Purge de Sofi Oksanen

Purge de Sofi Oksanen
(Puhdistus)

Catégorie(s) : Littérature => Européenne non-francophone

Critiqué par Miette, le 14 octobre 2010 (Inscrite le 25 août 2010, 58 ans)
La note : 10 étoiles
Moyenne des notes : 7 étoiles (basée sur 27 avis)
Cote pondérée : 7 étoiles (1 026ème position).
Discussion(s) : 1 (Voir »)
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Un petit bijou

Histoire de l'Estonie à travers l'histoire d'une femme ou Histoire d'une femme à travers l'histoire de l'Estonie...
C'est tout simplement merveilleusement beau et bien traduit ! Soit, dur, mais beau...
Le passage de la rencontre avec Hans... : "... Aliide sut tout de suite qu'elle, l'homme ne la verrait jamais, ..."
Je ne dis rien de plus et vous laisse découvrir ce petit joyau !

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Une histoire estonnienne ingénieuse et émouvante

10 étoiles

Critique de Cédelor (Paris, Inscrit le 5 février 2010, 52 ans) - 13 septembre 2018

Lors d’une opération Cirul’livres dans mon quartier, je suis tombé sur ce livre, « Purge » de Sofi Oksanen. Tant le livre que l’auteur m’étaient inconnus. Après avoir lu la 4ème de couverture, je me suis dit que ça ne serait pas mal de le lire, surtout d’un auteur d’un pays exotique, l’Estonie ! Je l’ai donc pris et ramené à la maison.

Peut-être 1 an plus tard, je me suis enfin trouvé prêt à le lire ! Plusieurs fois j’ai voulu le lire, puis en ai toujours repoussé le moment, parce que j’avais toujours finalement choisi d’autres titres. J’avais peur en fait que « Purge » ne soit plutôt quelconque et que j’aurai de l’ennui à le lire.

Eh bien, j’avais tort ! Maintenant, que je l’ai fini, je peux vous dire que c’est un très très bon livre, un de ceux qui donne toujours envie de savoir la suite ! C’est vrai qu’au début, j’ai eu du mal à le démarrer, l’histoire telle qu’elle commençait me paraissait pesante, de même que son style. Puis petit à petit l’intérêt est monté, monté, et à la fin le livre était devenu passionnant !

Alors accrochez-vous et vous serez récompensé !

« Purge » raconte l’histoire d’Aliide et de Zara, dans l’Estonie de 1992, au moment où ce pays accédait à l’indépendance, en plein pérestroïka. L’occasion pour l’auteur de revisiter l’histoire récente de l’Estonie à travers les gens qui y vivent et y ont vécu, depuis l’époque de la dictature communiste à partir des années 30 jusqu’à l’indépendance chaotique de 1992 et l’essor du crime organisé, dont la vieille Aliide et la jeune Zara sont représentatives. L’une et l’autre ont vécu des traumatismes propres à leurs époques, qui se rejoignent en un continuum tragique.

Pas d’analyse sociologique ni historique dans ce roman, juste la force dégagée par les récits de la vie de ces femmes victimes de l’environnement social et politique dans lequel elles durent vivre et surtout survivre. Leur simple histoire de femmes meurtries et des complications tragiques et sordides qu’elles subirent est édifiante et en même temps révélatrice de ce que dut subir l’Estonie entière, l’emprise d’abord du totalitarisme soviétique, représentée par Aliide, puis de la montée en puissances des organisations mafieuses après la décomposition de l’URSS, montrée avec Zara.

Un récit intelligent et émouvant, à la construction ingénieuse, au ton souvent très cru. J’ai découvert ensuite qu’il avait remporté nombre de prix littéraires, dont le Femina étranger. Je ne suis pas du tout prix littéraires, n’écoutant que mon envie propre quant à mes choix de lecture, mais que Sofi Oksanen ait remporté des prix avec ce roman me semble tout à fait justifié.

Un roman coup de poing qui vaudrait honnêtement 4,5 et pas plus mais comme c’est un coup de cœur, je lui mets 5, pour le faire partager et connaître.

Destins de femmes en Estonie

6 étoiles

Critique de Psychééé (, Inscrite le 16 avril 2012, 36 ans) - 12 août 2015

Deux femmes estoniennes, Aliide et Zara, se rencontrent en 1992. La première a la soixantaine et raconte sa vie depuis les années 50 ; la seconde a une vingtaine d’années et est née en Russie ; elle est arrivée en Estonie par chance si l’on peut dire pour échapper à des mafieux russes. Sa rencontre avec Aliide n’est pas tout à fait fortuite, même si on peut y croire au début. Leur destin tragique permet de découvrir l’histoire de l’Estonie trop méconnue, les souffrances de ses habitants, le communisme, l’oppression, le mensonge et la peur au cœur de tout. Pas de discussion possible pour les dissidents, aussitôt maltraités ou envoyés en Sibérie.
Un ouvrage intéressant pour se rendre compte de cette époque sombre et violente vécue par les peuples baltes. Attention, âmes sensibles, les discours sont assez crus.

Un roman sombre et oppressant sur l'Estonie soviétique

6 étoiles

Critique de Pierre Ier de Serbie (, Inscrit le 9 janvier 2014, 50 ans) - 21 novembre 2014

Un beau matin, Aliide Truu une vieille fermière estonienne découvre une jeune femme prostrée devant chez elle. La fille s'appelle Zara Pekk, une prostituée russo-estonienne qui a fui des souteneurs russes particulièrement violents. Avec de nombreux flash-backs entre la seconde guerre mondiale, la période stalinienne, Sofi Oksanen nous raconte à travers l'histoire d'une famille déchirée l'histoire d'un pays mal connu en France. Il y a la violence du bolchevisme russe, l'écrasement des patriotes estoniens, le viol des femmes soupçonnées d'activités anti-soviétiques.

Je ne raconterai pas l’histoire qui est très sombre. le style m’a parfois fait penser à Agota Kristof (Le Grand cahier). Le problème avec la réalité oppressante c’est qu’elle devient vite très lourde pour le lecteur, surtout que les personnages manquent un peu d’épaisseur. Pas une seule lueur de joie dans cette obscurité. Les allers-retours entre les périodes déstabilisent la lecture, le rythme s’enlise un peu, la progression se ralentit alors que le début était très fort. Comme si l’auteur commençait, elle aussi, à se lasser de ses personnages.

