Fugue de Anne Delaflotte Mehdevi
Catégorie(s) : Littérature => Francophone
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Les enfants ou la vocation
Voilà un sujet comme les aiment les pasionaras des femmes en gestation, les fans de l'image idéalisée de la femme d'abord mère avec un grand M. Anne Delaflotte Mehdevi s'était d'abord attelée à un sujet splendide dans la Relieuse du gué (Gaïa, 2008), l'aventure d'une jeune femme qui se lance dans la reliure d'art après une carrière diplomatique prometteuse mais stérile, un livre absolument lumineux, drôle, sensible, bercé par des extraits du Cyrano de Bergerac de Rostand, un régal pur !
Dans Fugue, Mme Delaflotte semble perdre un peu de cette merveilleuse fluidité de style pour évoquer le dilemme de Clothilde, 33 ans, études supérieures, mari pilote de ligne, maison, jardin, bref une vie agréable et... quatre enfants.
Plus jeune, Clothilde avait conçu une certaine attirance pour les études musicales et le chant lyrique. Elle avait fait le choix d'y renoncer et de mettre au monde d'abord deux enfants. Après quoi elle en avait voulu un troisième, en accord avec son mari. Hélas, elle a des jumeaux et son amie Alix (sans enfant) lui reproche à demi-mots d'avoir abandonné sa vocation au profit d'une grande famille. Clothilde déprime tellement qu'à la faveur d'un incident mineur (la fugue toute innocente de sa fille Madeleine) elle perd la voix.
Clothilde songe d'abord consulter un psy, puis elle se dit que c'est l'occasion rêvée de reprendre des cours de chant, de s'immerger à nouveau dans les beautés de Haendel, Caldara et autres oratorios baroques. Si elle ne peut plus parler à ses enfants, elle retrouve une voix splendide auprès de sa prof de chant, un comble ! Les enfants, eux, en vrais petits philosophes, acceptent d'abord de communiquer avec leur mère via des petits mots et des dessins attendrissants. Mais la situation s'éternise et Clothilde se donne corps et âme à sa passion, oubliant jusqu'à l'existence de ses chers petits.
Voilà grosso modo le sujet. On peut s'émouvoir de cette démission maternelle, on peut aussi s'en indigner. Surtout si c'est aussi maladroitement écrit qu'ici, entre les objurgations du mari, de l'entourage et de l'amie devenue noeud-noeud quand elle s'écrie, la main sur le coeur : "Tu as tellement de chance d'avoir cet homme qui t'aime à tes côtés, ces enfants adorables... Ne boude pas cette chance... Cherche à te soigner. C'est fou, cette attitude. Je me dis qu'il aurait presque mieux valu que tu ne puisses pas chanter et que tu te concentres sur ta voix parlée !"
Mince alors ! On se croirait dans une sit-com américaine. On verrait presque Clothilde en robe fluide et son amie Alix en pantalon blanc et tunique fleurie, tâchant de ramener la follette dans le giron de son foyer. Ah oui, et il y a le mari, le pilote de ligne, absent cinq jours sur sept, séduisant et gagnant bien sa vie mais tout à fait infichu de ramener la brebis galeuse du baroque dans les verts pâturages de la maternité heureuse.
On a presque honte d'approuver Clothilde et j'ai presque honte de la trouver idiote. Il est évidemment question d'un personnage de fiction mais bien des femmes qui sont aussi mères se retrouveront, hélas, dans ce personnage qui n'a pas su choisir entre la maternité et la vocation...
Les éditions
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Fugue [Texte imprimé], roman Anne Delaflotte Mehdevi
de Delaflotte Mehdevi, Anne
Gaïa
ISBN : 9782847201741 ; 21,00 € ; 01/09/2010 ; 327 p. ; Broché
Les livres liés
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Les critiques éclairs (2)
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Un récit sur la passion
Critique de Flo29 (, Inscrite le 7 octobre 2009, 52 ans) - 18 juin 2015
J'ai apprécié le côté positif de l'histoire: pas de violence, pas de morts tragiques... Juste le quotidien et ce qu'on peut en faire. Un roman sur une passion, et à travers elle sur toutes les autres passions qui parviennent à égayer notre quotidien.
Muette et pourtant cantatrice
Critique de Ddh (Mouscron, Inscrit le 16 octobre 2005, 83 ans) - 12 novembre 2010
Anne Delaflotte Mehdevi avait ravi le lecteur avec son premier roman La relieuse du gué. Elle nous revient pour nous enchanter avec Fugue et sa passion pour la musique.
Madeleine s’est enfuie ; Clothilde, sa mère, court à sa recherche accompagnée de Beau, le chien fidèle de la maison. Elle crie son nom… la retrouve, mais perd sa voix : dysphonie spasmodique, tel est le diagnostic du phoniatre. En perdant sa voix, Clothilde a perdu aussi tous ses repères : elle ne revoit plus ses enfants et son mari comme avant ; elle se distancie par rapport à ses proches, elle se consacre à de nouveaux projets, elle se reconstruit peu à peu, mais différente. La musique l’aide grandement Elle ne parle pas mais, miracle, elle chante… et divinement bien. Cette passion la mène vers le professionnalisme en chant lyrique.
La progression du roman est linéaire mais avec quelques rebondissements pour relancer l’intérêt. Le lecteur appréhende mieux l’univers désespérant de ceux qui souffrent de mutisme.
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