Toi et moi, it's complicated
de Dominic Bellavance

critiqué par Dirlandaise, le 10 juin 2010
(Québec - 69 ans)


La note:  étoiles
Un chassé-croisé virtuel périlleux
Dominic Bellavance est un jeune auteur québécois spécialisé dans le genre « Fantasy ». Il a d’ailleurs reçu le prix Aurora en 2006 pour son livre « Alégracia et le serpent d’argent ». Ce prix récompense le travail d'auteurs canadiens en science-fiction ou en fantastique.

L’action de ce roman se passe presque en totalité sur Facebook, un monde que l’auteur connaît très bien pour y passer beaucoup de temps selon la quatrième de couverture. Cela va jusqu’à nuire à sa production littéraire semble-t-il ce qui est dommage pour ses lecteurs présents et futurs. Donc, dans ce livre, nous suivons Daniel Perrault récemment diplômé en design de présentation, qui travaille dans un dépanneur pour gagner sa vie. Plutôt paumé, Daniel est un passionné d’internet et de ses réseaux sociaux, en particulier Facebook. En fait, le jeune homme est plus que passionné, il est littéralement dépendant et ne peut passer une seule journée, que dis-je, une seule heure sans visiter son compte Facebook et regarder son fil de nouvelles pour savoir ce qui se passe avec son groupe d’amis. Car Facebook constitue presque tout l’univers de Daniel, il y passe tout son temps et est donc resté en contact avec ses anciens amis de l’époque de ses études. Il entretient aussi des relations amoureuses plutôt orageuses sur ce réseau ce qui va lui attirer des ennuis dont il ne soupçonne pas encore la gravité. Car Facebook comporte bien des avantages mais aussi d’énormes risques dont entre autres l’usurpation d’identité et le piratage. La vie de Daniel va donc basculer complètement le jour où il réalisera que des âmes malveillantes se sont acharnées à le détruire virtuellement.

Manifestement, l’auteur connaît bien le monde de Facebook et ses multiples rouages et dangers. C’est un récit fort intéressant car il met en lumière l’importance que ces réseaux sociaux ont prise dans la vie des jeunes adultes, certains ne pouvant absolument plus s’en passer. Pour ceux qui ne connaissent pas Facebook, ce sera un peu plus ardu d’arriver à s’y retrouver dans toutes ces conversations et j’avoue que parfois, j’ai eu du mal à bien tout comprendre, n’étant pas une utilisatrice de ce réseau social. Mais ma curiosité ayant été éveillée, j’irai peut-être un peu musarder de ce côté afin d’en apprendre un peu plus.

Bref, c’est un roman tout à fait actuel sur la jeune génération et ses problèmes de communication. Un véritable chassé-croisé virtuel qui parfois peut s’avérer destructeur pour ceux qui s’y laissent prendre et entraîner. Il plaira aux amateurs de Facebook sans contredit.

« Daniel bondit. Son mal de tête revient l’attaquer en force. Il va se préparer un café instantané Maxwell House. La première cuillerée de granules bruns va dans sa tasse et l’autre, directement dans sa bouche. Ça réveille en maudit. Pour compléter le rituel, il répète l’opération avec le sucre, puis il fait descendre le motton avec un verre d’eau tiède. »

« Le cœur de Daniel pompe à cent milles à l’heure, mais, de l’extérieur, il ressemble à un junkie qui a passé quarante-huit heures sans dormir. Il s’observe dans le coin du miroir. Ses cernes sont aussi noirs que cette journée. — Baies shtroumpfantes mon cul ! Et dire qu’il est incapable de changer son statut pour partager sa misère avec le reste de l’univers. »
Haro sur facebook 5 étoiles

Facebook est au cœur de ce roman, qui traite d’un sujet tout à fait vierge. L’auteur relate comment des étudiants se sont servis de cette technologie pour tourmenter ceux qui se sont livrés à des privautés lors d’une surprise-partie du département du design du Cégep (lycée) de Sainte-Foye. Le héros, Daniel Perreault, goûte à leur médecine pour avoir roulé des pelles en état d’ébriété à une autre que son amie de cœur. Photos accusatrices à l’appui, le pauvre jeune homme se débat pour protéger sa vie privée.

Sous le couvercle de l’anonymat, les coups fumeux sont facilités par le Web. Sous cet angle, Dominic Bellavance exploite le monde cruel de la cybernétique, un outil apte à créer une assuétude chez les baudets qui recourent à facebook pour transmettre leurs messages empreints de véhémence ou de futilités, genre « Je déjeune ». Le roman véhicule l’esprit et le langage anglicisé et peu maîtrisé d’élèves tous logés à l’enseigne d’une culture technologique, dont ils se sont approprié les applications.

Les propos sont limités à l’horizontalité du quotidien débilitant de nanas chiantes et de jeunes misogynes pour qui les femmes ne sont que des « bitches juste bonnes à fourrer ». La vulgarité n’a pas soulevé de bashing dans les blogs. Au contraire, on a plutôt chillé en lisant cette œuvre réservée aux initiés du Web à cause de sa facture. Et le héros de recommander de se tenir loin de facebook pour ne pas être phagocytés par les femmes. J’entends des grincements de dents.

L’auteur pointe les effets pervers d’un médium aussi dangereux que le tabagisme. Mais son roman, réaliste, est loin de répondre au canon de l’art romanesque. En se contentant presque uniquement de transcrire la teneur des courriels (E-mails), il risque d’ennuyer le lecteur par son galimatias électronique. C’est loin des romans épistolaires peaufinés d’auteurs raffinés. Il reste tout même que cette œuvre réussit à mettre en relief le sort des victimes de la technologie à l’instar de Quinze minutes de Patrick Senécal, roman commenté sur ce site.

Libris québécis - Montréal - 82 ans - 10 mai 2013