Sans frigo de Renaud Ambite

Sans frigo de Renaud Ambite

Catégorie(s) : Littérature => Francophone

Critiqué par Lucien, le 31 janvier 2002 (Inscrit le 13 mars 2001, 68 ans)
La note : 8 étoiles
Moyenne des notes : 8 étoiles (basée sur 10 avis)
Cote pondérée : 6 étoiles (3 496ème position).
Visites : 4 120  (depuis Novembre 2007)

Au nom du fils...

Ambite. Un nom lourd à porter. ou dur. c’est selon. Qu’est-ce qu’il a dû en baver dans les cours de récré, Renaud, à l’âge où l'aristocratie est de muscle et de gueule, à l’heure où les connards triomphent.
Capable d'autodérision, Ambite : « Je suis né en érection L'accouchement fut difficile, j'étais accroché comme un hameçon. » Aujourd’hui, Renaud publie son deuxième livre, Sans frigo, qui succède à un premier roman, Thérèse m'agaçait (éditions de l’Aube). Et les connards la bouclent. Le narrateur n'est pas nommé. Si, peut-être. Encore que… Si oui, le lecteur oublie aussitôt son prénom, comme celui de « l'étranger » de Camus. En tout cas, le narrateur personnage, le « héros » (mais pas dans le sens héroïque, faut-il le préciser ? Je songe à certain notaire reprochant au protagoniste de certain roman son manque d’héroïsme.), le « JE » (qui est un autre, comme chacun sait), le gars, le mec en clair se débat entre deux époques de sa vie : passé et présent. Les chapitres qui narrent les événements passés et ceux qui évoquent les faits présents (ou moins passés.) alternent régulièrement : les impairs pour le présent, les pairs pour le passé. Vingt-trois chapitres, donc retour final au présent. L’incipit ? « Ce soir je mangerai des pois chiches, un morceau de fromage et peut-être une pomme. » La coda ? « Ce soir je mangerai des pois chiches, un morceau de fromage. Et peut-être une pomme. » On l’a compris : rond comme une pomme, cyclique et anodin comme un pois chiche, l'itinéraire du JE. En tout cas, à première vue. Car le personnage est coincé dans sa vie, entre ses parents, ses beaux-parents et sa femme, Hélène. Enfant désemparé dans le monde des adultes ; adulte considéré comme le grand enfant qui n’a jamais mûri, il subit poliment les remarques de son entourage, et particulièrement de cette belle Hélène qui ne supporte plus… sa légèreté ? sa naïveté ? sa maladresse ? « J’avais 21 ans et je me trouvais vieux. Hélène deux ans de moins, et elle l’était. C'était une fille du genre à assortir le liquide vaisselle au carrelage de la cuisine, mais je ne le savais pas encore. » Et puis bien sûr, ils auront un enfant, Bruno. Et puis, bien sûr, ils se sépareront et JE se retrouvera seul, mais avec un fils. Et puis, et surtout, Bruno partira à son tour. Et JE sera vraiment seul. Et JE cherchera son enfant (ses enfants ?), à travers tout le pays, avec une carte de France et un Stabilo jaune pour cocher les chemins déjà parcourus. Et c'est là qu'il parviendra à nous émouvoir, avec son orteil amoché et ses enquêtes de comptoir. Seul. sans même l’amitié de ce personnage extraordinaire qui lui aura un temps renvoyé la balle comme Didi à Gogo : Alco, Alcofribas, le boutiquier immigré qui connaît le français mieux que les Français (son surnom ne vous rappelle rien ?), qui compose des odes fromagères et des poèmes d'amour à la gloire de la femme éternelle : « - Je viens de rencontrer une femme épatante. é-pa-tante. Elle est belle, mais elle est belle… D'un certain point de vue, elle me rappelle un tableau de Courbet. - Quel tableau ? Je t’assure, c’est une merveille. Une gentillesse à fendre l’âme. Un peu folle, juste ce qu'il faut. La femme idéale. Celle que j'attends depuis l’origine du monde. » Les connaisseurs apprécieront tout ce qui est suggéré dans cet extrait et ne laisseront pas moisir ce petit livre… Sans frigo, à consommer sans attendre !

