Victoire en solitaire
de Éric Tabarly

critiqué par Dirlandaise, le 3 juin 2009
(Québec - 69 ans)


La note:  étoiles
L'incroyable odyssée d'un marin breton
Le 23 mai 1964, à Plymouth en Angleterre, l’enseigne de vaisseau Éric Tabarly prend le départ d’une course en solitaire à travers l’Atlantique à bord de son voilier « Pen Duick II », course qui le mènera vers la victoire après une traversée éprouvante. Il franchit la ligne d’arrivée à Newport avec une bonne longueur d’avance sur le deuxième concurrent et favori, le vétéran Chichester, vainqueur de la traversée de 1960.

Pour Tabarly, il s’agit de sa première Transat en solitaire. Il raconte absolument tout dans ce livre, la construction de « Pen Duick II » spécialement commandé pour cette course, les difficultés monétaires qui ont presque eu raison de son projet, l’entraînement physique qu’il s’est infligé, la difficulté d’être présent sur la ligne de départ à temps, les problèmes de la traversée et tous les petits ennuis quotidiens, ses changements de voiles, ses manœuvres diverses par gros temps et temps calme. Enfin, tout y est expliqué en détail et d’une façon claire et précise.

J’ai trouvé cette lecture tout à fait passionnante. Tabarly n’est pas un poète contrairement à Olivier de Kersauson alors ses écrits reflètent le caractère bien trempé et réaliste de l’homme. C’est clair, concis, précis sans digressions ni étalage de sentiments. Tabarly est un homme d’action, de sang froid, efficace, possédant des nerfs d’acier et un jugement à toute épreuve. Il possède aussi une connaissance remarquable de la navigation. Le texte est truffé de termes techniques alors il faut constamment en référer au glossaire afin de bien comprendre les différentes manœuvres expliquées et aussi bien visualiser ce que Tabarly tente d’expliquer tout au long de son récit. Certains chapitres sont destinés à des experts navigateurs dont celui sur les problèmes de la course et celui où Tabarly décrit la façon dont son voilier a été construit et les caractéristiques de son gréement et de son aménagement intérieur.

C’est tout un exploit que cet homme a accompli d’autant plus qu’il a perdu son système de pilotage automatique au cours du trajet, ce qui l’a obligé à barrer presque tout le temps, l’obligeant à ne dormir que trois à quatre heures par nuit par périodes d'une heure et demie seulement. Et pour comble de malchance, il casse son réveil, indispensable pour lui afin de se réveiller et vérifier le cap de son bateau.

Le livre est extrêmement bien construit et documenté. Il est complet et très instructif. J’ai trouvé la personnalité de Tabarly tout à fait charmante. Il n’est pas prétentieux ni ne joue à la vedette, ce qui le rend très attachant et sympathique. Il consacre même un chapitre de son livre à la présentation des autres concurrents et à décrire leur course, ce que je trouve très généreux de sa part. Un livre excellent pour qui s’intéresse au sujet. De nombreuses photos, dessins et graphiques ajoutent de l’intérêt au volume. Petit bémol : plusieurs termes de marine manquent au glossaire ce que j'ai trouvé très embêtant. Certaines manoeuvres sont très difficiles à comprendre pour des non-initiés, rendant la lecture ardue.

« De deux équipiers de mêmes connaissances et de même expérience, le plus sportif sera le meilleur. La voile, sport complet, réclame chez ses adeptes toutes les qualités du sportif : adresse, rapidité, réflexes, endurance, souplesse et force musculaire. »

« J’ai donc été très occupé, mais — et quelles qu’aient été les difficultés qui s’ajoutaient pour moi aux occupations normales du bord — je puis dire que la course par elle-même n’a pas été une épreuve. Elle correspondait à la vie même que je désirais le plus mener. Et, physiquement aussi bien que moralement, je crois que j’aurais pu tenir encore des jours et des jours après celui de cette arrivée. »