Maman Jeanne
de Daniel Charneux

critiqué par Ddh, le 17 août 2009
(Mouscron - 83 ans)


La note:  étoiles
On a tous connu des mamans Jeanne et c'est bon de s'en souvenir
Le terme « maman » se suffit normalement sans devoir ajouter un prénom. Mais ici, il a toute sa signification car si Jeanne est maman, elle ne peut revendiquer véritablement cette appellation puisqu’à contrecœur, elle ne peut assumer l’éducation de ses enfants.
Daniel Charneux nous propose ici son cinquième roman. Comme les précédents, il est empreint de beaucoup d’humanité. Ici, l’auteur remonte le temps et conduit le lecteur dans la première partie du XXème siècle chez une femme humble, courageuse, soumise, victime du qu’en-dira-t-on et d’une société « bien pensante » mais qui ignore le sens de la justice sociale.
Le narrateur rencontre Jeanne au home psychiatrique à Geel. Elle lui révèle ce qu’a été sa vie. Le mot « vie » lui fait peur. Elle a donné la vie à quatre enfants mais quelle vie a-t-elle menée ? Une vie de sacrifices, de soumission. Soumise à son père qui lui impose un mari plus âgé de dix ans, soumise à celui-ci, un bouilleur de cru alcoolique. Rapidement veuve, elle entre en service chez un curé qui l’engrosse. Jeanne croit en l’amour, Marie et la grâce qu’elle marmonne, répète inlassablement dans sa folie. Et la « vie » qui se poursuit au gré de ses placements chez des bourgeois qui profitent d’elle.
Désespérance ? Pas vraiment mais peinture réaliste d’une société aux mœurs qui avaient cours à cette époque, loin de la charité prônée dans les sermons mais non pratiquée dans les faits.
Toujours beaucoup de poésie dans les écrits de Daniel Charneux.
Le découpage ne manque pas d’originalité. Les caractères en italique font référence à ce que visualise le narrateur tandis que le reste du récit fait cheminer le lecteur dans la vie de Jeanne.
Ce roman est proche du lecteur car chacun a connu des personnes telles que Jeanne. C’est un atout en plus pour lire sans retard Maman Jeanne.
Des écueils de la vie 9 étoiles

J'ai beaucoup aimé "Maman Jeanne" de Daniel Charneux, ce pour diverses raisons.
Avant toute chose, il m'a rappelé nombre d'histoires situées plutôt au XIXème siècle, dont je me suis délectée au cours de ces dernières années de lecture. Des vies de femmes misérables, qui ne comptaient pour personne, humiliées, ignorées et maltraitées. J'ai retrouvé beaucoup de points communs avec cette lecture.
Ensuite, la façon, la construction de ce livre est inhabituelle. Le narrateur observe et écoute Jeanne, sur la fin de sa vie, plutôt apaisée par un environnement moins hostile qu'elle a pu connaître. Elle se livre enfin et déverse ce qui lui pesait sur le coeur. Le sentiment de culpabilité de cette pauvre femme aura ravagé sa vie. Le peu de chance aussi, de mauvaises rencontres et des situations dramatiques.
Enfin l'écriture ! Très sensible, un regard empli d'humanité, une jolie prose, j'aurais aimé ce livre plus long rien que pour écouter encore Jeanne s'épancher.

Alors, pendant que j'étais chez les soeurs, j'ai cherché une famille pour le garder, mon petit. J'ai écrit à Fémie, une amie que j'avais au village voisin, oui, je lui ai demandé si elle connaissait quelqu'un qui voudrait bien reprendre mon petit pour vingt francs par mois. J'irais en service, je travaillerais pour payer sa pension.

Il en est encore, aujourd'hui, des "Maman Jeanne", des filles un peu naïves qui doivent subir plutôt que choisir, ce thème est hélas universel, et le nier serait se voiler la face. L'auteur livre ici un beau témoignage, sans aucune dureté, sans jugement, avec beaucoup de délicatesse et d'empathie.