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Solitaire

6 étoiles

Critique de Nothingman (Marche-en- Famenne, Inscrit le 21 août 2002, 44 ans) - 30 janvier 2006

Il, c'est le narrateur, qui nous fait partager ses errances quotidiennes dans Paris. Le moindre centimètre carré urbain peut attiser chez lui quelque digression ou pensée définitive. On pense à Modiano. Au travers d'un langage simple, il nous fait partager sa vie aussi. Le mariage avec Hélène, le choix de l'appartement, les dîners chez les beaux-parents, la naissance de son fils Bruno, la débâcle progressive. Car Hélène n'en peut plus de ce grand enfant, ce naïf, ce rêveur continuel qu'on croirait spectateur de sa propre vie. Même marié, on le sent seul, solitaire. Si ce n'est Alco, cet épicier sympa qui triture avec passion la grammaire et l'orthographe, son confident occasionnel. Il y a quelque chose chez ce type qui fait penser à Charlot; un être, vagabond de sa propre vie et pourtant jamais triste. Cette naïveté du personnage m'a souvent dérangé. Comme son entreprise finale à laquelle il croit, sans y croire. Beaucoup y ont vu de l'humour, personnellement j'ai plus ressenti de la tristesse pour ce personnage.

Très sympatique!! :)

8 étoiles

Critique de Niddle (Le Raincy, Inscrit le 13 janvier 2004, 45 ans) - 14 janvier 2004

A première vue, et en ne lisant que la quatrième de couv', ce livre a l'air tout à faut banal, sans grande prétention. En le lisant, on se rend compte que le style d'écriture est très frais. L'histoire est assez réaliste et il est tout à fait probable que certaines saynettes soient puisées dans la vie de tous les jours, donc on s'identifie pas mal. Les dialogues sont très bons. Pas trop longs, juste ce qu'il faut pour donner un très bon équilibre à ce petit roman qui, mine de rien ne paie pas de mine, mais se déguste absolument délicieusement.

Sans souffle...

6 étoiles

Critique de Saint-Germain-des-Prés (Liernu, Inscrite le 1 avril 2001, 56 ans) - 20 juillet 2003

Il m’est toujours difficile de me démarquer d'un consensus…
Et pourtant, je ne pourrais faire autrement à propos de ce livre.
Peut-être suis-je passée à côté, peut-être l’insolation a-t-elle altéré mes perceptions, mais voilà.
je n’ai pas aimé « Sans frigo ».
Pas aimé, c'est un peu fort, disons que je le trouve vide.
L'auteur ne m'a pas semblé faire aboutir les deux-trois bonnes idées narratives.
Traitées comme elles le sont, on ne décolle pas de l’anecdote.
C'est de la littérature contemporo-contemporaine, comme je l’appelle.
On ne peut pas dire qu'Ambite écrive mal, non, mais j’ai trouvé son style banal.
Quant à son héros, il ne m'a pas émue…

Ambite enfin en poche

8 étoiles

Critique de Lucien (, Inscrit le 13 mars 2001, 68 ans) - 14 juin 2003

Une nouvelle excellente raison de lire "Sans frigo" : il vient de passer en collection de poche, plus précisément chez "J'ai lu". A emporter dans le sac à dos des prochaines vacances...

Fantaisie et émotions

8 étoiles

Critique de Bluewitch (Charleroi, Inscrite le 20 février 2001, 45 ans) - 4 mai 2003

