Destins
de François Mauriac

critiqué par Pétoman, le 13 janvier 2002
(Tournai - 48 ans)


La note:  étoiles
A qui la faute?
Je ne sais pas quel problème j'ai avec chaque bouquin de Mauriac, en effet, chaque fois que j'en lis un, paf, je l’oublie quasi immédiatement, je ne sais pas pourquoi. C'est pourquoi je me grouille de faire cette critique.
Bob est un jeune garçon qui sous prétexte de faire de la décoration chez les jeunes, semble faire bien autre chose avec eux. Puis il tombe malade et il est envoyé chez sa grand-mère à la campagne. Là, Elisabeth prend soin de lui... mais il a la visite de Paule de la Sesque, sa "fiancée". De retour à la maison, Pierre, le fils d'Elisabeth, homme imbu de catholicisme et disons-le, un peu coincé, découvre la protection de sa mère contre le "couple maléfique". S'ensuivent des disputes entre Pierre et sa mère, entre Pierre et Bob ( un bon coup de poing )... événements qui causeront la fuite de Bob avec ses amis. Mais il mourra quelque temps après dans un accident d'auto. Alors à qui la faute?
Un sommet de la littérature 10 étoiles

Dans « Destins » Mauriac met en présence les destins de deux jeunes garçons. L’un incarne le mal et l’autre le bien. Bob est le mal incarné. Il est issu d’un milieu modeste, c’est un jouisseur, un don Juan, il est la coqueluche du « tout-Paris » et vit d’expédients pas très recommandables. Pierre est issu d’une famille fortunée, c’est un garçon studieux, il a étudié la théologie, il est dans l’Action Catholique et donne des conférences ; il est ennuyeux comme la pluie. Ces deux garçons se retrouvent un été dans le même village de leur enfance. Et c’est la confrontation entre les deux garçons, entre le bien et le mal.

Ce que Mauriac arrive à montrer c’est la séduction du mal et les contradictions du bien. Au fond, Pierre, ce garçon triste et ennuyeux, qui se veut chrétien de stricte observance, envie Bob, qui lui, jouit de la vie sans trop se poser de questions ; et pourtant, il le condamne. Mais, comme toujours chez Mauriac, la vie n’est jamais simple. Le mal n’est jamais tout à fait le mal ; il y a toujours une rédemption possible ; ici, c’est sous la forme d’une jeune fille très pure qui s’est fiancée avec Bob et qui pourrait le ramener dans le droit chemin. Et le bien n’est jamais tout à fait le bien. Pierre veut faire le bien, pour lui et pour les autres, mais n’est-il pas poussé par la jalousie, et même la méchanceté, quand il projette de détourner cette jeune fille de son fiancé parce qu’elle est trop bien pour lui ?

Mais au cours des pages on découvre que le véritable personnage du roman est la mère de Pierre. Celle qui un jour, excédée, dira à son fils : « quand cesseras-tu de t’occuper des affaires des autres ? ». Cette veuve quadragénaire a fait un « mariage de raison ». Elle est toujours restée sur ses terres et ne vit que pour l’exploitation de son domaine. Et puis un jour, au contact de Bob, elle se rend compte tout à coup qu’elle n’a rien vécu. Bob est séduisant comme le mal, et il vit, il connaît l’amour, il est heureux ; elle n’a connu que des contraintes religieuses et beaucoup de travail pour acquérir une fortune, qui finalement, n’est rien. Elle est passée à côté de la vie... Ce personnage est fascinant et époustouflant de vérité. Ici, on est en plein Mauriac ! Il n’y a que lui pour créer ce genre de personnages qui resteront gravés dans la mémoire du lecteur comme s’il les avait connus pour du vrai.

D’ailleurs, dans ce roman, comme toujours chez Mauriac, tous les personnages, du plus présent au plus effacé, ont une épaisseur humaine incroyable. Et puis il y a le style Mauriac, sa construction d’un roman, son rythme des phrases et ses descriptions de la nature qui participe toujours à la dramatisation du récit.

En somme, « Destins » est un pur Mauriac. Un des meilleurs et des plus représentatifs. Il atteint, à mon avis, les sommets de la littérature française.

Saint Jean-Baptiste - Ottignies - 88 ans - 13 février 2019


Un rien d'éclairage svp... 5 étoiles

Tu termines ta critique par une question simple: à qui la faute ? Peut-être que j'ai la réponse et c'est ton texte qui la donne: est-ce que ce que tu as compris du livre, ressemble à ce que tu nous en décris ?... Si oui, la réponse est là ! J'aurais alors oublié tout aussi vite que toi !...

Jules - Bruxelles - 80 ans - 14 janvier 2002