Nathafi - SAINT-SOUPLET - 57 ans - 30 octobre 2016


Si triste, si triste ... 9 étoiles

Il est comme ça, des gens qui n’ont pas eu de vie. Ou s’ils en ont eu, leur vie est si triste, si triste, qu’on peut penser qu’elle n’est pas, qu’elle n’a jamais existé, qu’elle ne compte pas. C’est le cas de maman Jeanne, née il y a un peu plus de cent ans quelque part en Belgique, mais peu importe…

Toi également, tu voudrais bien en savoir plus sur cette Jeanne, savoir comment s’est déroulée cette vie si triste, si triste. En à peine 80 pages.

Extraits :

- Il m’avait fait trois enfants au pas de course. Comme au mégot d’une cigarette on allume la suivante. Camille, Fernand, puis l’autre. Le demeuré. Trois en quatre ans.

- Après tout, certains meurent en naissant avec le cordon autour du cou, ça leur épargne pas mal de souffrance.

- Il deviendrait avocat, ou professeur, ou peut-être écrivain.

Catinus - Liège - 73 ans - 25 février 2013


Maman Jeanne 9 étoiles

Je n'aime pas les histoires tristes. Pourtant, l'oeuvre a éveillé en moi un intérêt incroyable. Car à la lecture de la page 30 - 31 - 32, je me suis plongé 100 ans en arrière, dans mon village. Celui où j'ai toujours vécu. Car, en effet, l'histoire (qu'elle soit vraie ou non) se déroule dans mon petit village. Il y décrit les marches qui montent vers l'église, Thérèse de Lisieux, la cure où vit le prêtre, ... Tout ces détails qui ont éveillé mon intérêt.

Je suis d'ailleurs sur un projet de transposition cinématographique de l'oeuvre, qui me motive énormément. (Dans le cadre d'un concours).

Igmalec - - 32 ans - 2 août 2012


maman....... Jeanne 10 étoiles

Maman Jeanne est un livre que j'étais triste de terminer car l'histoire est basée sur une histoire vraie que l'auteur raconte avec beaucoup de sensibilité et d'émotion. Le vocabulaire est extrêmement bien choisi et les phrases bien écrites. Le livre ne tire pas en longueur et pourrait même être plus long à mon goût.

Les différentes descriptions permettent aux lecteurs de ressentir ce que Jeanne avait sur le coeur. Ne plus voir ses enfants...

Bref, magnifique livre!!!!!!!

Standarman - - 28 ans - 14 février 2012


Maman d'une vie 9 étoiles

J'ai beaucoup aimé ce livre, à l'histoire très triste, très prenante, et suffisamment bien écrit pour que notre empathie fasse son travail et que le personnage soit crédible.
Une belle réussite !

Didoumelie - - 52 ans - 3 septembre 2011


La chance d'être appelée Maman 8 étoiles

Bonjour,

Nuage et eau m’avait laissée calme et détendue, je referme « Maman Jeanne » par un samedi pluvieux.

Une histoire triste, d’une femme qui fait le gros dodo sous une vie trop triste, trop injuste.
Une vie de femme fin xix eme début xxeme, une vie de femme soumise et contrainte …

Un bref écrit de Daniel Charneux triste mais sans Pathos, qui donne la parole à cette femme délaissée de tous, délaissée de la Vie, mot qu’elle n’ose prononcer.

