Tout s'explique...

La Suède serait, dit-on, le pays le plus démocratique au monde (1)…

Or, pour bien comprendre la réalité culturelle et sociale de la Suède, petit pays réputé pour sa tolérance, son émancipation féminine et son bien-être social, rien de tel qu’une bonne lecture. Je vous propose le récent livre de Franck Favier dédié à Jean-Baptiste Bernadotte, maréchal d’empire devenu roi de Suède en 1818.

« Personne n’a fourni une carrière semblable à la mienne », affirmait-il en préambule de son testament. Né en 1763, petit-fils de tailleur, fils d’un modeste avoué, engagé volontaire dans l’armée royale à l’âge de dix-sept ans, élu sous-officier par ses pairs sous l’Ancien Régime, il sortit de sa condition sociale à la faveur des guerres de la Révolution et de l’Empire. Général dans la célèbre armée de Sambre-et-Meuse, puis dans l’armée d’Italie, ambassadeur à Vienne, ministre de la Guerre sous le Directoire, il fut lié au clan Bonaparte après son mariage avec Désirée Clary, belle-sœur de Joseph et ancienne fiancée de Napoléon. Malgré ses relations souvent tendues avec celui-ci, il fut promu maréchal d’Empire en 1804 et nommé prince de Ponte-Corvo en 1806. En disgrâce après la bataille de Wagram, son élection comme prince royal de Suède en 1810 changea le cours de sa destinée. Devenu suédois, il combattit contre la France en 1813-1814. En 1818 il devint roi de Suède sous le nom de Charles XIV Jean et roi de Norvège sous celui de Charles III Jean. Sa fantastique ascension a nourri de nombreux débats depuis deux siècles. En Suède, son règne inaugura une ère de prospérité et de progrès social.

On savait que la Suède misa très tôt sur l’accès à la culture, notamment, grâce à l’église luthérienne qui créa de nombreux cercles de lecture féminine dès le XVIIème siècle. Le livre de Franck Favier a le mérite de souligner l’implication précoce de l’ancien maréchal dans des domaines clés tels que l’hygiénisme - lutte contre l’alcoolisme -, la santé publique - généralisation de la vaccination en 1812… - et l’éducation : on l’ignore plus ou moins mais le gouvernement suédois sut créer des écoles techniques dès 1826 avant de rendre l’école primaire obligatoire en 1842 : « chaque paroisse devait avoir une école et un instituteur rémunéré par un salaire minimum fixé par la loi. Le succès fut rapide puisqu’en 1850, seuls 10 % des Suédois âgés de plus de 10 ans ne savaient ni lire, ni écrire… » Autant « d’investissements immatériels » ayant permis au petit pays de deux millions d’âmes de conquérir une longueur d’avance sur les autres nations européennes.

Au-delà, qui fut Bernadotte ? Un simple avant-gardiste pétri d’idées nouvelles ? Un libéral convaincu ou un précurseur de la social-démocratie, un administrateur intègre ou un « monarque républicain » ? Ce livre ne se limite pas à répondre à ces questions de façon précise : il éclaire aussi l’actualité en offrant d’excellentes clés de compréhension.

Simple question d’après lecture : et si l’avenir appartenait aux peuples pédagogues ?



(1) avec un indice de « taux démocratique » culminant à 9,88/10 en 2008 selon l’hebdomadaire anglais The Economist ; à comparer avec les 8,07 de la France, classée 24 ème derrière l’Uruguay…

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  Bernadotte [Texte imprimé], un maréchal d'Empire sur le trône de Suède Franck Favier préface de Jean Tulard

  de Favier, Franck
  Ellipses / Collection dirigée par Jacqueline Lalouette
  ISBN : 9782729861223 ; 56,98 € ; 15/09/2010 ; 408 p. ; Broché

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