Ermites dans la taïga de Vassili Peskov

Ermites dans la taïga de Vassili Peskov
( Taëǰnyj tupik)

Catégorie(s) : Littérature => Biographies, chroniques et correspondances , Littérature => Russe

Critiqué par Shan_Ze, le 3 mai 2010 (Lyon, Inscrite le 23 juillet 2004, 41 ans)
La note : 10 étoiles
Moyenne des notes : 10 étoiles (basée sur 9 avis)
Cote pondérée : 8 étoiles (262ème position).
Visites : 7 945 

Vie des Lykov

La vie surprenante d’une famille de vieux-croyants, les Lykov, vivant complètement coupée du monde dans la taïga sibérienne. Elle fut découverte par des géologues par hasard alors qu’ils établissaient une base non loin de là. L’histoire de cette famille, rapportée par le journaliste Vassili Peskov, est par certains côtés un documentaire captivant qui nous apprend l’existence de personnes dans des conditions de vie totalement improbables. On apprend pourquoi certains vieux-croyants se sont retrouvés dans cette situation, «loin du siècle» selon leurs termes, et comment ils acceptent leur sort comment celui voulu par Dieu.

J’ai découvert, étonnée, leur maison, leurs prières, leurs ustensiles, leurs plantations, leur vision du monde… Quelques photos permettent de se faire une idée de leur manière de vivre. On suit l’évolution de ces personnes avec l’arrivée des géologues qui vont leur apporter un peu de civilisation. Du moins, la part qu’ils acceptent, celle qui leur est « autorisée ». Je suis restée happée par leur histoire, essayant parfois d’imaginer certaines situations… A lire absolument.

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Les éditions

  • Ermites dans la taïga [Texte imprimé], récit Vassili Peskov trad. du russe par Yves Gauthier
    de Peskov, Vassili Gauthier, Yves (Traducteur)
    Actes Sud / Babel (Arles).
    ISBN : 9782742705467 ; 8,70 € ; 01/01/1999 ; 304 p. ; Poche
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Courage et résilience

9 étoiles

Critique de CC.RIDER (, Inscrit le 31 octobre 2005, 66 ans) - 5 septembre 2023

En 1978, dans les montagnes perdues du Khakaze, au fin fond de la taïga sibérienne et à 250 km du premier village, des géologues en mission découvrent les Lykov, une petite famille qui vit depuis plus de quarante ans totalement coupée du monde. Deux des quatre enfants n’ont jamais vu d’autres êtres humains que leurs parents et leurs aînés et ne connaissent le monde extérieur que par oui-dire. Karp Ossipovitch, l’ancien, le père de famille vit en compagnie de ses deux filles âgées d’une quarantaine d’années dans une cabane plus que rudimentaire avec de minuscules ouvertures et des murs noirs de suie et de crasse. Ses deux fils habitent à quelques kilomètres plus loin dans un abri encore plus misérable. Ils se consacrent à la chasse. La mère est décédée depuis plusieurs années. Tous sont vêtus de guenilles ou de chasubles faites de toile à sac rapiécée de partout. L’été, ils marchent pieds nus. L’hiver ils sont chaussés de bottines en écorce de bouleau. Ce sont de lointains descendants de Vieux-Croyants, persécutés depuis la réforme orthodoxe de 1666, menée par le patriarche Nikon, qui se sont enfoncés de plus en plus loin en Sibérie pour pouvoir vivre leur foi selon leurs anciennes traditions. Dans ces confins, ils ont pu trouver un peu de liberté jusqu’à ce que Staline, en 1945, envoie dans la région des militaires pourchasser les déserteurs. Pour leur échapper, les Lykov ont dû abandonner tout voisinage pour aller se terrer en un lieu où l’on ne peut accéder qu’en hélicoptère.
« Ermites de la taïga » est un récit, une sorte de reportage, relatant toutes les visites qu’un journaliste leur fit quand il découvrit le destin de ces malheureux qui bientôt se retrouvèrent à seulement deux, Karp et Agafia, la fille cadette, quand coup sur coup décédèrent l’autre fille et les deux fils suite à diverses maladies. Le lecteur ne peut que ressentir émotion et empathie quand il découvre les conditions de vie dantesques que ces « ermites » ont subi pendant si longtemps pour ne pas se retrouver dans un monde dont ils rejettent à peu près tout. Toute cette histoire qui ne manque pas de nouvelles épreuves, même après la découverte et en dépit de toute l’aide qu’ils reçoivent, se lit avec grand intérêt, un peu comme une parabole ou une allégorie qui pose toutes sortes d’interrogations existentielles. Jusqu’où peut mener l’extrémisme religieux ? Ne sommes-nous pas chacun l’extrémiste de quelqu’un ? Peut-on vraiment survivre en dehors de tout lien avec la société ? Quel est le véritable prix de la liberté ? Quelles sont les limites de l’autonomie ? Peut-on vraiment survivre complètement seul dans une nature sauvage ? Car tel est, au bout du compte, le destin de la pauvre Agafia. Une très belle histoire vraie, bien écrite, agréable à lire, qui est en même temps une magnifique leçon de vie, de courage et de résilience.