La fin est assez étrange, ceci est accentué par une suite de rapports de police. On aurait aimé que quelque chose d'humain naisse entre ces deux femmes: une rédemption pour Aliide. Mais ce ne sera pas le cas. La fin de Hans est obscure. Cette obscurité se double d’un côté très statique puisque presque tout le roman se situe entre les murs de cette ferme estonienne, parfois même dans un cagibi. Tout cela accentue l’impression d’enfermement que ressent le lecteur.

Au final ce roman commence bien mais s’enferme vite dans une sorte de piège sombre et statique. Il présente malgré tout le grand intérêt de mieux nous faire comprendre ce qu’ont subi les peuples occupés par la Russie soviétique, l’écrasement systématique de leur nationalisme, de leur identité, la répression sans merci.

Pas vraiment emballé

6 étoiles

Critique de Pacmann (Tamise, Inscrit le 2 février 2012, 59 ans) - 7 novembre 2014

Encensé par bon nombre d’activistes sur CL, j’avoue ne pas vraiment avoir été séduit par ce livre qui m’a surtout surpris et désorienté par le choix continuel et sans logique apparente de passer d’une époque à l’autre. Il faut donc souvent s’accrocher pour rester concentré sur le fil du récit.

D’abord focalisé sur une "matrouchka" en fuite, le roman dévie sur l’histoire de personnages naviguant du début de la seconde guerre mondiale jusqu’à la fin du communisme en Estonie. L’auteur ne fait rien de particulier pour rendre ce thème passionnant et le relatif bon style d’écriture ne rattrape pas entièrement le manque d’intérêt du scénario.

Certes, on respire une certaine profondeur dans ce bouquin, mais j’avoue avoir tout de même dû souquer ferme pour le terminer.

En résumé, loin de vouloir dénigrer complètement ce livre en respectant la perception d’autres lecteurs, que ce soit dans la perspective de se détendre ou d’être capté par une lecture prenante, aucun des deux objectifs n’a pu être atteint dans mon chef.

Maitrise parfaite de l'histoire

10 étoiles

Critique de Fa (La Louvière, Inscrit le 9 décembre 2004, 49 ans) - 11 juin 2014

Le portrait saisissant de personnages complexes, qui aiment, haïssent, souffrent et surtout veulent vivre, avec parfois un passé lourd qui, comme les bienveillantes, vient voleter autour d'eux quitte à les rendre fous.

Une description de l'Estonie au sortir de l'URSS : sorte de nulle part, coincé entre la ferme, le champ et la forêt, le reste étant perçu comme un Enfer de Dante.

Une maîtrise parfaite de la narration, fragmentée en chapitres semés au gré des pages qui, petit à petit, nous font saisir la vie des différents personnages telle qu'elle s'est insérée dans la trame de l'Histoire avec un grand "H".

Voici ici les ingrédients d'une fiction réussie. Brillamment.

Les souffrances se lavent dans la mémoire !

8 étoiles

Critique de Frunny (PARIS, Inscrit le 28 décembre 2009, 59 ans) - 27 juillet 2013

De père finlandais et de mère estonienne, Sofi Oksanen est née (1977) et a passé sa jeunesse en Finlande. Son père, électricien, est finlandais et sa mère est ingénieur et a grandi en Estonie durant l'occupation soviétique avant d'émigrer en Finlande en 1970.
Son troisième roman, Puhdistus (Purge), a reçu de nombreux prix en Finlande et en France (dont le Prix Fémina Etranger 2010).

L'Histoire de l'Estonie moderne (1936-1992) au travers 2 femmes de générations différentes.
Aliide et Zara ont vécu les blessures et les humiliations d'une population écartelée par une Histoire des plus mouvante.
L'Estonie, à la croisée des chemins, à la situation géographique stratégique, frontière naturelle entre l'Europe capitaliste et le bloc soviétique communiste.
Entre fragile indépendance, domination de l'Allemagne nazi et joug soviétique, les positionnements individuels restent acrobatiques et lourds de conséquences.
L'auteure éclaire les travers d'un régime absurdement criminel. La dictature communiste qui détruit l'individu par la contrainte, la violence et la déportation.
Une vie de peur, de paranoïa, faite de petits arrangements pour survivre et sauver sa famille.
S.Oksanen entre dans la crudité des choses. Certaines scènes sont très dures (Tortures, viols, dénonciations arbitraires, ...).
La fragile et récente indépendance n'a pas réglé tous les problèmes. Les réseaux mafieux ont pris la place des milices. L'exploitation des femmes (prostitution organisée à grande échelle, ... ) reste un fléau. Une société qui continue de régler ses comptes avec les anciens "pro-russes".
Une transition qui se fera dans la souffrance et sur la durée.

Même si je n'ai pas appris grand chose sur la problématique du communisme soviétique et de ses ravages dans les nations annexées, l'éclairage sur l'Estonie reste très intéressant.
Un moment de lecture intense.

les murs ont des oreilles et les oreilles ont de jolies boucles d'oreilles..

6 étoiles

Critique de Ndeprez (, Inscrit le 22 décembre 2011, 48 ans) - 7 avril 2013

Une bien tragique histoire de femmes débutant à la fin de la seconde guerre mondiale.
Le récit transpire toute la rudesse mais aussi la fierté de ce peuple qui aura subi bien des occupations durant sa courte existence.
Ce livre ne m'a pas toutefois bouleversé , ayant trouvé les personnages assez peu attachants mais son éclairage sur l'occupation soviétique et son héritage mérite qu'il soit lu.

Tentacules politiques

6 étoiles

Critique de Aaro-Benjamin G. (Montréal, Inscrit le 11 décembre 2003, 55 ans) - 12 octobre 2012

La rencontre - vraisemblablement par hasard - de deux femmes - l’une âgée et l’autre jeune – dans la contrée estonienne est une excellente idée de départ. Le mystère plane. Graduellement, nous apprenons par bribes leurs histoires respectives et les liens qui les unissent à travers l’Histoire turbulente de cette région.

Par contre, l’ambition de l’auteur s’est avérée trop grande pour moi. Le mélange dense de politique, drame familial et thriller s’épaissit tellement au fil de pages qu’il devient un énorme labyrinthe.

Dans la version anglaise, la traduction m’a semblé mauvaise. À moins que ce soit le style de l’auteur ? Les phrases sont courtes et les scènes se terminent souvent en suspens. C’est le cas aussi pour le destin de nombreux personnages. Enfin, les sauts dans le temps récurrents engendrent de la répétition et une certaine confusion.