Emotion, tendresse et pitié nous habitent tour-à-tour au fil de cette lecture ainsi qu’une pointe de révolte contre cette vie trop injuste, cette église trop inique…

C’est un roman agréable à lire et, en même temps très triste, c’est un roman social, réaliste…que l’on referme avec l’envie de serrer maman Jeanne dans ses bras et de l’appeler Maman

Bafie - - 63 ans - 25 juin 2011


Moeder Jeanne 2 étoiles

Je n'ai pas aimé le livre, il n'a pas été intéressant. L'auteur, Daniel Charneux, l'a trop détaillé. Cela n'a pourtant pas aidé à la compréhension. Le vocabulaire est vraiment compliqué. L'oeuvre est trop longue pour ce qu'elle renferme.
Ensuite, "Maman Jeanne" n'est pas de notre époque : l'histoire se déroule dans le passé. Cela n'a plus vraiment de sens d'écrire des oeuvres dont les événements se produisent dans le passé car aujourd'hui, les best-sellers se passent à notre époque ou dans le futur.
Et enfin, l'oeuvre n'est pas structurée, en effet, tout est mélangé. Daniel Charneux raconte l'histoire dans le présent et ensuite, retourne dans le passé pour expliquer ce qui s'est produit.
En conclusion, j'ai détesté le roman, cela ne m'a pas plu. L'histoire, en elle-même, n'est pas intéressante. Le suspense est absent et donc, je le déconseille vivement.

ThekillerbookBarcelona - - 30 ans - 16 janvier 2011


Maman Jeanne 6 étoiles

"Maman Jeanne" de Daniel Charneux est de façon générale un livre écrit avec beauté et beaucoup de grâce. Les premiers chapitres ne sont peut-être pas très envoûtants, mais cela m'a permis de l'apprécier par après et d'être légèrement surprise.

Un élément est intriguant. Je ne l'ai pas vraiment remarqué lors de ses premières apparitions dans le livre, mais il est tellement présent que je ne pouvais plus l'ignorer. Je fais évidemment allusion au mot "vie", repris plusieurs fois en italique dans "Maman Jeanne". Ce terme fait penser au verbe vivre, mais lors de la lecture du roman, j'ai dû admettre qu'il représentait tellement plus.

La fin était elle aussi assez perturbante. Le fait de poser des points en milieu de phrase n'est pas habituel. Je pourrais penser qu'il était ennuyeux de lire le dernier chapitre de ce livre. Au contraire, cela m'a touchée; une tristesse se dégageait de celui-ci, comme si la vie d'un être cher prenait fin.

Sarahv - - 31 ans - 13 janvier 2011


Une vie 8 étoiles

Comme Kinbote, j'ai pensé au chef-d'oeuvre de de Maupassant (et pas de Flaubert !) en lisant ce (trop) court roman de Daniel Charneux. La vie de Maman Jeanne, c'est une vie de peines, de labeur, d'enfants engendrés puis abandonnés. On espère tout le long du récit que la grâce, souvent mentionnée, se manifeste, mais bien sûr ce n'est pas le cas.

Les dernières pages, très réussies, sont très émouvantes et donnent une dimension supplémentaire au récit.

Saule - Bruxelles - 59 ans - 13 janvier 2011


Maman Jeanne 10 étoiles

Je n'ai pas trop apprécié ce livre parce que le contenu est un peu banal. Ce n'est pas un roman que tout le monde peut apprécier facilement. Il est très aisé à comprendre et cela occupe une place importante dans l'appréciation d'un récit. Cette oeuvre évoque plutôt l'image d'un écrivain qui s'inspire de faits quotidiens.

De plus l'auteur a choisi une illustration inadéquate pour la première de couverture. Avoir choisi une personne âgée est une erreur. Le titre non plus n'est pas accrocheur pour un jeune lecteur. Le livre ne comporte aucun suspense.

Et pour finir, le seul point positif est que l'histoire n'est pas trop longue. Elle ne comporte pas trop de descriptions inutiles, il est facile à comprendre. L'écriture est adaptée, c'est-à-dire ni trop grande, ni trop petite. L'oeuvre est plutôt réservée à un public féminin. Le vocabulaire n'est pas choquant vu le contenu.

