Concerto à la mémoire d'un ange
de Éric-Emmanuel Schmitt

critiqué par Le rat des champs, le 12 avril 2010
( - 74 ans)


La note:  étoiles
Quatre occasions de rédemption
Quatre nouvelles, unies par un fond commun, celui d'un personnage qui reçoit une occasion de racheter une conduite peu honorable.

Dans le désordre, un président de la république, une empoisonneuse, un marin qui a négligé sa famille, et un jeune musicien vont chacun se voir offrir une chance de rédemption qu'ils saisiront ou non, selon leur tempérament et les circonstances de la vie. Chacune de ces histoires est traversée par la présence plus ou moins discrète de Sainte Rita, la patronne des causes désespérées, mais ce n'est qu'anecdotique. Un petit clin d'œil, sans plus.

Le thème omniprésent est celui de la liberté d'être, de se dépasser, de mourir au vieil homme pour devenir, comme disait Goethe. Sommes-nous conditionnés par notre passé et par la personnalité que nous crée la machinerie neuronale qui nous gouverne?

Pour l'auteur, la réponse est claire: nous avons un libre-arbitre, qui nous permet, si nous le désirons vraiment de nous approcher d'un certain idéal, qu'on pourrait appeler de sainteté, faute d'un mot plus approprié. Encore faut-il le vouloir et accepter toutes les conséquences qui découlent du choix éthique que l'on a posé.

Chacune de ces nouvelles est émouvante, de manière très différente. Le prix du rachat de soi-même est souvent très élevé, mais certaines âmes, qui ont gardé un fond de pureté, acceptent de le payer, quelles que soient les conséquences, aussi tragiques soient-elles pour elles-mêmes.

C'est notamment le cas dans la nouvelle qui donne le titre à ce recueil, dans laquelle un jeune salaud se transforme en un homme bien alors que sa victime, pure au départ, devient une crapule de la pire espèce.

Le style littéraire de Schmitt est brillant sans ostentation, fluide, sans fioriture ce qui rend la lecture de ce livre particulièrement agréable.
Quatre mouvements, une oeuvre unique. 9 étoiles

Avant tout, permettez moi de souligner l'attrait que cette couverture exerce sur moi, superbe illustration de Marcelino Truong. Même d'un auteur inconnu, j'aurais emprunté ce livre.

Concerto à la mémoire d'un ange est un recueil de quatre nouvelles, cependant, entendons-nous bien, même si elles pourraient être lues séparément, le recueil révèle une trame narrative, un élément commun à ces quatre récits, des thèmes récurrents : changement, rédemption, pardon, damnation. Il ne s'agit pas de quatre nouvelles autonomes, ce sont plutôt quatre mouvements d'une oeuvre unique.

Prélude : L'empoisonneuse vous fera certainement frisonner et sonder votre entourage du coin de l’œil ; méfiez-vous, les apparences sont trompeuses et l'esprit humain peut se révéler parfaitement retors.

Con dolore : Le retour évoque le thème du changement: un drame vous effleure et vous fait revisiter votre vie, vous devenez alors autre au grand étonnement de votre entourage.

Con fuoco : Concerto à la mémoire d'un ange, nouvelle éponyme de ce recueil en constitue le climax ; la noirceur s'oppose à la lumière dès les premières lignes jusqu'au point final. Un récit qui va certainement me hanter longuement.

Marcatissimo : Un amour à l'Elysée met en scène les travers de l'âme humaine à travers le prisme du pouvoir. Cette nouvelle évoque quelques parcours réels et m'a parfois indignée car finalement ces guignols sont amenés à gérer notre présent et l'avenir de notre belle planète. Cette réflexion m'éloigne du propos de l'auteur qui, dans cette dernière nouvelle, nous livre certaines clés : le rôle du temps, des décalages temporels, il approfondit également cette idée dans son journal d'écriture.

Bis : le journal d'écriture de l'auteur nous livre le contexte, des clés de lecture, une réflexion,c'est également un partage d'émotions.

Je lis fréquemment monsieur Schmitt et place ce recueil dans mes préférés parmi ses écrits : les thèmes sont forts, les récits denses parfois assez effarants.

Comblée d'un moment de lecture profond, je remercie l'auteur non sans un clin d’œil à la blancheur de ses chemises : rien dans ce livre n'est de ce blanc immaculé.