Sans contredit, un roman fascinant mais mal ficelé selon moi.


l'amour, la haine, l'occupation, la misère...

7 étoiles

Critique de Ellane92 (Boulogne-Billancourt, Inscrite le 26 avril 2012, 48 ans) - 29 août 2012

La vieille Aliide Truu prépare ses conserves au fin fond de la campagne estonienne. Quand vient la nuit, elle se barricade, tandis que les gamins et les voyous du village lancent des cailloux sur sa fenêtre en la traitant de « sale Russe ». Un matin, elle découvre une jeune femme couverte de crasse et d’ecchymoses dans son jardin. Aliide recueille ainsi une certaine Zara chez elle, qui dit avoir fui son mari après une violente dispute. Presque malgré elle, Aliide lave, nourrit et cache la jeune femme.
Commence alors pour nous la découverte de ces deux femmes que tout sépare et pourtant que beaucoup rapproche. On découvre ainsi la vie d’Aliide au temps de l’occupation soviétique communiste (après un bref temps d’occupation nazie), et le destin de Zara, qui a fui sa vie paisible de Vladivostok, entre une mère silencieuse et une grand-mère secrète, pour le miroir aux alouettes de l’argent vite gagné en Allemagne, tombant sans défense et sans s’y être préparée dans l’univers de la prostitution et de la misère.

De la façon dont je l’ai perçu, il s’agit avant tout d’histoires d’amour, inachevées, interrompues, trompeuses ou jamais consommées, avec en fond de toile la difficulté d’être une femme dans un monde en guerre, occupé, où les hommes usent et abusent les uns des autres, y compris et surtout des femmes. C’est l’histoire d’une femme qui aime à la déraison un homme qui en aime une autre et qui vit constamment dans la peur. Peur de ne pas être une femme estonienne comme il faut, peur de ne pas être aimée, peur d’être torturée, affamée... Peur également d’être face à son passé, à ses actions, à son histoire… Elle agit alors en réaction, tentant de vivre et de survivre dans cette Estonie qui ne sait plus vraiment qui elle est, ce qui est juste, ce qui est possible...
Difficile dans ce cadre de s’attacher au personnage d’Aliide, et pourtant, vieille et insignifiante, mais aussi froide et dure que le fer, je n’ai jamais éprouvé de haine ou de dégout à son égard. Elle est trop malheureuse, trop silencieuse pour ça, et puis, elle assume toujours et en tout temps ses actions ; son personnage m’inspire un certain respect. Tout au long de l’histoire, jeune et amoureuse ou vieille et seule mais semblant prête à affronter n’importe qui et n’importe quoi, elle vit avec ses peurs cachées en elle. Il y a beaucoup de pudeur lié à ce personnage, d’autant plus que son histoire est racontée tout en suggestions. L’auteure a en revanche fait le choix de raconter l’histoire de Zara avec des mots durs, réalistes, qu’il s’agisse de sa descente aux enfers, de sa fuite, ou de son espoir… J’ai trouvé ce décalage parfois difficile à supporter, l’histoire d’Aliide n’ayant rien à envier en terme de souffrance, humiliation ou violence à celle de Zara.
Dans les deux cas, ces femmes ont fait ce qui leur paraissaient le plus approprié à leur situation, dans les deux cas, elles ont fait de mauvais choix et sont tombées plus bas qu’elles n’étaient.

J’ai eu un peu de mal à entrer dans ce roman, qui malgré tout se laisse lire avec intérêt. La construction du livre, avec ses allers-retours incessants entre les histoires, les personnages et les époques, finit par devenir un peu lassante… Mais ce que je regrette vraiment, c’est qu’il n’y ait pas eu de réelle rencontre entre les deux personnages principaux : elles ne créent pas de liens, de passerelles entre elles, entre leurs histoires cruelles, sordides et misérabilistes vécues à 40 ans d’écart. Il n’y a pas de pardon, pas de rédemption chez Sofi Oksanen. Les responsabilités et culpabilités ne sont pas partagées, tout est blanc ou noir. C’est dommage.

Mitigée

7 étoiles

Critique de Sandie06 (, Inscrite le 20 mars 2012, 45 ans) - 20 mars 2012

J'ai acheté ce livre sans connaître le succès littéraire qui l'entourait. C'est donc vierge de préjugés (positifs ou négatifs) et sans attente particulière outre le résumé qui m'avait semblé intéressant que j'ai attaqué la lecture.

Historiquement, le roman vaut la peine d'être lu : on en apprend beaucoup sur les relations internationales de l'époque dans la zone URSS.
Le tour de force de faire s'attacher le lecteur au personnage d'Aliide, anti-héroïne par excellence, et également réussi. Jalouse, traitre, et j'en passe, nous l'excuserions presque en se disant "qu'aurais-je fait à sa place".
La dissymétrie entre la vie actuelle d'Aliide, faite de mise en bocaux dans la cuisine, et son passé moralement dérangeant est saisissante. La rencontre entre Zara, prostituée et esclave sexuelle, et cette vieille dame est également très contrastante.

Mais pour autant, le livre ne m'a pas non plus renversée, bouleversée. Je l'ai lu d'une traite mais sans grande conviction. En un mot, je n'est pas été transportée.

En conclusion, un livre intéressant à lire.

estonie

4 étoiles

Critique de Gardigor (callian, Inscrit le 27 avril 2011, 47 ans) - 20 octobre 2011

Cette véritable découverte de ce pays et surtout de son histoire à travers des destins tragiques est très bien écrite.
Je pense néanmoins que le livre commence à avoir du rythme sur sa deuxième moitié et j'ai eu du mal à vraiment vivre cette histoire, les personnages ne m'ont pas donné beaucoup d'émotion.