MamadouSow - - 30 ans - 13 janvier 2011


la critique qui a gagné 2 10 étoiles

Je n'ai pas totalement apprécié la lecture de maman jeanne pour plusieurs raisons.
Pour commencer, la page de garde n'inspire pas le lecteur puisqu'elle ne donne pas un aperçu de l'histoire. L' illustration n'établit aucun rapport , ou presque, avec le récit. Le seul lien est la petite dame vêtue de rouge qui représente le personnage principal de l'histoire. Ensuite, le récit met en évidence la vie d'une dame dont le prénom est Jeanne. Femme de foi et d'obéissance, elle a pourtant commis un péché. Elle a vécu une aventure amoureuse avec un prêtre dont le nom est Pelleriaux. Celui-ci a formulé un voeu de chasteté: par conséquent, il lui est formellement interdit d'entretenir des relations sexuelles . Jeanne a donc donné naissance à un enfant du péché Le seul point positif que j'ai relevé lors de la lecture est la foi inébranlable que Jeanne incarne, puisqu'elle n'a jamais baissé les bras malgré les épreuves difficiles qu'elle a traversées.

Student024 - - 32 ans - 13 janvier 2011


maman jeanne plutôt pauvre dame 6 étoiles

J'ai aimé lire cette histoire car elle était pleine d'émotion. on éprouve beaucoup de sentiments divers et variés à différents moments du récit. Il se produit de nombreux événements tout au long du parcours de Jeanne, on découvre ses péripéties étape par étape.
Ce livre, pour moi, était perturbant au début car quelques répliques, écrites en italique, décrivaient ce que l'héroïne effectuait ou ses paroles. Je n'avais pas compris que ces textes étaient ceux du journaliste. A cause de cela, la compréhensions a été difficile et donc l'intérêt pour l'histoire s'en est ressenti.
Le réalisme du récit m'a beaucoup plu, on évoquait des lieux que je connais. On ne devine pas que les événements datent. On imagine facilement qu'ils se produisent à n'importe quelle époque.

Black-r - - 31 ans - 12 janvier 2011


La Maman Courageuse 7 étoiles

J'ai beaucoup aimé ce livre grâce à deux thèmes qui m'ont énormément touchée. Le premier est la relation entre le curé et Jeanne, qui est tombée enceinte de son amant. Une telle situation n'aurait pas été tolérée dans le monde de la religion chrétienne. Le fait que l'auteur mette cela en évidence m'a beaucoup plu, étant donné qu'un tel acte est complètement tabou. Mais il permet aux lecteurs de se rendre compte que cela existe et à quel point cette situation est difficile à gérer.
Le second sujet qui a suscité mon intérêt est la force de Jeanne. Elle resta maîtresse d'elle-même malgré tout ce qu'elle a vécu, comme le fait qu'elle ait été plusieurs fois enceinte. Les enfants n'avaient pas le même père. Elle n'eut pas l'occasion de vivre avec eux. Malgré tout, elle garda la foi et ne les oublia pas, ni même le curé qu'elle aimait.
Par contre, je n'ai pas compris pourquoi Jeanne répétait toujours une prière. Selon moi, cela n'avait pas vraiment lieu d'être dans ce livre. Il reste quand même très intéressant mais truffé d'éléments inutiles à mon goût.

HKitty93 - - 31 ans - 12 janvier 2011


Critique sur le roman "Maman Jeanne" 5 étoiles

"Maman Jeanne" est une histoire passionnante qui donne envie de lire la suite. J'ai particulièrement apprécié la façon dont l'auteur la raconte.

Les rôles des personnages sont bien décrits dès le début même si par la suite une impression de désordre ressort légèrement!

Par contre, les nombreuses répétitions m'ont déplu. Sans ce défaut, le roman aurait été encore plus agréable à lire. Le vocabulaire est très peu varié.

Dans l'ensemble, ce livre m'a plu. Néanmoins, je ne le relirais pas une seconde fois et ne le conseillerais pas à quelqu'un qui n'aime pas ce style d'ouvrage.

