Boulevard Saint-Germain
de Gabriel Matzneff

critiqué par Dirlandaise, le 5 avril 2010
(Québec - 69 ans)


La note:  étoiles
Ah le temps qui passe... qui passe !
Bien que sa famille soit d’origine russe, peut-on être plus parisien que Gabriel Matzneff ? Je ne crois pas. Alors, quand cet homme décide de nous entraîner à sa suite dans cette ville qu’il aime tant, vous pouvez vous attendre à vivre un périple exceptionnellement romantique et d’une remarquable érudition. Cette visite guidée des arrondissements traversés par le boulevard Saint-Germain est tout à fait charmante. Tous les endroits chers à l’écrivain y sont cités, certains sont encore là alors que d’autres ont malheureusement disparu. Les restaurants ont occupé une large place dans la vie de monsieur Matzneff car il ne mangeait pratiquement jamais chez lui mais fréquentait un large éventail d’établissements aussi variés que pittoresques entre autres la Brasserie Lipp, le Wagon-Salon, le Rendez-vous des Camionneurs, Le Flore et Les Deux Magots. Il y a aussi les librairies, les églises orthodoxes et catholiques comme Saint-Nicolas-du-Chardonnet, Sainte-Geneviève et l’église Saint-Sulpice, les cinémas, la fameuse piscine Deligny, les rues de l’Université et Du Bac.

Que de souvenirs sont évoqués lors de cette balade parisienne mais aussi de nombreuses anecdotes et des moments de vie croqués sur le vif émaillent le récit d’une façon tout à fait charmante. On ne s’ennuie jamais avec monsieur Matzneff. Quelle érudition, quelle classe, quel savoir-vivre et quelle belle générosité ! J’aime beaucoup quand il s’adresse à ses lecteurs et leur fait la leçon. Beaucoup de choses le font tiquer entre autres la bêtise, le manque de respect et l’ignorance alors il nous le fait savoir vertement. Il n’aime pas tellement les touristes américains qu’il trouve vulgaires et débraillés. Et le temps qui passe… qui passe… et les amis qui disparaissent les uns après les autres lui laissent une sorte d’angoisse devant l’avenir mais comme il le dit si bien, l’avenir n’existe pas, il n’y a que le présent qui compte et il faut jouir de la vie, la savourer jusqu’à la dernière goutte malgré son absurdité et parce qu’elle est fugace.

« Bon, mais en attendant mangeons cette succulente épaule d’agneau et buvons ce ravigotant gigondas. Libiamo ! chers amis, libiamo ! Songeons aux vignes qui jadis entouraient l’abbaye de Saint-Germain-des-Prés, à toutes ces bonnes bouteilles qu’ont bues ceux qui ont vécu ici avant nous ! Aujourd’hui, c’est à nous de jouir de la vie, et — précisément parce qu’elle est fugace — nous devons la savourer jusqu’à la dernière goutte. »