Glaçante Europe orientale

9 étoiles

Critique de Tistou (, Inscrit le 10 mai 2004, 68 ans) - 14 octobre 2011

Un séjour du côté de l’Europe dite « de l’Est » vous fait régulièrement cet effet : vous sentez que la vie s’y est arrêtée un moment, disons, qu’elle s’est figée. Et ça se sent encore. L’Estonie, enclavée dans la grande Russie, ex-domino de l’URSS, a ce malheur d’une trop grande proximité avec le « grand frère ». Quand, en plus, il a fallu essuyer, au mitan du XXème siècle, l’invasion – vécue au départ comme une libération – des Nazis, ça fait beaucoup pour des pays qu’on pourra qualifier de « martyrs ».
Sofi Oksanen est une jeune auteuse finlandaise, d’un peu plus de trente ans à cette date, aux racines en partie estonienne. « Purge » est son troisième roman, le premier traduit en français, et c’est peu de dire qu’il a fait un tabac, ici aussi, comme en Finlande, puisqu’il a reçu le Prix Femina Etranger en 2010.
Il est sombre, ce roman, comme l’histoire – et l’Histoire – qu’il nous conte. Comme si, au contact du mal et de ceux qui font le mal, on ne pouvait définitivement en sortir indemne ? A mes yeux, outre l’histoire particulière de ce petit bout de pays balte, cette contamination par le mal est le sujet du roman.
Il n’est pas forcément facile à lire dans la mesure où Sofi Oksanen a délibérément choisi d’en faire comme un kaléidoscope, éclatant des bouts de récit dans tous les coins, dans le style « tuez les tous, Dieu reconnaîtra les siens » !
Très fémino-centré également, ce roman. Les hommes n’y ont pas de beaux rôles … A vrai dire, y ont-ils réellement un autre rôle que celui de vecteurs du mal ? Toujours est-il qu’à travers l’histoire d’Aliide et de Zara, la vieille et la jeune, c’est tout le rouleau compresseur de l’Histoire passé sur l’Estonie qui nous est décrit. L’invasion allemande et la « libération » soviétique, puis l’occupation et la grande misère des jeunes femmes de l’est attirées par le miroir aux alouettes occidental de nos jours, finissant par exemple entre les griffes de proxénètes à Berlin ou ailleurs …
Aliide Truu a été ballotée par le contexte historique et affligée d’une vie sentimentale mal engagée dès le départ. Zara est tombée dans le piège. Mais il y davantage. Car en fait quelque chose les rapproche. Il n’y a pas de hasard en la matière et Sofi Oksanen nous distille les infos nécessaires au gré de son « kaléidoscope ».
De la belle ouvrage, un peu plombant quand même, à la hauteur d’un « Rapport de Brodeck » de Philippe Claudel.

« Quand ceux qui rentraient des camps arrivèrent et s'installèrent pour une nouvelle vie, elle les reconnut parmi les autres gens. Elle les reconnut à leur regard obscurci, le même qu'ils avaient tous, les jeunes comme les vieux. Elle les évitait dans la rue, de loin déjà elle les évitait, et elle avait peur avant même de tourner la tête. Elle avait peur avant même de tourner la tête. Elle avait peur avant même de réaliser que c'était l'odeur du camp qu'elle voyait dans leurs yeux. Elle était toujours dans leurs yeux, la conscience du camp. «

Des destins bouleversants

9 étoiles

Critique de Saule (Bruxelles, Inscrit le 13 avril 2001, 59 ans) - 10 octobre 2011

J'ai beaucoup aimé ce livre. En particulier, le destin de la jeune fille Zara est bouleversant et m'a remué. Peut-être, comme le dit Stavro, cette histoire des filles de l'est qu'on force à se prostituer a-t-elle été mieux racontée par d'autres ? Mais pour moi c'était nouveau.

Ca me fait penser à un film, "De battre mon coeur s'est arrêté", qui m'avait choqué. On y voyait des gens qui brutalisaient des émigrés pour les forcer à libérer des squats. Après le film, je m'étais dis que ça ne pouvait pas exister des gens aussi mauvais, qui usent de la violence de manière gratuite sans pitié. Dans ce roman, on voit le sort réservé à des femmes, les brutalités, et on hésite à croire que ça arrive vraiment. Malheureusement, si, certaines personnes sont des bêtes.

L'aspect historique est un peu anecdotique, mais quand même, on découvre un pays dont je ne connaissais que le nom. Un petit bémol pour la fin, fastidieuse, comme le mentionne d'ailleurs une critique. Mais heureusement ce ne sont que quelques pages qui ne gâchent pas le reste.

Deux destins tragiques

7 étoiles

Critique de Ichampas (Saint-Gille, Inscrite le 4 mars 2005, 60 ans) - 20 septembre 2011

Le destin de ces deux femmes qui a priori, dans un premier temps, rien ne les lie, est tragique. Nous découvrons que ce n’est pas le hasard qui les réunit. Les propos sont parfois violents mais sont nécessaires à la compréhension des situations vécues. La structure du roman est un peu complexe, était-elle nécessaire ? Certains lecteurs s’attendaient à découvrir l’Estonie, ce n’est pas le cas, le roman laisse tout simplement transparaitre l’ambiance régnant dans un pays de l’est avant et après l’effondrement du bloc soviétique.

Lecture poussive

4 étoiles

Critique de El grillo (val d'oise, Inscrit le 4 mai 2008, 50 ans) - 5 septembre 2011

A force d'entendre ou de lire du bien d'un roman, on fini sans doute par en attendre de trop. ça a été mon cas ici, sauf que j'en attendais pas grand chose, et pour ça, je n'ai pas été déçu finalement...
Certe, on en apprend de bonnes sur l'Estonie et ses rapports avec la Russie pendant et après guerre, mais cela ne m'a pas suffit à rendre cette lecture captivante, loin s'en faut. J'ai eu beaucoup de mal a rentrer en sympathie pour Zara, Aliide et consort, j'ai trouvé l'écriture banale. Donc hormis le dernier quart du livre où le rythme est plus enlevé, ce qui a éveillé je le reconnais mon intérêt, j'ai peiné à me mettre au lit le soir pour attaquer ma lecture, c'est jamais bon signe...

Le sang de l'histoire...

10 étoiles

Critique de Fleur783 (, Inscrite le 8 décembre 2005, 72 ans) - 22 mai 2011

Magnifique roman retraçant la quête incessante de la dignité.
Pureté de l'écriture, pudeur des sentiments....très fortes émotions.
Chef-d'oeuvre absolu !

Un récit éclaté

7 étoiles

Critique de Alma (, Inscrite le 22 novembre 2006, - ans) - 6 mai 2011

Les précédentes critiques ayant parfaitement présenté et analysé les différentes facettes du roman, je me contenterai de ne traduire ici que ma réaction de lectrice partagée entre intérêt et agacement.

Intérêt pour son contenu et pour sa portée ( il ne servirait à rien de reprendre les propos des autres CLiens et de les paraphraser) , intérêt pour les personnages, en particulier pour Allide dont l’auteur distille progressivement les secrets, personnage ambigu, dans le déni, porteuse d’une part d’obscurité. Rien de clair, de précis pour évoquer son passé, tout est dans le non-dit, le suggéré alors que pour relater le parcours de Zara, Sofi Oksanen adopte le ton cru du roman porno. On a alors l’impression d’être projeté dans un autre roman.

