La Première Guerre mondiale pour les Nuls
de Jean-Yves Le Naour

critiqué par Catinus, le 9 novembre 2009
(Liège - 73 ans)


La note:  étoiles
Sauve qui peut !
Si on demandait à un scénariste d’écrire une histoire à l’échelon mondiale, qui serait à la fois crédible mais tellement absurde qu’à peine imaginable quand même et qui comporterait des tas de faits d’armes d’une violence, d’une cruauté, d’une bestialité sans nom. Avec, en plus, un maximum de boucheries, de sang, de larmes, de souffrances, de désespérances, il aurait vraiment du mal à imaginer pire que le conflit appelé « La Grande Guerre « .
Un siècle plus tard, les historiens s’interrogent encore du pourquoi d’un tel conflit . Toute l’Europe s’est précipitée dans ce piège – que l’on croyait, au début, de très courte durée – pour ne pas perdre la face dans les « amitiés « et les alliances. L’Allemagne venant au secours de l’Autriche-Hongrie, les Russes entrent dans le conflit, puis l’Empire ottoman en ajoute une couche, et les Français et l’Empire britannique bouclent la boucle. Total : c’est parti comme en 14 ( et c’est le cas de le dire ). Ou alors, il s’agit d’une sordide joute entre les capitalismes européens. Va savoir !
Certains diront que l’Europe s’est sabordée, s’est suicidée en 1914.
Georges Brassens le chante « moi, mon colon, celle que je préfère, c’est la guerre de 14-18. Ben môa aussi, tiens. J’en suis friant, … comme d’une infecte et écœurante pâtisserie . Je finis par assez bien la cercler, avec des lacunes énormes toutefois, n’étant pas un pseudo militaire ni un historien ( mais plutôt un objecteur de conscience, hé , de la classe ’74-76 ). Ce livre pour les nuls est très bien rédigé et brosse cette épopée avec quelque touches d'humour ( noir ! ), si cela est possible.
un livre marquant; 8 étoiles

C’est un livre qui s’adresse aux nuls et c’est un peu gênant. Quand vous passez devant la caissière elle vous adresse un sourire condescendant… Vous avez envie de lui dire : « c’est pour ma petite sœur ou c’est pour ma belle-fille… »
Mais un moment de gêne est vite passé et le livre en vaut la peine. Il est très bien conçu. Il est présenté d’une manière très moderne, un peu à la manière d’un magazine. Les chapitres sont courts avec chaque fois un gros titre qui annonce clairement le contenu.
Il est entrelardé de pavés grisés, intitulés « le saviez-vous » ou « n’oubliez pas » ou encore « un portrait ». Ce sont des digressions intéressantes mais pas indispensables au récit.

Comme l’auteur le précise dans son introduction : dans ce livre, on peut puiser l’article que l’on veut, comme on se sert d’un plat dans un buffet. C’est très pratique comme livre de références.

Évidemment ce livre n’entre pas dans de grandes considérations historiques. Ce n’est pas son but. Mais il raconte tout ce qui s’est réellement passé durant cette guerre. Il restitue bien l’esprit de l’époque à l’aide de chroniques reprises dans les journaux ou d’extraits de discours. Il montre très bien l’enlisement invraisemblable qui a fait qu’un conflit local, qui devait durer quelques jours, est devenu une tragédie mondiale de « quatre années plus longues qu’un siècle. »

L’auteur raconte, il ne prend pas parti ; il n’y a pas le moindre chauvinisme. Au contraire, il explique très bien que personne n’a gagné cette guerre. Un moment, un des belligérants a dit : « assez ! assez de morts » et il s’est arrêté…

La seule chose que l’auteur se permet, en fait de commentaires personnels, c’est de démontrer, avec un humour grinçant, l’incroyable entêtement des politiciens, la bêtises des discours officiels, l’absurdité des manœuvres militaires : « pour l’honneur de la Patrie, on sortait des tranchées et après 10 mètres, 20000 soldats étaient fauchés…»

On referme ce livre sur une impression de désespoir devant l’absurdité des guerres. Et pourtant, comme le dit bien l’auteur, dès le 11 novembre 1918, tout était mis en place pour la suivante… !

Croyez-moi : vous n’êtes pas obligés d’être un nul pour apprécier ce livre d’Histoire. Que du contraire, par moment ce livre est hallucinant et c’est même un genre de livre qui pourrait vous marquer pour la vie.

Saint Jean-Baptiste - Ottignies - 88 ans - 2 décembre 2009