Beatus ille de Antonio Muñoz Molina

Beatus ille de Antonio Muñoz Molina
( Beatus ille)

Catégorie(s) : Littérature => Européenne non-francophone

Critiqué par Jules, le 17 décembre 2000 (Bruxelles, Inscrit le 1 décembre 2000, 80 ans)
La note : 8 étoiles
Moyenne des notes : 9 étoiles (basée sur 5 avis)
Cote pondérée : 7 étoiles (3 364ème position).
Visites : 8 108  (depuis Novembre 2007)

Une histoire bien menée, au service d'un très grand écrivain

Dans la critique de " Pour qui Sonne le Glas ", je vous parlais de l’influence qu'avait, encore aujourd'hui, la guerre d’Espagne sur les générations plus jeunes. C'est le cas ici.
Munoz Molina est un écrivain né à Ubeda en 1956, soit dix-sept ans après la fin de la guerre civile. Il a déjà publié plusieurs romans et nouvelles. En 1996, il devient membre de la " Real Academia de Lettras " et a obtenu plusieurs grands Prix littéraires dans son pays, ainsi que le Prix Femina en France pour son roman " Pleine Lune ".
Dans " Beatus Ille ", l’action se déroule entre 1933 et 1970. En 1969, un jeune étudiant madrilène, désireux de devenir écrivain, vient d’être incarcéré pour avoir participé à des manifestations estudiantines. Nous sommes toujours sous la dictature de Franco qui n'a cessé qu’à sa mort, en 1975, avec l'accession au pouvoir du roi Juan Carlos qui a mené le pays vers une véritable démocratie. À sa libération, souhaitant se faire oublier du pouvoir, Minaya part chez son oncle Manuel, dans son village natal, Magina. Il a pour objectif d’écrire un livre sur le grand poète républicain, Jacinto Solana, assassiné par les troupes franquistes. Solana était le meilleur ami de son oncle et s’était réfugié chez lui peu avant son assassinat. Manuel aussi avait combattu Franco, mais sa position sociale lui a valu de ne pas connaître le sort de son ami. Tous les deux avaient une amie, Mariana, belle et enflammée.
A vous de découvrir tout ce qui va se révéler à Minaya... .
Antonio Munoz Molina me semble un écrivain doté de qualités exceptionnelles. Son intrigue est non seulement excellente mais, en plus, elle est menée avec brio. Il a une écriture superbe, déliée, souple, vivante. Les sons, les lumières, les ambiances tout en finesse, les sentiments et situations aux multiples facettes sont rendues avec une rare dextérité. Ses personnages, sans être trop nombreux, sont tous très bien campés, ils sonnent vrais, chacun dans son rôle.
La ville de Magina est sans cesse présente. C’est en elle que les personnages vivent ou survivent. Ses rues et ses maisons sont les témoins des événements du passé et elle va jusqu'à conditionner le comportement de certains d’entre eux. Les plaies de la guerre civiles sont toujours vivaces en elle et dans ses habitants.
Je ne voudrais pas terminer cette critique sans rappeler que dans les dix années qui ont suivi la guerre, Franco et ses troupes ont encore fait fusiller plus de cent mille personnes (ce chiffre figurait dans " Le Soir " consacré au 25e anniversaire de l'arrivée au pouvoir de Juan Carlos). À ce sujet j’aimerais citer ici le très bon livre du grand écrivain Jorge Semprun " L'Evanouissement ".
Un des personnages du livre dit " Ce qui compte, ce n’est pas qu'une histoire soit vraie ou fausse, c’est qu'on sache la raconter. "
Antonio Munoz Molina a su la raconter ! Il me semble être un très grand écrivain et son livre " Beatus ille " est une splendeur… Je crois ne pas me tromper en disant qu'il nous en donnera beaucoup d'autres. "

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Coup d’essai coup de maître

9 étoiles

Critique de Ravenbac (Reims, Inscrit le 12 novembre 2010, 59 ans) - 24 juillet 2011

L’intrigue est menée de main de maître, du début à la fin. Les personnages sont riches et complexes. La construction du roman est habile. Mais surtout l’écriture, pleine de verve poétique (à en rendre parfois difficile la compréhension de l’histoire), est flamboyante. La fin est inattendue.
Molina devient avec Beatus Ille, son premier roman, un auteur majeur, confirmé par ses livres qui suivront.

