore, deux parmi mes préférés, grand poème pour Marguerite Durable et poème pour une fois de plus réhabiliter la langue des bois.

Parmi les jeux de mots les plus surprenant, on trouve, pêle-mêle :

En embuscade, à l’orée ! À l’oreille !
À l’orée et Hardy quand je grossis les choses
ou à Laurel et radis quand je rétrécis.
(in Poème presque poème)

des pommes de Tell suisses
(in Poème pour faire de bonnes emplettes en vue d’un bon repas littéraire)

Oui ! méfiez-vous ! Méfiez-vous !
La sigmundialisation vous guette
(in Poème pour bien apprendre à se méfier des rêve)

Je pense à Marguerite Suçasse, une petite gouape ;
qu’il eût phalusse que Maurice Roche connasse
durant sa période vache et fellation !
(in Grand poème pour Marguerite Durable)

Tout fout Lacan comme disait l’autre !
Qu’on en juge ! L’Eglise va mal.
L’Évêché sont bouchés de l’intérieur.
Les curés ne sert à rien.
(in Poème très peu catholique)

Ensuite Verheggen s’en prend aux nouvelles Précieuses… ridicouilles, seulement intéressées par la perte de poids, les régimes amaigrissants… Il adresse une invective sous forme de mise en garde aux « rappeurs camemberts et slameurs pompiers » qui font souvent de la poésie à bon compte.
Enfin, dans « Objections , chers poètes », il chicane quelques grands noms de nos anthologies (Baudelaire, Lafontaine, Breton, Ronsard, Prévert ou Desnos), avec mauvaise foi certes, sur quelques-uns de leurs vers très peu réalistes.
La partie la plus savoureuse, à mon sens, la plus joyeuse aussi.

Verheggen ne ménage pas non plus Verheggen qu’il accuse à la toute fin de jouer au « péremptoire professeur vieux style », menacé d’autisme, un danger qui nous menace tous, dès l’instant où nous avons acquis une certaine maîtrise en quelque domaine que ce soit. Conclusion de pur style, on le sent pour cet amoureux de la langue qui se définit à un moment donné comme un auteur « mélancomique. » À bon entendeur…