Bafie - - 62 ans - 23 janvier 2019


Se lit agréablement 8 étoiles

Quatre nouvelles :
- « L’empoisonneuse » : Marie raconte au jeune curé Gabriel les meurtres de ses maris et amant ( dommage, la nouvelle commence bien, très bien même, mais finit de façon un peu court).
- « Le retour » : les quatre filles de Greg, le marin et la cinquième : Rita.
- « Concerto à la mémoire d’un ange » : le destin tragique de deux amis musicien, Caïn et Abel.
- « Un amour à l’Elysée » : de l’amour à la haine et vice et versa.

Se lit très agréablement !

Extraits :

* - Votre foi n’a jamais eu de crise ?
- Dieu ne supporterait pas mes caprices. Si je n‘étais pas à sa hauteur, il m’y remettrait sur-le-champ.
- La foi est une grâce.
- Exactement ! Quand on a la croyance qui flanche, Dieu vous botte le cul pour croire à nouveau.

* Dans l’appréhension de la mort, il y a trois peurs distinctes, l’inconnu de la date où l’on mourra, l’inconnu de la manière dont on mourra, et l’inconnu de la mort elle-même.

Catinus - Liège - 73 ans - 1 octobre 2016


un humanisme affiché 8 étoiles

EE Schmitt a ce talent indéniable qui est celui de véhiculer des sentiments et des émotions avec un style et des mots simples. Il veut toucher tout le monde -et pas seulement Odette- et y parvient. Alors certes on peut critiquer le bon sentimentalisme dont il fait parfois preuve mais force est de constater que le libre arbitre qu'il défend touche le lecteur en l'obligeant à une introspection personnelle. La morale n'est pas toujours sauve mais c'est justement cette curiosité qui pousse le lecteur a découvrir l’épilogue de chaque nouvelle, inégales certes, mais toujours savoureuses. A lire résolument

Seb - - 47 ans - 1 avril 2013


inégal mais appréciable 7 étoiles

j'ai particulièrement été touché par la nouvelle "concerto...".
les 2 personnages principaux sont touchants et l'intrigue haletante.
J'ai apprécié la nouvelle "amour à l'élysée" par ses rebondissements et ce personnage féminin très attachant.
La nouvelle "le retour" est plutôt courte et sans grand éclat.
Par contre je n'ai pas accroché sur l"empoisonneuse" que j'ai trouvé sans grand intérêt.
L'ensemble est plutôt agréable, bien écrit et le petit plus sur le partage des réflexions de l'auteur est la bienvenue.

Gardigor - callian - 47 ans - 24 juillet 2012


Quatre histoires fournies avec le décodage 8 étoiles

Concernant ces quatre histoires magnifiquement écrites, je ne vois pas ce que je peux ajouter de plus. Les autres critiques sont exhaustives. J'ai passé d'excellents moments à voyager d'un récit à l'autre. Au terme de la dernière nouvelle, j'envisageais la cote de 3,5.

Ce qui me pousse à monter à 4, c'est ce "journal d'écriture" (les vingt dernières pages du bouquin) dans lequel l'auteur nous fait part de réflexions, plus ou moins proches de ses nouvelles, qui le traversent durant la période d'écriture. Il prend le temps de nous expliquer entre autres le travail minutieux de création des personnages et développe les contraintes en matière de rédaction de nouvelles. J'ai trouvé cette mise à nu fascinante et passionnante.

Le contenu de ces réflexions me donne l'impression de partager certains points communs avec EE Schmitt. Par exemple, je lis à la page 210 :"Je suis sensible à une chose dont j'entends peu parler: la juste taille d'un livre. En tant que lecteur, j'estime que la plupart des livres que je parcours n'ont pas leur juste taille: celui-ci fait trois cents pages alors que le sujet en appelle cent, celui-là se limite à cent vingt tandis qu'il en commande cinq cents. Pourquoi la critique littéraire continue-t-elle à éviter ce critère? (...) En sculpture, on s'étonnera qu'un artiste cisèle un ensemble monumental dans une petite pierre ou découpe un pissenlit dans un granit de six mètres de haut; en peinture, on saisit le rapport entre le cadre, sa dimension et le sujet; en musique, on juge parfois que tel matériel musical est insuffisant pour la durée de tel ou tel morceau. En littérature, jamais...".

Je me sens proche de cette opinion d'autant plus qu'il m'est arrivé plusieurs fois de me plaindre sur ce site du non respect flagrant de ce que Schmitt appelle "la juste taille d'un livre".

Quel grand écrivain! Dire que je ne l'ai jamais rencontré alors qu'il habite à moins de cinq kilomètres de chez moi...

