Questions à mon père
de Éric Fottorino

critiqué par Marvic, le 22 novembre 2010
(Normandie - 66 ans)


La note:  étoiles
« On peut aimer plusieurs pères »
Éric Fottorino nous emmène cette fois ci à la rencontre de son père « inconnu », son père biologique qu'il a ignoré pendant plus de trente ans avant d'aller à sa rencontre.
Arrivé à la cinquantaine - « le moment était venu de faire des additions »-, plus sage, il revient sur une partie occultée de sa vie: son père biologique.

Ce père Maurice Maman (prononcer « mamane comme gitane ou frangipane »), il va enfin pouvoir le rencontrer, l'écouter lui parler, alors que ce dernier est atteint d'une maladie orpheline incurable.
Il va pouvoir enfin devenir ce « fils du bout de la route … le fils de la fin ».
Seront donc évoquées en parallèle la vie des ces deux hommes qui co-existaient sans se (re-)connaître.

La mort de son père adoptif, Michel Fottorino a peut-être permis à son fils de s'autoriser à aimer son père biologique.

C'est par courrier électronique que E.F va rattraper le temps perdu.
Chaque soir, le fils enverra ses questions et chaque matin, il recevra des réponses.
« J'ai voulu croire à la puissance des mots contre la mort... à la vertu vitale de la procédure. Des hommes meurent sitôt que s'achève une longue procédure. Alors, il faut la faire durer. »
À sa première question sur la signification d'être juif, son père lui répondra: « être juif, c'est avoir peur ».
E.F va enfin entendre les raisons de l'absence de son père à sa naissance.
Il va découvrir la vie de ce gynécologue accoucheur réputé malgré une première rencontre à l'âge de 17 ans particulièrement décevante.

Il fera connaissance avec son père , bien sûr, mais aussi avec tout un arbre généalogique, et particulièrement des grands-parents, qu'il n'aura jamais vus, mais qui l'écoutaient lors de ses passages radios ou télé.

Et puis, il va découvrir le judaïsme et ses complexités, la difficulté d'être un juif arabe au Maroc , puis en France, bien loin des idées que l'enfant s'était faites.
Un roman superbe de pudeur, de sensibilité, d'amour, de tendresse, de jeux doux sur les mots, et surtout de poésie.
Intimité 6 étoiles

Eric Fottorino a eu deux pères, mais jusqu’à l’âge de dix-sept ans il n’en a connu qu’un : Michel, le père adoptif qui lui a donné son nom et tout son amour. Quant à son père biologique, Maurice, c’est donc à l’âge de dix-sept ans qu’il fait sa connaissance pour la première fois. Maurice s’appelle Maman, et Eric est incapable de l’appeler papa.

Car le jeune homme est en colère contre ce père inconnu qui abandonna sa mère en pleine détresse, et lui par la même occasion. Et il lui sera bien difficile et bien long de tisser des liens avec ce géniteur dont il sait juste qu’il est marocain et obstétricien. Il faudra en fait la mort du père adoptif tant aimé, et la maladie du père biologique, pour que le fils pose enfin, par mail, toutes les questions qu’il se pose. Parce qu’il sait que le temps presse. Et Maurice, qui le sait aussi, lui apporte sincèrement toutes les réponses.

Alors Eric découvre la vérité sur ses origines et les raisons de son enfance sans père. Des raisons qui ont trait à la religion et qui sont bien loin de ce qu’il avait imaginé. Il apprend l’histoire de sa famille, fait la connaissance d’une tante, d’un cousin. Et cet apprentissage est l’objet de ce roman poétique et d’une grande sensibilité. Au fil des réponses de Maurice, Eric se connaît de mieux en mieux et s’apaise. Son histoire se met en place comme les pièces d’un puzzle, offrant au lecteur ce qu’il peut y avoir de plus intime chez l’auteur.

Et c’est peut-être ce qui a fini par me gêner, cette sensation de violer l’intimité d’un inconnu, qui m’était pourtant offerte. Ce n’est pas la première fois que je ressens cela, face à une lecture qui expose à coeur ouvert une histoire personnelle. Et où je finis par avoir l’impression d’être entrée par effraction dans un intérieur où j’étais invitée, au point de me donner envie de ressortir avant de connaître la fin de l’histoire. Mais même si j’ai été tentée de refermer le livre à plusieurs reprises, je n’ai malgré tout pas clos la porte avant le dénouement de cet apprivoisement père-fils, sensible sans doute à la grande poésie de cette belle histoire d’amour.

Aliénor - - 56 ans - 1 mai 2012


Auto-analyse 8 étoiles

L'aboutissement du long et douloureux chemin suivi par l'auteur qui, après avoir écrit «l'homme qui m'aimait tout bas» en l'honneur de son père adoptif qui lui avait donné son nom, s'autorise enfin à renouer avec son véritable géniteur dont il s'est toujours cru abandonné et à approfondir ses racines. Un témoignage profondément sincère et intimiste sur les ravages des non dits et l'apaisement d'une réconciliation, serait-elle tardive.

Isis - Chaville - 79 ans - 24 novembre 2010