Un gentleman en Asie
de William Somerset Maugham

critiqué par Jefopera, le 15 août 2010
(Paris - 60 ans)


La note:  étoiles
En route avec Somerset
Entre l'automne 1922 et le printemps 1923, Somerset Maugham entreprend un long périple en Asie. D'abord la Birmanie, qu'il traverse à dos de poney, puis le Siam, la Cochinchine et l'Annam. Observateur malicieux, il consigne ses observations dans un journal de voyage décalé, plein d'humour et de surprises.

Son esprit dilettante et farceur lui fait toujours privilégier des anecdotes savoureuses et inattendues à des exposés descriptifs. Tout l'intéresse et l'amuse, les petites choses de la vie quotidienne, la personnalité des autochtones, les travers des européens exilés dont il dresse une savoureuse série de portraits. Pour notre plus grand bonheur.

La végétation luxuriante lui inspire des comparaisons inattendues : "les cocotiers aux cimes échevelées ressemblaient à de grands vieillards maigres arrachés à leur sieste". Quant aux feuilles basses d'un bananier, "jaunes, avachies et flasques", elles lui font penser à "de vieilles mégères contemplant avec une envie malveillante la beauté de la jeunesse". Il fallait y penser.

Délaissant la botanique, Somerset se lance un peu plus loin dans une méditation confuse sur le bouddhisme et l'impermanence des choses. Mais trop lucide pour ne pas être conscient des limites de sa dissertation métaphysique, il nous invente alors un conte oriental, avec des princesses, des perroquets, un rossignol, et c'est toujours aussi savoureux.

A Angkor, subitement, l'humour cède la place à la contemplation et la visite de ce site fabuleux inspire à Somerset ses pages les plus belles, les plus justes et les plus émouvantes. On referme alors le livre avec la même mélancolie que celle qui accompagna l'auteur lorsqu'il dut laisser derrière lui les temples khmers grandioses et mystérieux.