Chroniques du lézard
de Maya Ombasic

critiqué par Calepin, le 31 juillet 2009
(Québec - 43 ans)


La note:  étoiles
Regard sur Cuba et sa mer
4e de couverture : Une jeune femme est envahie par les façades délabrées de la Havane mouillées par les eaux du Malecón. Une veuve qui laisse sa maison s'empoussiérer apprend que son fils a été avalé par la mer d'émeraude. Un vieillard habite une centrale nucléaire désaffectée. Dans ce livre, on découvre Cuba comme un parc jurassique de la révolution, comme un éden social qui se transforme en enfer, comme une île enceinte d'une eau bleue sillonnée de pétroliers. Mais surtout, comme un lieu magique, où, désinvolte, il est possible de connaître l'amour.

Mon avis : Premier livre pour cette auteure au parcours de globe-trotter qui, pendant un séjour prolongé à Cuba, nous offre ce recueil de quelques nouvelles (7) trempées d’exotisme. D’entrée de jeu, une lecture d’été sans se casser la tête, avec une écriture simple et quelques belles trouvailles. Malheureusement, la narration présente quelques lacunes : certaines phrases qui auraient pu être mieux tournées, des sentiments qui sont décrits au lieu d’êtres vécus et quelques dialogues auraient pu être retravaillés. Rien de dramatique, heureusement.

La mer est présente à peu près dans toutes les nouvelles et prend une couleur légèrement différente que j’aurais aimé voir approfondie, histoire qu’elle se démarque davantage. J’ai par contre beaucoup aimé sa présence dans La mer, cet immonde cimetière ou celle-ci endosse une nature dangereusement séductrice ou dans Les échos de Yemaya, en devenant une déesse qu’il faut apaiser.
Âme cubaine 6 étoiles

Maya Ombasic, une Québécoise d’origine yougoslave, établit le modus vivendi des Cubains à travers sept chroniques qui soulignent les chamboulements survenus sur leur île au cœur du temps. De la colonisation espagnole à la révolution castratrice et castriste, ils ont dû métisser leur âme avec toutes les cultures. Que ce soient des dieux indiens ou de Yémaya, la déesse africaine de la mer, ils ont imploré leur protection pour se défendre contre une immensité pélagique qui, bon an mal an, prélève son tribut en pertes humaines parmi les fuyards de l’île.

Pour ne pas provoquer inutilement la gardienne naturelle de leur frontière, les Cubains ont marié leur état d’âme aux situations déchirantes de leur Histoire. Ils ont ainsi développé une résilience qui atténue la douleur des blessures existentielles. Cette œuvre n’est pas le fruit du désespoir parce qu’elle est ouverte sur autrui. Pas une ouverture qui laisse entrer les touristes en mal d’expériences douteuses. Une ouverture qui les soude à leur arbre de vie. Se reconnaître avant d’aller vers l’autre. Tous les personnages de ces récits se cherchent donc une voie qui les conduira à bon port malgré le trident de Poséidon.

La quête d’identité et de filiations s'entremêle aux agressions qui privent l’âme cubaine de s’y accrocher. Les Chroniques du lézard renoue avec la mythologie de la mer. Seul le choix du saurien change pour aborder la thématique de l’onirisme, qui sonde les abysses de ces insulaires dans un crescendo lyrique empruntant sa force aux déferlantes. Bref, c’est bien, mais, du lecteur, ça n’apaise pas la faim.

Libris québécis - Montréal - 82 ans - 4 octobre 2013