Moi, Rigoberta Menchú
de Élisabeth Burgos, Rigoberta Menchú

critiqué par Oburoni, le 8 août 2010
(Waltham Cross - 41 ans)


La note:  étoiles
"Mon nom est Rigoberta Menchú. J'ai 23 ans. Ceci est mon témoignage."
Indienne Quiché ( l'un des peuples guatémaltèque descendants des Mayas ), Rigoberta Menchú est une femme remarquable dont le combat acharné pour les droits de son peuple est devenu tout un symbole qui lui a valu, entre autres, le prix Nobel de la paix en 1992.

En 1982, alors qu'elle est en exil, l'ethnologue Elisabeth Burgos l'accueille chez elle à Paris, pour l'interviewer en vue de publier sa biographie. "Moi, Rigoberta Menchú" est le produit de ces longs entretiens, où Rigoberta raconte sa vie, incroyable, en un récit poignant, douloureux mais aussi plein de force et d'espoir; un récit qui dit toute la souffrance des Indiens du continent sud américain.

En effet, si elle décrit fièrement le mode de vie, les traditions, rites et coutumes de son peuple, son témoignage est d'abord et avant tout une bombe politique, qui explose en plein à la figure de ceux qui ignoraient les problèmes confrontés par les Indiens du Guatemala -sa patrie-, problèmes qui peuvent aisément se calquer sur tout les peuples indigènes d'Amérique latine.

Pays divisés ethniquement et marqués par la mentalité coloniale, qui laisse des traces indélébiles, on découvre l'horreur de la discrimination, le mépris dont sont victimes les Indiens, exploités, forcés à de longues journées de travail harassant dans les "fincas" -ces propriétés immenses où l'on récolte sucre, coton ou café pour un salaire de misère. Les enfants travaillent aussi durement que les adultes, tombent malades facilement à cause des conditions de vie épouvantables ( Rigoberta perdra l'un de ses frères, mort de malnutrition ) et, inéduqués, n'ont guère d'échappatoire à une telle existence de forçât si ce n'est la prostitution ou travailler comme bonne-à-tout-faire pour d'arrogantes familles riches, traitant leur personnel indien pire que des chiens ( elle sait de quoi elle parle... ).

L'horreur n'épargne pourtant pas l'espoir.

Ne sachant ni lire ni écrire, ne parlant même pas espagnol, certains ont en effet encore assez de dignité et de courage pour s'élever et lutter. Elle nous parle alors des combats du CUC ( Comité Unidad Campesina / CUP -Comité d'Unité Paysanne ), premier mouvement à unir les Indiens dont les actions multiformes, allant de manifestations à la guérilla, serviront d'exemple et se répandront dans tout le pays. Ces actions entraineront aussi une répression sans pitié de la part du gouvernement et de l'armée, coupables de massacres, qui assassineront entre autres ses parents et l'un de ses frères, la poussant à la clandestinité puis l'exil.

Un récit puissant, révoltant, parfois insupportable à lire à cause des faits ignobles qui y sont racontés -le traitement des enfants, les scènes de torture...- mais qui constitue un témoignage important sur la vie des Indiens d'Amérique latine, raconté par une femme à la bravoure admirable.

A découvrir.