AntoineBXL - Bruxelles - 45 ans - 11 juillet 2012


Inégal 7 étoiles

Le point fort de ce recueil de 4 nouvelles est qu'elles ne sont pas simplement juxtaposées, il existe un véritable thème qui les fédère : la possibilité (ou non) pour l'Homme de changer. Déterminisme ou libre arbitre, Descartes vs Spinoza comme le rappelle Schmitt dans sa postface. Certes c'est un peu de la philo bon marché, mais ça se laisse lire.
Par contre la présence de Sainte Rita comme fil rouge est non seulement anecdotique comme le rappelle la critique principale, mais même carrément ridicule tellement c'est téléphoné. Mais bon passons...

1) L'empoisonneuse : 3,5/5
Ou comment une empoisonneuse au caractère bien trempé qui a liquidé ses précédents maris et amants va se laisser peu à peu persuader par un jeune prêtre séduisant d'aller avouer ses crimes.
L'histoire est assez peu crédible mais j'ai bien aimé la description des sentiments exaltés et le caractère de l'empoisonneuse. La chute est originale et imprévisible, mais un peu téléphonée quand même.

2) Le retour : 2/5
Sans doute la nouvelle qui m'a le moins touché. Un marin apprend pendant une traversée la mort de l'une de ses 4 filles mais il ne sait pas laquelle. S'ensuit un long moment d’introspection sur son désir d'être un meilleur père.
La réflexion n'est pas inintéressante mais je n'ai pas adhéré à l'histoire, d'autant plus que la chute est là encore vraiment téléphonée, c'est limite si l'auteur ne se fiche pas de nous!

3) Concerto à la mémoire d'un ange : 4,5/5
2 génies de la musique sont en concurrence, l'un n'est que douceur, l'autre esprit de compétition. A la suite d'un tragique accident, leurs caractères vont s'inverser et ils vont se retrouver des années plus tard.
Si les personnages sont vraiment trop caricaturaux et les bons sentiments un peu trop dégoulinants, j'ai trouvé l'histoire touchante et le dénouement (une fois n'est pas coutume!!) très à propos.

4) Un amour à l'Elysée : 3,5/5
La femme du Président en a marre de jouer la comédie d'un amour factice avec un mari qui la délaisse et la trompe. Elle va chercher à se venger.
Cette nouvelle m'a laissé un sentiment bizarre. On passe par toutes les étapes dans cette relation tumultueuse. La fin aurait pu prendre une tournure inverse, mais j'ai aimé l'orientation qu'E-E Schmitt lui avait donnée.

En conclusion, E-E Schmitt a fait du E-E Schmitt, c'est à dire des histoires pleines de bons sentiments, matinées avec un peu de philo de bazar, et sans véritable souci de crédibilité.
Ca se lit vite et bien, ça fait réfléchir (un peu) et je suis plutôt client même si les ficelles sont grosses!

Florian1981 - - 42 ans - 28 février 2012


L'aléa entre rédemption et vengeance 8 étoiles

Les êtres se négligent, se détestent, voire les deux. La rédemption l'emporte parfois sur l'instinct de vengeance ou d'égoïsme, pas toujours, et tout peut basculer très vite, dans un sens ou dans l'autre, tant la frontière est ténue et étanche, comme entre le bien et le mal.
Les cartes des frontières manichéennes sont aimablement rabattues, dans un style épuré, assez bien écrit, agréable, fort accessible, ce qui le rend grand public. Angélisme et cynisme, bons et mauvais sentiments alternent : l'auteur joue avec les hasards des vies qu'il crée.
Comme souvent chez cet auteur agréable, l'écriture et la réflexion sont grand public, intéressants et pédagogiques sans transcendance. L'ensemble mérite réflexion et approfondissement, et donne de plaisants moments de lecture.

Veneziano - Paris - 46 ans - 14 janvier 2012


Séduit dès les premières pages 8 étoiles

Séduit dès les premières pages, j'ai dévoré ce livre à la faveur d'un voyage en train qui ne m'a jamais paru aussi court.
La nouvelle est un art qui demande de la concision, quand on sort de Dan Brown ça nous change ! quitte à nous faire un petit déficit de crédibilité : un peu bizarre cette compétition sportive à l'issue d'un concert ou d'une audition d'artistes virtuoses ? un peu bizarre cette Marie " presque Besnard"? Un peu bizarre ce marin ? Crédible la vie à l'Elysée et l'allusion douteuse à Lady Di ? mais bon, je préfère considérer cet ensemble de nouvelles comme un conte philosophique, au diable le diplôme de crédibilité. Des destins exceptionnels et vrais, on n'en trouve que chez Pierre Bellemare voyons ! !
va pour 4 étoiles