Voix du passé

8 étoiles

Critique de Bluewitch (Charleroi, Inscrite le 20 février 2001, 45 ans) - 10 septembre 2005

Molina s'intéresse souvent, je pense, à l'apologie de la mémoire, au culte du souvenir et d'un passé malléable, prétexte aux interprétations, aux "réinventions" de l'histoire.
Toujours aussi prend-il le soin d'installer une atmosphère épaisse, suave et chaude, autour de ses personnages.
La construction du roman est fascinante, on sait que le récit démarre par une narration à la troisième personne dont "l'auteur" est inconnu, pour basculer dans une narration descriptive qui rend dès lors ce "je" totalement transparent et l'oublie.
Les histoires et époques s'imbriquent, revivent simultanément. La vie de Solana, sa non-vie, celle de Minaya, ce jeune homme fuyant, difficile à cerner, mystérieux, sa recherche d'un passé camouflé, de ressentis perdus, d'émotions tachées de sang et de larmes.
Tout est dans l'ambiance lente, sensuellement lente de Molina. Les phrases s'étirent comme chat au soleil, trop longues parfois, entrecoupées comme le sont la pensée et les images du souvenir.
Je serai honnête, j'ai failli me laisser prendre par la lassitude, l'exergue de cette lenteur étouffante en fin de première partie. Heureusement, je n'ai pas baissé les bras ni abandonné les pages. Car ce livre est splendide. Ecrit avec soin, poésie, réflexion et beauté.
C'est l'Espagne et ses meurtrissures de guerre, la honte, la peur, le chagrin. C'est Magina, ses tentacules, ses maisons vicantes. C'est le laid qui en deviendrait beau.
Un excellent roman, qui grandit un peu plus à chaque page, riche et brut comme la pierre.

Littérature et mystère sur fond de guerre civile

9 étoiles

Critique de Féline (Binche, Inscrite le 27 juin 2002, 46 ans) - 5 août 2005

Sur fond de guerre civile espagnole, Munoz Molina construit une enquête littéraire qui entraîne le jeune Minaya dans une folle recherche du passé et du manuscrit de Jacinto Solana, poète et ami de son oncle Manuel. Arrivé dans la ville de son enfance, Magina, où Solana a également vécu, il se retrouve rapidement plongé en plein mystère : qu’est-il arrivé à Mariana, l’épouse de Manuel, tuée d’une balle le lendemain de ses noces ? Attention, la réalité n’est pas toujours ce que l’on croit…
Pour Antonio Munoz Molina, le plus important dans un roman est la manière dont on raconte l’histoire. Cette certitude lui a permis de renouveler une littérature espagnole qui s’enlisait. Avec ce premier roman, il nous offre une magnifique narration dont la construction élaborée fait d’incessants va et vient entre flash-back et présent. Son style est empreint d’une grande poésie qui, même s’il n’est pas toujours facile d’accès, est doté d’une force magnifique.

Un très bon roman. Merci à Jules de me l’avoir fait découvrir.

Enquête littéraire

9 étoiles

Critique de Saint-Germain-des-Prés (Liernu, Inscrite le 1 avril 2001, 56 ans) - 4 mai 2003

Je ne l'oublierai pas de sitôt, ce roman…
L’histoire, rapportée par un narrateur dont l’identité reste mystérieuse jusqu'aux dernières pages, concerne Minaya, un jeune homme qui souhaite faire sa thèse sur Jacinto Solana, poète à l’époque de la guerre civile espagnole.
Dans ce but, Minaya se rend chez son oncle Manuel car le poète comptait parmi ses amis.
Minaya, dans son enquête pour retracer ce que fut la vie de cet homme, sera aidé par Inès, Inès la mystérieuse, la désirable.
Comme Jules l'a souvent répété, ce roman est passionnant.
L’histoire, d’abord, est captivante et nous surprend à chaque tournant.
Il n’est aucune certitude qui résiste aux dernières pages.
Et puis, surtout, il y a le style.
Des phrases parfois kilométriques, souvent implacables de justesse.
Le résultat ?
Vite, vite, un autre Molina !

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