Agacement face à la construction de l’ouvrage, non à cause de l’alternance des chapitres datés , et aux aller et retour dans le temps auxquels le roman contemporain nous a depuis longtemps habitués, mais à cause de l’éparpillement des lettres de Hans, dont , pendant longtemps , on ne sait quel rapport il entretient avec l’intrigue ,et pourquoi ses lettres sont ainsi saupoudrées ; et à la fin du roman, à cause des compte-rendus des services secrets, censés conférer une forme d’authenticité à cette fiction romanesque mais dont la lecture est fastidieuse et dont le style administratif fait oublier que nous avons lu un roman.

J’ai souvent eu l’impression que Sofi Oksanen compliquait à dessein l’organisation et la lecture de son ouvrage.

Un beau livre, pourtant , puissant, présentant des enjeux familiaux et politiques , et qui ne laisse pas indifférent.


l'asservissement

10 étoiles

Critique de Cyclo (Bordeaux, Inscrit le 18 avril 2008, 78 ans) - 7 avril 2011

1992 : l'Estonie est redevenue indépendante. Terrée dans sa ferme, la vieille Aliide Truu, dont le mari était membre du parti communiste, est harcelée par de jeunes voyous dont elle redoute les violences. Sa fille Talvi vit en Finlande, et elle ne la voit pas souvent. Aussi, lorsqu'elle trouve dans son jardin une jeune femme en guenilles, Zara, apeurée et épuisée, "boueuse, loqueteuse et malpropre", couverte d'ecchymoses, elle hésite un moment à lui ouvrir sa porte, craignant qu'il ne s'agisse d'un artifice pour la voler. Elle la fait pourtant entrer dans sa maison, la soigne, lui fait prendre un bain, mais chacune reste sur ses gardes, avec ses propres inquiétudes. Mais peu à peu, les deux femmes vont apprendre à s'apprivoiser, la confiance s'installant lentement, au fil de la remontée de leurs souvenirs. Car Zara n'est pas arrivée ici par hasard... Elle est en effet la petite-nièce d'Aliide, qui ignorait son existence.
Après la chute de l'URSS, Zara a quitté Vladivostok pour l'Ouest où on lui a fait miroiter des gains faciles, mais elle y est piégée par la mafia de la prostitution. Aliide, de son côté, a subi les violences morales et physiques au moment des changements successifs de régimes dans les années 40 (en 1939 occupation par l'Armée rouge, puis en 1941 par les Allemands, en 1944 reprise par les Russes), et n'a dû son salut qu'à son mariage inespéré avec Martin Truu, elle qui était partie pour rester vieille fille. Elle est toujours restée amoureuse de son beau-frère, Hans Pekk, violemment anti-communiste, très lié aux Allemands, et qui a dû se cacher à partir de 1945. À défaut de trouver Hans, les autorités soviétiques déportent en Sibérie sa femme Ingel et sa fille Linda. Et Aliide continue à cacher Hans pendant plusieurs années.
Tout ce passé ressurgit entre les deux femmes, parce qu'elles ont été victimes d'humiliations sans nom (torture pour faire avouer à Aliide en 1945 où est Hans, viols et coups de la part des proxénètes pour Zara, attention, certains passages sont très noirs et crus, l'auteur ne nous cache rien de la violence des rapports de domination). Et qu'elles sont toujours dans la crainte : Aliide pour avoir été "complice" du régime (mais il y allait de sa survie), Zara parce qu'ayant assassiné un chef maffieux pour pouvoir s'échapper, se sait poursuivie ("Le temps était compté. Pacha et Lavrenti la retrouveraient, cela ne faisait aucun doute"). C'est ainsi que la cachette de Hans va de nouveau servir à dissimuler Zara à ses poursuivants cette fois.
Un roman fort sur la guerre des empires, les bassesses humaines, les purges et les déportations, les mensonges, les superstitions, l'effondrement du communisme, les traumatismes de toute sorte, l'illusion de l'émigration vers l'Occident, et aussi sur l'amour, et plus exactement sur la jalousie, car Aliide et Ingel ont aimé le même homme, Hans Pekk. Et, en fin de compte, un roman sur l'absence d'amour (on ne sait plus ce qu'aimer veut dire), sur un monde sans perspectives, où tout se tait. Un roman pas si facile à lire, car il est constitué de multiples retours en arrière, en un montage parallèle assez complexe. Une dernière partie éclaire d'un autre jour les données à partir de rapports des services secrets, sans dévoiler tous les mystères restants. Mais Purge est un livre passionnant, presque trop dense. L'auteur, dont le père est finlandais et la mère estonienne, a certainement construit le livre à partir de données précises. Enfin, c'est un roman sur les femmes, les hommes jouent un rôle secondaire, quoique presque toujours néfaste. Et un roman qui vérifie l'assertion "Les deux grandes métaphores du XXème siècle : le camp de concentration et la pornographie – toutes les deux sous l'angle de l'asservissement, de l'esclavage"
(Imre Kertész, Journal de galère) : oui, la déportation vers les camps comme la pornographie (ici le proxénétisme mafieux) sont asservissants.
Une carte et une chronologie de l'histoire de l'Estonie permettent de mieux se repérer dans l'espace et dans le temps, mais personnellement je n'ai pas eu à les utiliser, le roman se lit très bien sans ça.

C'est à la femme que l'homme a imposé le joug

7 étoiles

Critique de Silex (dole, Inscrit le 13 mars 2011, - ans) - 13 mars 2011

Dans la foulée de " Millenium" de plus en plus de romans nous parviennent des froides contrées scandinaves et " Purge" de Sofi Oksanen est probablement un des plus percutants et émouvants de ces dernières années. Ce roman publié en 2010 chez Stock est le troisième de ce jeune auteur finlandais et le premier traduit en français. Il a d’abord été un véritable phénomène en Finlande et il est actuellement traduit dans de nombreuses langues. Sofi Oksanen a 33 ans, un look de geisha gothique et une plume décapante.

Ce roman était au départ une pièce de théâtre. Il met en scène, en 1992, la rencontre de deux femmes: la vieille Aliide et la jeune Zara. Il se déroule en grande partie en Estonie, pays plus scandinave que balte, et il conte, à partir de leur rencontre, l’histoire de ces deux femmes qui ont traversé chacune l’histoire de l’URSS pour l’une puis de la nouvelle Russie pour l’autre. Cette rencontre n’est pas un hasard mais seule la plus jeune le sait.