Etoile - - 31 ans - 10 janvier 2011


Daniel Charneux nous rejoue « La parure » ? 8 étoiles

Vous connaissez « La parure », de Guy de Maupassant ? Vous connaissez « Une semaine de vacance » du même Daniel Charneux ? Non ? Dommage. Car il y a comme une similitude, stylistique, enfin, de construction. La fin qui tue, qui déchire dirait-on maintenant.
Cruauté au final qui emporte l’adhésion alors que jusqu’aux dernières pages encore, je me trouvais cette « Maman Jeanne » un peu mièvre. Dans le genre réalisme social, triste à pleurer mais hélas courant (quelqu’un a dit ; « on connait tous une Maman Jeanne », c’est vrai). Et puis vient la fin qui vous descend raide en vrille comme la volée de plombs précipite le faisan au sol.
Comme pour « Une semaine de vacance », rien venu venir et … Ah Daniel !

« C’est comme ça que je suis arrivée ici, dans cette famille. Ici, les gens sont gentils. Ici, je suis bien. Je fais briller les cuivres, je vais chercher les enfants à l’école. Parfois, je prépare des oiseaux sans tête. Et puis, je vais chez le médecin de l’hôpital, et je lui raconte ma vie, comme je vous l’ai racontée aujourd’hui. C’est gentil à vous d’être passés me voir. Si vous voulez, maintenant, je vais vous préparer une tasse de café. C’est vraiment gentil à vous d’être passés. Ca m’a fait du bien de vous raconter. »

Ca fait frémir de penser qu’effectivement c’est une « Maman Jeanne » qui lui a raconté cette vie. Un bel exemple de vie foutue, détruite, et d’abord parce qu’elle est une femme en fait. Une femme, donc soumise au père. Puis au mari. Puis à l’employeur. Soumise, exploitée. Sans moyens de défense et menée ainsi jusqu’aux portes de la folie.
Mais je persiste, c’est la fin qui rend le tout incandescent. Un peu comme un feu qui tarde à prendre. Tout à coup vous soufflez et le charbon rougeoie et la flamme chatoie.
Qu’il serait doux de penser qu’il y a là-haut un paradis pour les « Maman Jeanne » …

Tistou - - 68 ans - 21 décembre 2010


« Mais la… vie ne m’a pas gâtée. » 8 étoiles

Que d’émotion, de tendresse, de pitié et de résignation, car à quoi bon se révolter, dans ce petit livre où Daniel prête sa plume à Maman Jeanne pour raconter son histoire, sa triste histoire, la vie d’une pauvre femme mariée par son père avec un alcoolique, vite décédé, qui la laisse seule avec ses enfants que la belle famille veut bien nourrir, mais, elle, il lui faudra désormais subvenir à ses propres besoins.

Alors, elle prend le chemin pour se mettre au service d’un autre puis d’autres encore et, ce qui arrive souvent dans ces cas là, un nouvel enfant paraît qu’on ne peut pas conserver avec soi car il incarne le péché et stigmatise la mère qui est rejetée et celui qu’on pourrait désigner comme père. Alors, il faut cacher l’enfant dans une bonne famille qui l’éduquera bien mais pour cela il faut payer et trimer pour payer mais, surtout, il faut oublier, se résigner à voir l’autre mère prendre sa place, recevoir les cadeaux et les baisers.

« Remplacée, gommée dès le début. » Maman Jeanne souffre, pleure, mais ne se révolte pas, elle se sacrifie pour que cet enfant n’ait pas une vie comme la sienne où seul le travail et la frustration viennent troubler la douleur de l’abandon. « … elle m’a jamais dit « maman » »

Ce récit m’a ramené loin dans mon enfance quand j’étais môme dans ma campagne, quand la religion rythmait nos vies comme celle de Maman Jeanne, distribuant les punitions, pardonnant, terrorisant, stigmatisant, bannissant. Cette religion qui fournit un espoir de vie meilleur dans l’au-delà et justifie les peines supportées dans ce monde présent et qui sert trop souvent d’alibi à ceux qui veulent imposer leur loi.