Tout ça pour un doigt ?

9 étoiles

Critique de Monocle (tournai, Inscrit le 19 février 2010, 64 ans) - 25 mars 2016

Sous le règne du tsar Alexis (17ème siècle), l'église décide de réaliser une re traduction de la bible et de modifier quelques rites. Cela engendrera un schisme appelé « raskol », par les vieux-croyants, c'est-à-dire « raskol nikonien ».
Un des point d'achoppement est le signe de croix à trois doigts (au lieu de deux) !
My god ! quelle affaire ! Dans ce pays glacé, de la taille d'un continent, où la lutte pour vivre se résume souvent à trouver de quoi manger, des gens en viennent à se disputer pour un doigt ! Non Daesh n'a rien inventé finalement)
Des familles fuiront les villes et iront se cacher dans l'immensité de la taïga pour créer des communautés et vivre ainsi leur foi.
Ermites dans la taïga de Vassili Perkov est un documentaire fichtrement bien construit sur l'une de ces familles, les Lykov.
Seuls, vraiment seuls ils finiront par s'éteindre par solitude. Leur précepte de fuir et craindre les hommes aura finalement eu raison d'eux.

Superbe livre, bien construit et très intéressant.

Emouvant

10 étoiles

Critique de Provisette1 (, Inscrite le 7 mai 2013, 12 ans) - 28 décembre 2013

Oui, une lecture où les protagonistes bien réels nous touchent par leur humanité, une intégrité sans limites.

Agafia, femme-enfant, m'a émue particulièrement par son incroyable volonté, sa force de caractère, son énergie malgré tous les aléas de leur vie d'ermite dans cet univers sauvage, presqu'ignoré mais, surtout, par cette stupéfiante naïveté, cette innocence qui va lui permettre, ainsi, de vivre ses découvertes du "siècle" comme de fabuleux trésors!

Pour autant, on ne peut faire l'impasse sur leur obscurantisme religieux, eux qui s'affirment comme "les seuls vrais chrétiens" en refusant d'entrer "dans le siècle" mais, ainsi que le souligne V.Peskov, " ce que le sort réserve à Agafia, fille de la taïga..., c'est une solitude qu'elle ne cherche pas à fuir. Elle ne le peut ni ne le veut.", aidée en cela par "sa prière à la chandelle", elle qui n'a de cesse de dire:"Je vivrai le temps qu'il plaira à Dieu.".

Surprenant, bien sûr, mais très émouvant.

" La vraie foi est dans la forêt "

10 étoiles

Critique de Hexagone (, Inscrit le 22 juillet 2006, 53 ans) - 24 août 2013

Merci à CL de m'avoir fait découvrir ce livre suite à un post sur Raymond Pin.
Incroyable, des Robinson en pleine taïga, retranchés, isolés au nom d'une foi de plusieurs siècles, ainsi les appelle-t-on les Vieux Croyants.
Le récit colle vraiment à cette vie frugale et austère hors du " Siècle ".
Imaginez la survie dans un milieu hostile, les hivers rigoureux, l'isolement, les bêtes sauvages, sans aucun instrument de la vie moderne.
Une Isba rudimentaire au cœur d'une montagne, les intempéries, la maladie et la vie qui ne s'articule qu'autour des travaux et de la Foi.
Car c'est bien de ça qu'il s'agit tout le long du livre, la foi dans ses décisions, dans le respect de ses engagements moraux, dans les rituels, et dans la religion.
Une Foi inébranlable que même les douceurs du Siècle découvertes lors de voyage d'agréments n'ont pas réussi à pervertir.
C'est un témoignage très puissant que l'histoire de cette famille sibérienne, on a vraiment du mal à y croire et pourtant.
Agafia doit encore être vivante car son père ayant vécu de façon similaire est mort à plus de 80 ans.
Félicitations à l'auteur qui a su retranscrire sans fioritures la vie de cette famille hors du siècle et hors de l'humanité.
Certains y trouveront une justification à leur idéaux, mais la vie doit vraiment être très difficile dans ces conditions plus que rustique où l'alimentation ne se fait qu'à base de pomme de terre cuite à l'eau, aux champignons sauvages, navets et carottes et cela pendant des années, parfois agrémenté de chasse et de pêche.
Une histoire humaine et religieuse incroyablement touchante.