Aliide termine sa vie terrée dans sa maison perdue dans un village estonien, la mémoire lourdement chargée de son histoire liée au destin de son pays: elle a connu le bruit des bottes, celles des rouges puis celles des nazis et à nouveau celles des rouges. Elle s’est accommodée comme elle pouvait du destin cruel et répétitif de ces petites républiques soviétiques satellites en se recroquevillant sur elle-même mais en vivant une tragique histoire d’amour. Le titre du roman " Purge" ne s’applique pas directement à elle mais elle a tenté de survivre au mieux dans cet enfer stalinien en tirant peut-être profit de l’histoire pour, telle une tragédienne, vivre cet amour qui n’était pas partagé. D’une façon empreinte d’une certaine malignité elle a utilisé les méthodes de l’époque pour faire disparaitre sa rivale et pouvoir avoir à elle et à sa façon l’homme qu’elle aime.

Zara, elle, est le fruit de ces purges et a connu le destin violent de ces pauvres filles piégées par le miroir aux alouettes de l’occident, pensant s’en sortir après avoir vendu son âme et son corps aux mafias russes ultra violentes nées après la chute de l’empire soviétique. Pour sauver sa vie et sa mémoire elle retrouve, au bout de tout, Aliide qui, elle, ne sait pas encore qui elle est.

Le roman est articulé autour d’un huis-clos entre ces deux femmes avec de multiples retours en arrière vers les périodes charnières de l’histoire contemporaine de l’Estonie. Les mots et les sentiments sont forts, violents parfois crus mais reflètent le climat dans lequel ces deux femmes ont vécu, à des périodes différentes, mais constamment sous le joug de la brutalité d'abord idéologique puis mafieuse. La lecture de ce livre est difficile en raison de ces flash-backs incessants ne respectant aucune chronologie particulière nous plongeant dans l’Estonie d’avant-guerre, puis d’après-guerre en passant par Vladivostok ou Berlin en 1991 pour nous ramener brutalement en pleine 2ème guerre mondiale ou dans l’URSS stalinienne de l’après-guerre. Nous suivons l’itinéraire des petits dignitaires communistes, des résistants de la forêt estonienne ou des mafieux trafiquants de femmes des années 90. L’homme est présenté de manière assez univoque dans toute sa violence et la femme dans sa triste condition, quelle que soit l’époque. Savoir que ce roman fut d’abord une pièce de théâtre mettant en scène la rencontre de ces deux femmes permet de suivre plus facilement le cheminement de l’auteur qui nous livre un véritable documentaire d’une précision inouïe sur ces pays si petits, si méconnus et pourtant si proches de nous. L’extrême minutie avec laquelle sont décrits chaque pièce de la maison d’Aliide, chaque repas ou décoction dont elle a le secret, chaque regard, chaque silence nous plonge souvent dans un profond sentiment de malaise propre à ces romans venus du froid dont nous n’avons pas l’habitude. Il s’agit d’un habile mélange entre cette littérature propre et les grands classique russes qui ont baigné la jeunesse de l’auteur. A ce moment de la critique littéraire il faut parler, une fois n’est pas coutume, de la traduction de ce roman écrit en finnois, langue improbable et mystérieuse, proche du hongrois, on se demande bien pourquoi!!!Le traducteur est Sébastien Cagnoli et son travail pour rendre au mieux l’atmosphère étouffante et tragique de cette oeuvre est absolument prodigieux permettant au lecteur francophone de pénétrer dans cette étrange histoire.

Beaucoup de critiques ont parlé de chef d’oeuvre ce qui semble exagéré à l’humble lecteur que je suis. Cependant, en tant qu’homme, on ne peut rester insensible à ces deux terribles vies de femmes symbole de celles de millions d’autres à travers le monde. Ce roman n’a pas véritablement de fin permettant de souhaiter une vie enfin digne à ces deux femmes.

L'enfer, d'est en ouest ...

9 étoiles

Critique de BMR & MAM (Paris, Inscrit le 27 avril 2007, 64 ans) - 23 février 2011

Prix Femina étranger, ce bouquin avait fait, à l'automne dernier, la Une de la rentrée littéraire et de nombreux blogs.
Il faut dire qu'avec Purge, la jeune finno-estonienne de 34 ans Sofi Oksanen a frappé fort.
Très fort, façon coup de poing.
Lors d'un voyage il y a quelques années à Riga et Talinn on avait été scotchés par l'étonnant musée, je cite, des occupations nazie et soviétique ... les habitants de ces pays baltes ont en effet un point de vue décapant sur ces deux grands bouleversements du XX° siècle. Pour eux les invasions allemandes et russes sont à mettre sur le même plan, bonnet blanc et blanc bonnet. Ils accueillirent à bras ouverts les nazis venus les délivrer des soviétiques, puis accueillirent de nouveau dans les mêmes bras, l'armée rouge en route pour Berlin. Ils s'en repentirent en attendant la chute du Mur.
Les baltes manquaient peut-être de discernement géopolitique mais surtout ils se trouvaient vraiment mal placés, juste là où il ne fallait pas et ils furent victimes du pacte germano-soviétique comme des accords de Yalta.

[...] - Roosevelt va venir !
- Roosevelt est mort.
- L'Ouest ne nous oubliera pas !
- Ils nous ont déjà oubliés. Ils ont gagné et oublié.

C'est sur ce fond historique que Sofi Oksanen peint sa toile.
En 1992, une vieille mamie estonienne fait ses conserves dans sa ferme des environs de Tallinn.
Un beau matin, elle découvre une jeune fille perdue dans sa cour.
Mais visiblement cette jeune fille paumée n'est pas arrivée là par hasard ...
Quel est est le lien qui unit ces deux générations ?
On le découvrira au fil de toute une série de flash-backs qui vont éclairer la vie de ces deux femmes.
Comme on l'évoquait plus haut, elles ont traversé (et subi) les grands bouleversements du siècle, non sans dommages.
Et Sofi Oksanen se charge de nous faire partager les souffrances de ces deux femmes détruites.
C'est un bouquin choc, dur, à ne pas mettre en toutes les mains. Ou plutôt si : à mettre entre toutes les mains, il faut lire cette histoire, il faut comprendre notre siècle.
Une histoire qui serait un peu la version estonienne des hommes qui n'aimaient pas les femmes ...
La jeune Zara revient d'un exil forcé à Vladivostok. Attirée par les lumières de l'ouest, elle est passée par la case bordel à Berlin avant d'atterrir dans la cour de la vieille Allide.
Mais la vieille Aliide n'a pas eu la vie beaucoup plus facile. Peut-être pire.
Et quel est donc le lien qui unit ces deux femmes, peut-être contre leur gré ?
On n'en dévoile pas plus, vous décrouvrirez toute l'histoire, toute l'Histoire, au fil des pages.
Au fil des chapitres sont égrénées les pages d'un vieux cahier mystérieux, découvert dans un placard de la ferme d'Allide.
Qui est ce Hans qui y était enfermé ? Combien de temps y est-il resté et pourquoi ?