Comme on a envie de la serrer dans nos bras cette pauvre femme victime des mœurs de son temps, de l’obscurantisme religieux, du mépris pour la femme, de la cupidité. Comme on a envie de lui dire qu’elle n’a pas raté sa vie, qu’elle est une sainte dans la religion qu’on lui a choisie, qu’un jour un de ses petits fils viendra à sa rencontre sur le chemin de son passé et lui dira ce qu’elle attend depuis trop longtemps. « J’aurais bien aimé l’entendre me dire un jour : « Maman… maman Jeanne… »

Ce livre m’a aussi remémoré « La faute de Jeanne Le Coq » d’Antoon Coolen, non pas pour le style, je ne voudrais imposer cette comparaison à Daniel Charneux, mais pour le contexte et les thèmes développés. Mais, si l’émotion m’a mouillé les yeux à la lecture des malheurs de Maman Jeanne c’est aussi parce que l’auteur manie la langue avec une grande précision et une grande justesse. Seuls les mots nécessaires sont écrits pour faire sourdre l’émotion et attiser les sentiments. Et, on se sent tous les enfants de cette Maman Jeanne qu’on voudrait tous aimer.

Débézed - Besançon - 77 ans - 12 mars 2010


La vie en italique 8 étoiles

Pauvre Jeanne! Quel destin tragique que celui de cette mère de famille, abandonnée de tous. Quand elle écrit ses mémoires, Jeanne place curieusement le mot vie en italique. Comme si la vie, sa vie, elle n'y croyait plus trop, ne voulait pas la faire sienne. Chienne de vie en tout cas que la vie de Jeanne.
Au bord de la folie, elle fait le point sur cette existence ballottée, qui ne lui a jamais fait de cadeaux. Ou peut-être un, Marguerite, l'enfant né du péché. Où peut-elle bien être cette enfant que Jeanne aimerait au moins une fois entendre prononcer le mot Maman. Juste une fois. Un plaisir tout simple, mais qui là aussi se refuse obstinément à elle.
Et c'est en toute simplicité que Daniel Charneux raconte ce cruel destin, d'un autre temps. Il est vrai que dans cette histoire, si cruelle à la base, il convenait de ne pas trop en rajouter dans le pathos. L'auteur est loin d'avoir écrit un tire-larmes. On sent d'ailleurs que même si sa vie fut loin d'être rose, Jeanne garde toujours au fond d'elle une petite lueur d'espoir qui semble la faire tenir.
Un magnifique portrait de femme tout en économie!

Nothingman - Marche-en- Famenne - 44 ans - 11 janvier 2010


Une vie coupée en deux 7 étoiles

On se demande, souvent, ce que c’est d’être mère. Ce que c’est, l’enfant en soi. Ce que c’est, l’enfant à porter au fil des années, dans une vie qui parfois nous échappe. Jeanne, à l’aube du XXe siècle, ne le sait pas non plus, pas toujours. Veuve trop jeune, trop pauvre, elle doit confier ses enfants à une famille qui la soutiendra peu. Enchaînant les emplois laborieux, peu rémunérateurs, elle garde la foi en quelque chose. Sa naïveté douce, peut-être.

Et puis viennent ses trente-deux ans et la naissance de Marguerite. L’enfant née d’une relation presque vraie avec le prêtre pour qui elle travaille. Malgré les différences, les interdits, malgré les inégalités, Jeanne y croit peut-être encore. Elle égrène ses moments de foi intense en la vie, en l’espoir.

Jeanne pour qui le mot « Maman » est éloigné comme une constellation, pour qui attendre, survivre, n’a de sens que parce qu’il y a l’idée, lointaine, d’un retour à la cohésion familiale.

Un roman court pour une vie double, une vie constamment greffée au questionnement sur la maternité, sur le rôle de la femme. Oui, qu’est-ce que ça veut dire, être mère ? Jusqu’où cela peut-il pousser, jusqu’où cela peut-il nous éloigner ?