Magnifique

10 étoiles

Critique de Rock30 (Nimes, Inscrit le 6 juillet 2008, 61 ans) - 16 novembre 2012

C’est d’une aventure humaine exceptionnelle dont il s’agit là, de la famille Likov, vieux croyants (schisme de l’église Orthodoxe apparu en 1653), vivants seuls au beau milieu de la Taïga désertique en ermites. Quand ces gens dont certains n’ont jamais vécu autrement et n’ont jamais connu le « monde », découvrent peu-à-peu la notion de pluralités de vies, alors s’ouvrent pour eux un autre avenir mais aussi la fin d’une vie simple, à la limite de la famine. Finalement, on sort de la lecture de ce livre, avec une grande tristesse quant à la fin inéluctable d’une telle existence. Difficile d’imaginer, réfugiés dans leur solitude, des hommes et des femmes qui de plus, de par leur croyance se privent de beaucoup de choses. Magnifique livre que je conseille car j’en suis ressorti grandi, comme chaque fois que l’aventure humaine est mise au premier plan.

Juste et touchant.

9 étoiles

Critique de Grégoire M (Grenoble, Inscrit le 20 septembre 2009, 49 ans) - 4 septembre 2012

Comme mes prédécesseurs, j'ai beaucoup apprécié ce documentaire qui trouve le ton juste, évitant condescendance ou angélisme. J'ai aussi apprécié qu'il ne se limite pas aux seuls exploits de survie de cette famille mais qu'il parvienne à un portrait sensible d'Agafia. La plus grande partie du livre est en effet l'histoire de la confrontation de la famille au monde moderne, cette confrontation révélant plus de choses sur ces personnages que les 40 ans d'isolement qui ont précédés.

Des vieux-croyants en Sibérie

9 étoiles

Critique de Saule (Bruxelles, Inscrit le 13 avril 2001, 59 ans) - 7 mars 2012

On peut dire que l'histoire des Lykov commença il y a trois siècle, lorsque le tsar Alexis et le patriarche Nikon modernisèrent quelque peu la religion orthodoxe. Cela causa un schisme profond dans la société russe, certains chrétiens refusant ce qui à nos yeux ne semblent être que des changements mineurs (par exemple, se signer avec trois doigts comme les grecs au lieu de deux). Ces "vieux-croyants", qui rejetèrent la réforme et considéraient le tsar comme l'anté-christ, fuirent le monde pour vivre à l'écart du siècle (siècle, dans le sens séculier), à la manière d'ermites et selon des principes religieux très stricts.

C'est par hasard qu'un groupe de géologues tomba en 1982 sur une famille de vieux croyants vivant dans une solitude absolue au milieu de la Taïga. Le contact établi, un journaliste leur rendit visite à plusieurs reprises, et raconte ce mode de vie stupéfiant au milieu de nulle part en Sibérie. Des membres de la famille sont mort de froids ou d'épuisement, mais aux dernières nouvelles la cadette Agafia habite toujours là-bas.

Ce récit incroyable est très intéressant et émouvant, il montre comment l'homme peut survivre dans des conditions extrêmes (en Sibérie, le climat est pour le moins rude) et "hors du siècle", selon des préceptes religieux d'une époque révolue.

Poignant et passionnant

10 étoiles

Critique de Paludo (Maine-et-Loire, Inscrite le 19 juillet 2011, 41 ans) - 17 août 2011

Personnellement, j'aime beaucoup la littérature qui touche à la Sibérie, cet espace me fascine. J'ai donc lu Ermites dans la Taïga qui vaut le voyage. Le récit se présente comme un témoignage de personnes ayant rencontré cette famille et c'est par les yeux de ces personnes que nous découvrons leur vie dans des conditions d'une dureté inimaginable.
J'ai particulièrement été impressionnée par l'histoire des grains de blé qu'il faut garder précieusement d'une année sur l'autre pour semer la nouvelle récolte. Toute la vie de la famille dépend donc de ces... dix-sept grains qui donneront une récolte utilisable... au bout de quatre ans ! Un livre à recommander à tous les amoureux de la Sibérie, de la Russie et aux admirateurs de l'ingéniosité humaine!

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