[...] Elle ramena l'armoire devant la porte et alla nettoyer le sang sur le sol de la cuisine.

Un prénom par ici, une soeur par là, un mari à telle ou telle époque ... peu à peu Sofi Oksanen nous livre les pièces d'un terrible puzzle dont on se doute que l'image finale ne sera pas bien belle à regarder ...
On pourrait se croire parfois dans un polar mais on est vite rattrapé par l'Histoire et son cortège de malheurs. Des choses terribles capables de vous détruire une femme, une vie, une famille, ...
La vieille Aliide n'a plus qu'une idée dans sa pauvre tête : faire ses conserves et remplir sa cave ...
Ce bouquin, fort bien écrit, est l'occasion éprouvante mais idéale de découvrir ces petits pays méconnus malmenés par l'Histoire, notre Histoire commune.
Que cette terrible et sombre histoire ne vous empêche pas d'aller visiter Tallinn et surtout Riga : deux très belles capitales. Les allemands sont partis, les russes ... presque ... l'URSS avait mis en place un plan d'immigration massive, notamment en Estonie : aujourd'hui encore, près d'1/3 de la population est russophone. On se souvient peut-être des événements qui avaient agité ce pays il y a peu. C'était en 2007.

Une double épreuve...

8 étoiles

Critique de Isis (Chaville, Inscrite le 7 novembre 2010, 79 ans) - 18 janvier 2011

Voici un livre dont on ne sort pas indemne, tant il est éprouvant, à la fois par le fond de l'histoire racontée, que par la forme de la narration faite d'incessants flashbacks de l'après 91 aux années 30,40 et 50.
Petit à petit le puzzle familial et politique se reconstitue et le lecteur qui aura surmonté ces deux obstacles sera, certes, largement récompensé de sa persévérance.

Pas mal ou bien ?

8 étoiles

Critique de Senoufo (, Inscrit le 9 janvier 2009, 66 ans) - 21 novembre 2010

Je ne suis pas déçu pas ce roman.
Contrairement à d'autres, je ne m'attendais, ni ne souhaitais lire un livre pour découvrir l'Estonie. il y a des livres d'histoire et de géographie pour cela.
Contrairement à d'autres, j'ai l'impression que l'intrigue principale est autour cette vieille estonienne; l'histoire du destin de certaines filles de l'Est n'est là que pour faire se rencontrer les deux femmes, sinon comment auraient-elles pu le faire ?
Contrairement à d'autres, je ne sais pas si cette écrivaine finnoise visait particulièrement la rentrée littéraire en France ( Mais j'ai ma petite idée ...).

Que reste-t-il après cette lecture ?

Une certaine qualité d'écriture ( Que ceux qui n'aiment pas retournent lire Levy et Werber). Un découpage intéressant. On n'a qu'à imaginer l'histoire racontée de façon linéaire pour comprendre ce que cela apporte. Et puis l'histoire de cette femme, dont la jalousie, peut-être la haine et puis l'amour ont façonné la vie.

Prometteur, mais...

5 étoiles

Critique de Rouchka1344 (, Inscrite le 31 août 2009, 34 ans) - 6 novembre 2010

J'ai enfin fini le livre dont on parle pas mal depuis quelques temps. "Purge" commence bien, le début et l'histoire semblent vraiment prometteurs et intéressants. Pour une fois, on va nous parler d'un pays que je ne connais absolument pas : l'Estonie. Mais, c'est là que ça coince.

En effet, m'attendant à un livre parlant de l'Estonie et de son Histoire, j'ai vraiment été déçue par cette superficialité du contexte historique. A croire qu'Oksanen ne connaît pas très bien son sujet et n'a utilisé l'Estonie que comme décor de mise en scène pour placer l'histoire de son roman. Là-dessus, j'ai eu le sentiment de m'être fait avoir et qu'on m'ait prise pour une imbécile.
L'auteure nous donne, quand même, une carte qui m'a franchement bien aidée ainsi que quelques dates utiles mais incomplètes, comme si Oksanen nous disait "Débrouillez-vous avec ça, j'ai mon roman à finir".

Mise à part ce gros point noir de ce roman, l'histoire en elle-même n'est pas mauvaise, il y a de bonnes idées mais je le sentiment qu'Oksanen aurait pu creuser un peu plus ses personnages masculins et féminins (à part le personnage d'Aliide qui est bien). En fait, le tout manque de profondeur.

En tout cas, j'avais espéré un roman nous parlant d'un pays qui avait souffert, un pays qui avait perdu à de nombreuses reprises son identité. Au lieu de ça, Oksanen réaffirme les clichés que l'on peut avoir sur ces anciens pays de l'URSS (par exemple la prostitution). D'ailleurs on aurait pu me dire que le roman se passait en Biélorussie, je n'aurais pas vu la différence.

C'est un roman superficiel qui aurait pu être grandiose si il avait été plus creusé.

L'après guerre froide en images d'Epinal

3 étoiles

Critique de Stavroguine (Paris, Inscrit le 4 avril 2008, 40 ans) - 1 novembre 2010

On sent à la lecture de Purge que son auteur veut avant tout évoquer ses racines, comme un hommage à ses aïeux, surtout comme une de ces quêtes vers soi un peu trop à la mode et artificielles, comme si se rapprocher d’où l’on vient permettait de mieux entrevoir où l’on va. Ce chez-soi romantique, pour Sofi Oksanen, c’est l’Estonie de ses ancêtres ; mais la présentation qu’elle en fait, si elle a le mérite d’exister, n’en reste pas moins bien superficielle, tout juste quelques dates jetées en annexe comme un os à ronger et, pas plus évoquées qu’un élément de contexte quelconque, un arbre ou une rue dans le décors qui serviraient de cadre à l’action, les occupations successives de l’Allemagne nazie et de l’Union Soviétique. Si Oksanen nous fait découvrir l’Estonie, c’est donc véritablement au sens propre du terme et ces quelques rudiments, s’ils peuvent bien susciter une curiosité et pousser certains à se lancer dans des recherches plus avancées sur le sujet, ne contenteront vraiment que ceux qui ignoraient pour ainsi dire jusqu’à l’existence de ce pays dont l’avenir est pourtant commun au nôtre.

