Deux vies
de Vikram Seth

critiqué par Tanneguy, le 8 juin 2009
(Paris - 85 ans)


La note:  étoiles
Chroniques du XXème siècle, Inde, Allemagne, Angleterre
Vikram Seth, auteur indien reconnu, arrive à Londres en 1967 à l'âge de 17 ans pour y poursuivre ses études comme beaucoup de ses compatriotes. Il prendra pension chez son oncle ( un oncle de sa mère qui s'appelle aussi Seth ) pendant plusieurs années avant de prendre son indépendance et de poursuivre des études et une brillante carrière littéraires.

Il développera une profonde affection à l'égard de son oncle Shanti et de sa tante Henny, juive allemande qui a fui l'Allemagne nazie en 1939. A leur mort, en 1988 et 1998, il décide d'écrire leurs deux biographies et s'apercevra qu'il ne connaissait que superficiellement les deux membres de ce couple exceptionnel. Il mènera une enquête approfondie qui passionnera le lecteur en apportant des éléments de compréhension aux grands évènements du siècle, vus par un Indien : la seconde guerre mondiale et l'engagement de troupes indiennes aux côtés des Britanniques, l'accueil des immigrants en Grande Bretagne, la vie quotidienne des Allemands lors de la montée du nazisme, les persécutions, la vie à Berlin après 1945, les petites lâchetés des uns et des autres, etc...

Un récit sensible et authentique qui ne laisse pas indifférent !
Chronique d'une union atypique 7 étoiles

L'an dernier, j'ai trouvé le courage de lire "Un garçon convenable" et j'ai apprécié chaque seconde de lecture de ce chef-d'oeuvre qui s'est tout de suite glissé parmi mes romans préférés. Vikram Seth est un écrivain de génie, cela ne fait aucun doute. Par contre, il ne faut pas espérer retrouver dans "Deux vies" les mêmes qualités littéraires que dans son magistral roman. Pas qu'il soit mal écrit, au contraire. Ce n'est simplement pas le même genre de projet. "Deux vies" est une sorte de document d'archives, une étude méthodique et le plus exhaustive possible de son grand-oncle et de sa grande-tante qui ont vécu, elle comme juive allemande et lui comme soldat, l'affreuse époque de la Seconde Guerre mondiale.

Vikram Seth recopie intégralement une bonne partie de leur correspondance, de l'un à l'autre mais aussi celle qu'ils adressaient à leurs familles et amis. Certaines sections sont des plus intéressantes et brossent un portrait poignant et intime d'une période de grand déchirement; d'autres sont plus pénibles et donnent l'impression que le biographe s'éparpille. J'ai dévoré les deux premières parties, mais le reste m'a donné beaucoup plus de mal. À conseiller surtout aux amateurs d'histoire.

ARL - Montréal - 38 ans - 26 avril 2018


Inde et Allemagne 8 étoiles

Vikhram Seth est un garçon convenable... Convenable et même plus que cela aux yeux de sa famille, en tout cas, et c'est à sa famille qu'il rend hommage dans ce livre, qui relate donc l'histoire d'une amitié de plus de 20 ans, amitié transformée en mariage ,de raison sans doute, mais qui , lui, a duré plus de 30 ans.

En fait, on pourrait même dire qu'il s'agit du récit de trois vies, car Vikhram Seth consacre nombre de pages à raconter pourquoi il s'est intéressé à cette branche de sa famille, son oncle Shanti et sa tante par alliance Henny. Et, ce faisant, comment en fait il est devenu écrivain.

Mais son souhait était de faire revivre par ses mots ces deux personnages dont le trajet ne fut pas si banal. Car Shanti était le dernier né d'une famille indienne, envoyé faire des études de dentisterie à Berlin en 1931. Ne parlant bien entendu pas un mot d'allemand...
" Quand le train est arrivé à Charlottenburg, des gens sont descendus. J'ai demandé à un monsieur : " Bitte, Berlin?" Il a répondu:"Ja, ja". J'ai demandé:"Bitte, Charlottenburg?" et il a dit: "Ja, ja". Je ne comprenais pas comment un endroit pouvait être à la fois Charlottenburg et Berlin, j'ai pensé que j'avais à faire à un peuple de fous....."
Et c'est en cherchant une chambre meublée qu'il va faire la connaissance d'une famille allemande et juive, les Caro, dont la dernière fille , Hennie, avait quand même demandé à sa mère de ne pas prendre le "noir" comme locataire...
Et voilà le destin - et le coeur du récit de Vikhram Seth- lancés.

Ce n'est qu'en 1951 que Shanti et Hennie se marient. Entre-temps, il a perdu son bras droit à Monte Cassino et a dû , pour survivre, apprendre à donner des soins dentaires avec son seul bras gauche.
Hennie a réussi à fuir en Angleterre en 39. Hélas, ni sa mère, ni sa soeur ,qui seront déportées. La mère meurt rapidement de maladie, sa soeur Lola est gazée.
Les chapitres les plus intéressants sur le plan historique sont d'ailleurs les récits ( d'après des lettres échangées entre Hennie et ses anciennes amies qui ont survécu parce que non juives) des règlements de comptes après guerre entre compatriotes allemands, résistants ou pseudo-résistants ou ayant franchement collaboré au régime nazi.

C'est un livre que je déconseillerais à ceux qui n'ont pas le goût des chroniques familiales, des livres de souvenirs ( avec documents joints, et photos). Moi, j'ai beaucoup aimé cette histoire d'une part, et d'autre part les tergiversations de l'auteur au fil des pages, qui sembleront sans doute ennuyeuses à certains , sur le pourquoi- comment-quand- la raconter.

Paofaia - Moorea - - ans - 25 décembre 2013