Maman Jeanne, c’est un chemin de croix, une voie escarpée en quête d’un Salut tant espéré. C’est surtout une route, qu'on espèrerait inévitable, vers la folie. Mais une route aimante, intègre. De souffrances en désillusions, Jeanne sera, au fond d’elle, l’amour. Un amour sans miroir, sans écho, lâché dans l’espace vide et destiné à un être qui ne pourra même pas savoir que cet amour existe.

Maman Jeanne, c’est un peu du Zola. C’est un regard bienveillant sur une femme touchante dont la seule échappatoire est la déconnexion avec un monde qui la maltraite, renouvelant sans cesse ses moyens pour l’éprouver. Plus, chaque fois un peu plus.

Daniel Charneux cisèle sa structure, enchaînant les brièvetés, dans la fluidité pourtant simple d’une femme qui s’écrit. On sent l’attachement de l’auteur à son personnage, on sent le thème sensible. Après avoir donné son regard à deux personnages célèbres (Marylin Monroe dans "Norma, Roman" et le poète Ryokan dans "Nuage et Eau"), Daniel Charneux en revient à la singularité de l’inconnu, à tout son potentiel unique et exceptionnel.

J’aurais aimé m’attarder, prolonger. Mais le roman, comme lorsque la vie est courte, s’arrête à la page 82.

Me reste un sentiment ému, à peine terni par une impression d’une petite chose qui manque, difficile à déterminer. Me reste une lecture sensible, poétique et vraie, un regard retenu mais tendre.

Bluewitch - Charleroi - 45 ans - 20 décembre 2009


Ma fille.... 9 étoiles

C'est à nos filles, futures mères de demain, que j'ai, entre autres, envie de proposer ce beau livre.

Pour qu'elles sachent le chemin parcouru pour les femmes depuis ce temps pas si lointain où maman Jeanne n'a pas eu le choix !
Ce qui aujourd'hui, dans nos sociétés occidentales, semble acquis : le droit de choisir son époux, la possibilité financière d'élever ses enfants, le regard des autres sur un amour interdit – pour ne pas déflorer l'histoire je n'en dirai que peu mais non aujourd'hui encore tout n'est pas permis, l'amour est encore interdit à certains – ne l'était pas encore hier.

Il est bon que ce soit un homme qui ait écrit cette histoire (vraie ? On n'y trouve pas mention du mot 'roman'), une femme aurait pu être taxée de parti pris. Un grand merci donc à l'auteur d'avoir donné à sentir ce qui a existé, dans cette forme ou d'autres semblables mais avec cette même douleur de toute une vie qu'ont à porter certaines âmes simples.

C'est aussi de la méchanceté humaine dont il est question. Sans autre réquisitoire que quelques mots d'un vieil homme. Mais terriblement efficaces et de la douleur d'un homme, prisonnier d'un dogme, qui fait les frais d'une injustice dont les bases sont toujours existantes.

Très beau récit.

Garance62 - - 62 ans - 14 décembre 2009


Une "vie". 9 étoiles

Jeanne Blanchard, issue du milieu rural, se marie avec un homme que lui présente son père. À trente ans, elle est veuve et doit subvenir seule aux besoins de ses trois garçons, endosser le rôle du mari et partir travailler à l’extérieur. Elle entre au service d’un curé qui doute de sa foi et trouve du réconfort auprès d’elle. On est au début du vingtième siècle, elle est enceinte de lui, doit le quitter et placer dans une famille d’accueil l’enfant qu’elle ne reverra jamais. Tels sont les faits mis dans la bouche de Jeanne mais avec l’art du récit et des mots justes qui caractérise Daniel Charneux.

Mais allons y voir de plus près.