La seconde préoccupation de l’auteur, qu’elle développe dans ce cadre, c’est de raconter le destin tragique des filles de l’Est depuis plus de cinquante ans. Son premier sujet est à la fois le plus universel et le plus insignifiant : une simple rivalité amoureuse entre sœurs dont les conséquences, en plus d’être tragiques, nous rendront particulièrement antipathique un des personnages principaux du roman, entraînant un certain désintérêt quant à son sort. Un autre personnage, l’homme objet de ladite rivalité (voire, l'homme-objet tout court), semblera quant à lui remarquablement creux et insignifiant, ce qui semble être le lot de chacun des personnages masculins de ce roman, tous étrangement unidimensionnels. L’auteur se définit comme féministe et cela se ressent fortement dans sa plume. Il n’y a en soi aucun mal à cela et nombre d’auteurs talentueux partageaient des convictions similaires ou proches de celles d’Oksanen. Seulement, le sujet est ici mal traité et ne découle que sur une accumulation de clichés, ceci malgré tout le tragique des existences évoquées. La première de ces tragédies véritables jettera une jeune fille aux mains de la police soviétique avec le lot de détentions arbitraires, viols, exils forcés et déportations imposé par l’exercice, mais évoqué pourtant avec une pudeur bienvenue, laissant plus de place à d'éloquents non-dits qu’à un étalage de sévices à la fois répugnant et racoleur. Cette discrétion ne sera malheureusement pas de mise pour ce qui est de la seconde tragédie, celle de Zara, née à l’Est et leurrée, à la tombée du mur, par les sirènes de l’Ouest où elle finira prostituée et pourchassée par ses souteneurs, et dont le sort sera quant à lui narré à grand renfort de "bites", de partouzes et de clichés à caractère pornographique qui ponctuent le texte de manière bien trop récurrente. Outre ces choix narratifs contestables, un problème plus grand encore réside dans le fait que ce sujet a déjà maintes fois été abordé et de façon souvent plus convaincante, notamment au cinéma dans le poignant Lilja 4-ever ou plus récemment dans Les Promesses de l’ombre de Cronenberg.

Qu’y a-t-il donc à retenir de ce livre ? Une histoire qui aurait pu se révéler intéressante mais tellement mal traitée que tout ou presque se retourne contre elle, à commencer par cette construction en flashbacks qui, si elle constitue d’abord une accroche formidable, apparaît bien vite comme ce qu’elle est : un leurre narratif aussi superficiel que le reste du roman. Celui-ci, sous des airs prétentieux, se contente finalement de fournir au lecteur le minimum de ce qu’il est en droit d’attendre d’un auteur publié : une histoire pas trop mauvaise écrite sans faute d’orthographe. L’analyse psychologique des personnages et le développement du contexte historique, s'ils sont tous deux pourtant prometteurs sur le papier, se révéleront au-dessus des forces et des capacités de l'auteur dont les qualités d'analyse semblent par trop limitées pour fournir une oeuvre qui soit plus qu'un roman lambda de rentrée littéraire, formaté et destiné sans doute à glaner quelques prix, sans apparaître jamais à la hauteur des ambitions placées en lui. D'un point de vue commercial, on appelle une telle oeuvre un succès. Pour d'autres, c'est une déception.

Rouge et noir

9 étoiles

Critique de Marvic (Normandie, Inscrite le 23 novembre 2008, 66 ans) - 31 octobre 2010

Rouge: l'Histoire de ce pays qu'est l'Estonie, coincé entre l'Allemagne hitlérienne et l'Union Soviétique. Envahie tour à tour par les fascistes ou les communistes en quelques années.
Autant de violence, de peurs, de dictature sous les dominations russes ou allemandes. (Les grandes dates de cette nouvelle république sont rappelées à la fin du livre).
Encore une page d'histoire que je ne connaissais peu ou pas et que ce roman m'a permis de "rencontrer" de l'intérieur.

Noir: comme le destin des deux héroïnes.
Aliide était une jeune fille pendant la première guerre mondiale; amoureuse du mari de sa soeur, "pro-allemand", elle va pourtant se marier avec un communiste.
Zara, jeune fille élevée à l'Est, va vivre une tragédie en voulant devenir une fille de l'Ouest.

Une histoire douloureuse de trahison, de violence, de peur viscérale; Malgré la narration de scènes difficiles, on est accroché par la rencontre de ces deux femmes, par le voile levé doucement sur les secrets de ces vies martyrisées.
Difficile de passer à une autre lecture quand on ferme ce livre...

Les européens devraient apprendre à mieux connaître l'Estonie

9 étoiles

Critique de Tanneguy (Paris, Inscrit le 21 septembre 2006, 85 ans) - 30 octobre 2010

Et c'est probablement le but que s'est fixé la jeune romancière Sofi Oksanen. Elle le fait magistralement avec ce roman qui, par petites touches pleines de sensibilité, nous fait revivre l'histoire récente de ce pays martyrisé à plusieurs reprises, par les Russes, par les Allemands nazis, puis à nouveau par les Soviétiques, avant d'être livré à tous les excès du libéralisme débridé et mafieux.

Le récit commence par l'arrivée dramatique d'une jeune fille épuisée dans la cour de la ferme d'une vieille grand'mère peu disposée à accueilir cette épave pourchassée par des bandits assez effrayants ; d'autant qu'elle-même ne tient pas à ce qu'on découvre quelques épisodes peu glorieux de son existence. Pourtant la magie va opérer et elles vont s'apprivoiser mutuellement. Nous allons progressivement découvrir leurs secrets et en même temps nous familiariser avec l'histoire de l'Estonie.

Une écriture tout en nuances, un récit magistral heureusement éclairé par une carte de la zone et un rappel des dates principales de l'histoire officiel.

Encore bravo à Sofi Oksanen !

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  Bravo pour le prix ! 113 Tanneguy 28 juillet 2013 @ 11:58

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