Les quatre vérités
de David Lodge

critiqué par Stéphanie, le 1 mars 2002
(Chevreuse - 53 ans)


La note:  étoiles
Pas le bon choix...
Apparemment, je n'ai pas dû choisir le meilleur livre de David Lodge pour débuter la lecture de cet auteur. Il faut dire que cette « novella » - longue nouvelle - n’a pas suivi les chemins classiques de la création puisqu'elle est tirée de la pièce de théâtre écrite par David Lodge lui-même et qu’il a décidé de transformer en un court roman.
La construction du livre ressemble donc fort à une pièce de théâtre : 4 personnages, un seul décor, 3 actes. Des personnages, on ne connaît que ce qu’ils disent à travers leurs dialogues puisque comme au théâtre, on n’a pas connaissance de leurs pensées. Le sujet de la pièce, pardon, de la « novella », porte sur les relations d’amour et de haine entre les écrivains et les médias. A l'origine de l’histoire, se trouve Sam, scénariste, qui s'est fait méchamment épingler dans une des mordantes critiques de la journaliste Fanny Tarrant. Venu se lamenter chez ses amis Eleanor et Adrian, ex auteur reconnu puis oublié, Sam pousse Adrian à imaginer un piège destiné à Fanny Tarrant afin de se venger. Adrian, par jeu, conçoit donc l’idée d'accepter la proposition d'interview que lui avait faite la journaliste peu de temps auparavant et de profiter de cette entrevue pour lui-même interviewer Fanny Tarrant à son insu et lui rendre ainsi la monnaie de sa pièce. Bien entendu, les choses ne se passant jamais comme prévu, ce jeu va déraper et faire ressurgir un passé que personne n’aurait voulu voir réapparaître.
Que ceux qui avaient trouvé drôles les autres romans de David Lodge ne s'y trompent pas, ce livre ne fait pas rire, par contre le ton y est assez grinçant. David Lodge règlerait-il quelques comptes avec les journalistes ?
Ah ! les critiques assassines ! 8 étoiles

Un bon moment de lecture, le soir au coin du feu, quand la belle-mère papote avec sa fille. Ça ne demande aucun effort de concentration, c’est vite lu et c’est amusant. Ça se passe dans les milieux littéraires où sévit une journaliste, une charmante teigne ; elle est mauvaise et méchante mais tout le monde se précipite sur ses articles et ça fait des dégâts.

Je vois dans les critiques précédentes que la fin est souvent considérée comme géniale. Personnellement elle m’a déçu. J’ai l’impression que l’auteur a trouvé une espèce de « deus ex machina » pour en finir. Ce n’est pas trop gênant mais je m’attendais à mieux, c’était si bien parti.

Saint Jean-Baptiste - Ottignies - 88 ans - 10 novembre 2022


L'intervieweuse interviewée 6 étoiles

Après un premier roman réussi, Adrian n’a plus jamais connu le succès. Du coup, il a abandonné le roman, et s’est contenté de produire des anthologies. Avec son épouse Eleanor, il s’est retiré dans un petit cottage à la campagne non loin de l’aéroport de Gatwick. Arrive à l’improviste Sam, leur ami d’université, qui a mieux réussi dans la production de feuilletons télévisés. C’est à ce titre qu’il a été interviewé par Fanny Tarrant, jeune journaliste effrontée, qui a vite compris les failles du personnage. Particulièrement vexé par l'article que cela a donné dans un journal du dimanche, Sam veut tenter de se venger par l’entremise de son ami Adrian. Celui-ci devra se laisser interviewer à son tour. À cette occasion, il devra essayer de tirer les vers du nez de la journaliste pour avoir la matière d’un article féroce qu’il pourrait écrire ultérieurement. Mais rien ne va se passer comme prévu…
« Les quatre vérités » est un court roman ou une novella un peu longue (168 pages) tirée d’une pièce « The writing game » que l’auteur ne put produire que dans la région de Birmingham. Un procédé de recyclage plutôt inhabituel. L’inverse, l’adaptation au théâtre ou au cinéma, d’une œuvre littéraire étant nettement plus fréquente. Cette base scénique se sent tout au long de l’intrigue assez simplette mais avec une réelle unité de lieu, d’espace et de temps. Tout se passe dans le cottage d’Eleanor et Adrian. Les dialogues occupent la plus grande partie de la narration. David Lodge cesse dans cet ouvrage de fustiger le catholicisme pour s’intéresser au journalisme de scoop. Il en profite pour démonter cette nouvelle façon de procéder des interviewers faite d’insolence, de grossièreté, d’indiscrétions, d’agressivité pour ne pas dire de méchanceté pure. Pour gagner un brin de popularité, le pauvre auteur doit passer sous les fourches caudines d’une teigneuse par ailleurs assez fine mouche qui sait fort bien manipuler ses victimes. La fin, assez bien trouvée, un peu en forme de morale de fable, remet la balle au centre. Quant à l’humour dont l’auteur semblait si bien doté dans d’autres titres, il est assez peu présent dans celui-ci. Dommage.