Krapouto - Angouleme Charente - 79 ans - 18 novembre 2011


Sainte Rita, aide-moi ! 4 étoiles

Aucune inspiration pour critiquer ce livre. Je suis déçue par l'écriture, déçue par toutes les bonnes intentions qui le parsèment, déçue par le journal de l'auteur plein de prétention.
Au fait, pourquoi déçue ? Parce que j'ai eu la bêtise de penser qu'un prix littéraire (Goncourt de la nouvelle) pouvait être le gage de plus de créativité et d'originalité.

JEyre - Paris - 43 ans - 2 novembre 2011


Un divertissement 4 étoiles

J'ai aimé la nouvelle "L'empoisonneuse", et celle intitulée "Concerto à la mémoire d'un ange". Par contre le leitmotiv de sainte Rita ne m'a pas touchée, je pense que même sans cela les nouvelles auraient été agréables à lire.
J'ai apprécié le journal de l'écriture à la fin du recueil. Ca m'a un peu éclairée sur les choix de l'auteur, ses pensées.
Ce recueil a été pour moi un bon divertissement. Ceci dit, je préfère vraiment le livre "la rêveuse d'Ostende" ou encore "La part de l'autre".

Flo29 - - 52 ans - 19 septembre 2011


Une réussite 9 étoiles

Une réussite parce que les autres recueils de nouvelles m'avaient un peu déçue, surtout "la rêveuse d'Ostende".Mais là, c'est différent chaque nouvelle, bien construite, ne nous laisse jamais sur notre faim; c'est en fait un tout (avec le petit fil conducteur de Rita) proposant une réflexion sur la nature humaine, la repentance, la responsabilité envers les autres. Avec de l'humour et de l'esprit comme toujours. La nouvelle est un art difficile et E.E Schmitt y est de plus en plus à l'aise. Un bon moment.

Pieronnelle - Dans le nord et le sud...Belgique/France - 76 ans - 25 août 2010


si cela pouvait être vrai 7 étoiles

4 histoires courtes, directes sans fioritures sur la possibilité de se racheter d'actes ayant entrainé d'une manière volontaire ou pas des conséquences irréversibles pour autrui.

Comment notre manière d'agir, l'orientation que l'on donne à notre vie est influencée par notre passé et les évènements que l'on subit.

A lire et surtout à méditer.

Thierry13 - - 53 ans - 25 août 2010


Un très très très bon moment de lecture ! 10 étoiles

J'ai beaucoup aimé ce livre ! La lecture est fluide, les histoires sont très différentes et tellement semblables (comme l'explique EE Schmitt). Le format "nouvelles " est un de ceux que je préfère (Gavalda, Bradburry aussi), ces histoires courtes ne vous laissent jamais indemnes; elles frappent vite et bien! Ces nouvelles sont certes courtes et pourtant, on les connait bien ces personnages : on comprend tout d'eux en quelques lignes !
Le journal (en deuxième partie du livre) est une partie que j'adore : cela m'intéresse de savoir ce que pense un auteur sans se "cacher" derrière ses personnages : je suppose que cela n'est pas un exercice facile pour lui !
Mais voilà, il y a un bémol ! Le livre est trop "court" (!) et une seule journée en compagnie de ce livre, ce n'est pas assez !... Déception ! ...

Mandarine - - 52 ans - 20 août 2010


"Les fleurs en fonction du bouquet" 9 étoiles

C'est un bouquet original et dense que nous propose E-E Schmitt. Aucune de ses quatre nouvelles ne démérite dans cet ouvrage.
Tous les personnages vont être face à des choix fondamentaux dans leur existence, et devront ou non les assumer par la suite.
Un recueil philosophique qui nous renvoie à travers ses histoires si différentes à nos propres choix: "Descartes ou Spinoza?"

Plus que le côté philosophique que nous propose l'auteur dans ces notes d'écriture, c'est sa vision de la nouvelle qui m'a le plus interpellé.
Moi aussi, je considérais que la nouvelle était une genre mineur de la littérature."Réduire un récit à l'essentiel, éviter les péripéties inutiles, ramener une description à une suggestion, dégraisser l'écriture, exclure toute complaisance d'auteur, cela prend du temps, cela exige des heures d'analyse et de critique."
Vous avez changé ma vision du genre M. Schmitt.

Marvic - Normandie - 66 ans - 24 juillet 2010