Parler de « Sans frigo » me fait courir le risque de n’écrire qu’une répétition de ce qu’ont bien justement dit de lui Lucien, Zoom, Miller. Mais quand j'aime, j'ai envie de le dire.
Un personnage qui regarde la vie dans le flou de son regard myope, pas toujours certain d'apprécier le port des lunettes. Il est seul, avec son amertume teintée d’ironie, avec sa douceur d’un père en quête d'enfants, avec sa candeur face aux choses et aux autres. On s’attache à lui, sincèrement, naïvement. Un homme qui perd tout, petit à petit, mais reste pareil à lui-même, capable de s'étonner, se fasciner, de regarder le monde comme si c'était la première fois.
Il y aura toujours de l’humour, de la fantaisie ou de la tendresse dans sa vision des autres.
Dans son amitié indéfectible avec Alco, l'épicier « sympa ». Personnage clef, toujours à l’affût du bon mot, dont la relation avec cette femme si belle, son « litchi », symbolisera aussi le départ du « héros » à la recherche de son fils. Une oreille attentive, diplomate, sincère.
Et puis dans ces situations cocasses vécues chez les beaux-parents, dans cette vie de couple caricaturale, artificielle.
Jamais une vie triste comme celle du personnage n'aura été si peu larmoyante. Jamais on n'aura vu tant de malice dans le récit d’un homme sans femme, sans fils. Sans frigo.
Et ne parlons même pas de tous ces clins d’yeux complices de l’auteur au lecteur, glissés en toute discrétion dans son roman… Vraiment, un livre délicieux comme du gâteau aux framboises !!

Renaud en Belgique...

8 étoiles

Critique de Lucien (, Inscrit le 13 mars 2001, 68 ans) - 12 avril 2003

Première visite en Belgique de Renaud Ambite, l'auteur qui prend de la hauteur... Il sera le samedi 26 avril à 19 heures à la Maison Losseau (Mons), invité par Daniel Charneux et Alexandre Millon. Interview, lectures d'extraits, intermèdes musicaux (un quatuor de trombones à réveiller Boris Vian dans sa tombe). Et le petit vin de l'amitié sur le coup de 21 h... Et la belle Maison Losseau...

libre lecteur

8 étoiles

Critique de Zoom (Bruxelles, Inscrite le 18 juillet 2001, 70 ans) - 10 février 2002

Difficile d'ajouter quelque chose à une critique de Lucien l’académicien... si l'on va dans le même sens que lui dans l’appréciation. Son conseil est le bon : lisez ce livre ! Il est sucré salé, joyeux et déprimant, léger et fort, tendre et farouche, la vie quoi. J’ai lu les deux livres d’Ambite d'une traite : je lui trouve beaucoup de talent dans l’art de dire les choses en les effleurant, d’émouvoir sans en avoir l’air, de faire avec des mots simples un long voyage, et de laisser au lecteur un sentiment de liberté jusqu'à la dernière page.

L'humour pour ne pas tomber

8 étoiles

Critique de Miller (STREPY, Inscrit le 15 mars 2001, 68 ans) - 2 février 2002

Dans le connu des choses faites, dans l'évidence volontaire, aux cours majestueux des équations enfantines un adulte est devenu un rêveur invétéré. Voilà le personnage de ce roman.
Un portraitiste de son entourage hors pair.
Une ironie à l'acidité dosée.
Le mariage, le déménagement, la grossesse de sa femme, le dimanche en famille, la belle-famille. La disparition du fils, la séparation,
la visite annuelle chez sa mère. L'épicier arabe Alco qui a appris la langue dans le dictionnaire en un temps record et qui rédige des poèmes. Et Alco va agir comme un pivot dans la narration. Car le personnage de Renaud Ambite ne s'inscrit dans aucun cadre social, ses échanges qui font de l'humain un humain, se limitent presque à ce point pivot, à l'épicier-philosophe. Et puis et surtout, dans ce roman, il y a l'errance, le thème de l’errance, cette quête de paternité, la panne du frigo comme un signe, un symbole, un malaise au bord de la falaise et juste l'humour qu'il faut pour ne pas tomber.

Les devinettes

8 étoiles

Critique de Bolcho (Bruxelles, Inscrit le 20 octobre 2001, 76 ans) - 2 février 2002

Mais c'est vrai que les femmes sont très belles sous cet angle là aussi... Et puis, pour la seconde devinette: François Rabelais. Qu'est-ce que j'ai gagné? Je suis le premier à avoir répondu quand même... Toi, tu as gagné le plaisir de m'avoir donné envie de lire ce bouquin.

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