CC.RIDER - - 66 ans - 25 mars 2020


Des trompettes de la renommée mal embouchées 7 étoiles

Un cottage près de Londres, un couple : Eléanor, céramiste et son époux Adrian, romancier qui a eu son heure de gloire, désormais en semi-retraite et qui découvre dans le journal du dimanche l'interview perfide qu'on a faite de de son vieil ami Samuel Sharp, un scénariste à succès.
Cet ami, ruminant sa vengeance à l'égard de la journaliste réputée pour ses propos fielleux, demande à Adrian d'accepter, pour la piéger, l'interview que celle-ci souhaite faire de lui, l'écrivain retiré du monde des lettres.

Dans ce petit jeu du chat et de la souris chacun passera alternativement du rôle de piégeur à celui de piégé jusqu'à ce qu'une panne d'essence vienne interrompre l'entretien et entraîne une succession de coups de théâtre faisant prendre à l'intrigue des pistes inattendues.

Un lieu unique, quatre personnages dont la vérité va surgir hors du masque des apparences, peu de passages de récit laissant toute la place à un ping pong verbal percutant : un exercice de style nouveau pour David Lodge qui signe ici la novellisation d'une de ses pièces à succès .

Dans ce roman de mœurs qui reste dans le sillon des œuvres précédentes, on retrouve le petit monde des universitaires écrivains mais il s'ouvre ici sur celui des scénaristes et aussi des journalistes capables en un seul article de faire ou de défaire la réputation et la carrière d'un auteur.

Un agréable moment de lecture, cependant un peu trop bref, à mon goût .

Alma - - - ans - 4 juin 2018


Une longue nouvelle sur les milieux littéraires et journalistiques 8 étoiles

Voici une longue nouvelle un peu à part dans l'oeuvre de Lodge qui m'a habitué à plus de "profondeur humoristique" dans ses romans, et à plus de connaissances culturelles dans ses essais. Nous sommes pourtant toujours dans le milieu littéraire si cher à Lodge, puisqu'il nous livre ici les interactions entre un écrivain et sa femme, une journaliste et un metteur en scène. Il s'agit d'une critique amère du journalisme, cette classe étant représentée par une jeune femme qui ne fait pas de cadeaux aux auteurs qu'elle interviewe. Il s'agit aussi d'une réflexion sur le dur métier d'écrivain et sur le besoin de reconnaissance qui va de pair nécessairement avec l'exercice de cette profession, quoi que les écrivains laissent entendre.
Cette nouvelle est construite à partir d'une pièce de théâtre dont Lodge est l'auteur, ce qui explique la quantité impressionnante de dialogues et l'absence de réel "style" dans l'écriture. La fin est juste parfaite et s'accorde parfaitement avec le début du récit.

C'est un petit livre sans prétention aucune mais qui aura sans doute le mérite d'abreuver ce qui ont déjà parcouru beaucoup d'ouvrages de Lodge.

Elya - Savoie - 34 ans - 6 mai 2012


L'arroseur arrosé 8 étoiles

J'ai pris énormément de plaisir à lire ce court roman de David Lodge, pas seulement parce qu'il dépeint avec férocité les travers de la renommée et de la médiatisation à outrance, mais aussi parce qu'il se joue habilement du procédé de l'arroseur arrosé. A la fin, tout le monde en est pour ses frais parce qu'un événement supplante tout le reste et ce qui a constitué la source de nombreuses tensions s'en trouve tout à coup relativisé, au point de faire rire le lecteur (qui souriait déjà pas mal depuis le début, moi en tout cas).
C'est écrit avec vivacité, ça reste en effet très théâtral mais sans jamais être trop scénique. Beaucoup de clichés dans ce texte de Lodge (ce que certains lui reprochent), mais l'auteur le sait et jongle avec le tout, il les malmène et arrive à rendre acide ce qui pouvait passer pour de la guimauve. Une lecture très plaisante!

Sahkti - Genève - 50 ans - 5 mars 2007


Un esprit très "british" 7 étoiles

David Lodge est un écrivain plutôt agréable à lire et ne manque pas d'humour et de sens de l'observation. Dans ce que j'ai lu de lui, je dirais quand même que ce sont "Changement de décor" et "Un tout petit monde" que j'ai préféré. Une observation du monde assez étroit des professeurs d'universités.

Jules - Bruxelles - 80 ans - 1 mars 2002