Cela commence par un Ave Maria. Jeanne a trente-deux ans quand elle met au monde Marguerite, l’âge qu’aura sa fille à la fin de son existence de mère frustrée.
Trois fois mère, sans avoir jamais ressenti l’impression de l’être vraiment :
« J’avais trente-deux ans, C’était mon quatrième enfant, et je croyais que je n’étais pas encore une mère. Pas une maman. »
« Et j’ai donné la vie à une fille, à une future épouse, à une future maman. » A qui elle va donner le nom de son mari décédé : « Pas le nom du père, non. Pas le nom du père. »

Elle ne réalisera pas avec son quatrième enfant son souhait d’une maternité accomplie. Pas plus qu’avec ses garçons, il ne lui sera accordé le privilège de suivre son évolution. Daniel Charneux parle de la maternité, plus particulièrement du rapport mère-fille. Marguerite n’appellera jamais sa mère biologique « maman », pas plus qu’elle ne lui sera un jour redevable du don qu’elle lui a fait car l’existence bien sûr est un cadeau empoisonné.

Mon père, dit Jeanne du prêtre qui lui donnera une fille. « Il aurait pu être mon père et c’est ainsi que je le voyais, vraiment, au début. »
La propre mère du curé est morte en lui donnant le jour. Plus tard, il adorera la Sainte Vierge. Il finira pas s’interroger sur le sens de cette « vie », toujours écrite en italiques dans le roman car le mot est « trop fort » pour Jeanne. Comme si la vie était un virus, une maladie dont il fallait se débarrasser d’une génération à l’autre.

Cette problématique de la maternité avait déjà été traitée ailleurs dans la bibliographie de l’auteur, notamment dans « Norma roman » où Charneux nous contait l’existence - prolongée jusqu’à nos jours - de Marilyn Monroe, cette impossible mère, cette fille à jamais. Soulignons que dans NorMA roMAN, on trouvait déjà MAMAN. Et Jeanne, le féminin de Jean, n’est-il pas le prénom le plus proche du « je » ? Maman Jeanne, c’est un peu l’auteur aussi ; enfin, la projection d’une part de lui-même, les prénoms choisis par les écrivains aidant ceux-ci à créer des liens forts avec leurs personnages même si on devine que sans cela cette histoire touche de près l’auteur.

Le souvenir d’enfance marquant rapporté par Jeanne est celui où elle se cache pour susciter la crainte de sa mère et être appelée, sauvée, tirée de l’anonymat.
Jeanne attend d’être appelée « maman », d’être élue mère par la fille qu’elle a elle-même nommée à la naissance. Au-delà de cette relation particulière, il est question d’appel. Ainsi que « le coucou qui appelle au printemps », comme pour conduire Jeanne vers le Salut. L’attente de l’appel est aussi un phénomène actuel, symptôme en ces temps d’hyper communication d’un malaise plus profond, celui peut-être d’un appel d’une autre dimension, d’ordre spirituel ou simplement interpersonnel. Ainsi l’être qui vous appelle connaît votre existence ou éprouve le besoin d’une aide, d’un partage. Toutes questions que soulève ce récit aux multiples résonances.

Daniel Charneux a écrit, si on se réfère au récit de Flaubert, son « Histoire simple » mais il ne faudrait pas la réduire à une simple histoire. À le lire bien, on voit qu’il s’interroge sur une société au fond matriarcale, de laquelle le mâle est exclu, réduit à un rôle de fécondateur, de simple chroniqueur des épopées matrimoniales.

Marguerite, que Jeanne a eue à trente-deux ans, coupera son existence en son milieu. Il y a chez Daniel Charneux ce goût de la symétrie, des nombres qui déchirent et déchiffrent, des histoires bouclées, qui recommencent ad libitum car toute « vie » réclame un éclaircissement et l’écriture ou, en l’occurrence pour Jeanne, la parole sont de ces moyens de réflexion, de retour sur l’anecdotique, qui donnent à certains faits singuliers, choisis pour leur caractère emblématique, valeur d’universalité.

Kinbote - Jumet - 65 ans - 25 octobre 2009