L'empire barbare, Tome 1 : Thorn le prédateur
de Gary Jennings

critiqué par Hamilcar, le 31 janvier 2011
(PARIS - 69 ans)


La note:  étoiles
Empirique
Nous sommes au 5ème siècle. Des hordes de Huns ravagent l’occident, les empires romains d’Orient et d’Occident se maintiennent tant que faire se peut, les peuples barbares inondent de leurs ravages la vieille Europe en devenir. Le tableau est rapidement brossé ; il s’agit d’une période de l’histoire où les civilisations se construisent par ce qu’elles ont de cruauté, où l’étranger doit être tué pour se préserver soi même. Un monde d’intolérance à l’état pur qui ne supporte aucune différence.
Or, notre héros est un véritable étranger par rapport à tout ce qui l’entoure. Mi homme, mi femme, il est rejeté dès sa naissance et ne connaît pas son ascendance. Sa bisexualité évidente, incarnée par une anomalie physique incontestable (il est doté des deux sexes) font de lui un paria naturel.
Thorn, (c’est son nom), devient Véleda comme il lui convient. Pris en charge dès son plus jeune âge dans un monastère, il y sera violé par un prêtre sodomite pour être ensuite transféré dans un couvent quand on s’apercevra qu’en fait il est plutôt féminin. Oser imaginer ce point de départ déconcerte. Il faut pourtant tout le talent de Gary Jennings pour que le personnage, plus on avance dans le livre, devienne de plus en plus crédible, ce qui n’était pas gagné d’avance .
Car il s’agit d’un véritable récit historique plein d’érudition, l’auteur calquant son histoire picaresque sur des faits avérés. Et on se retrouve vite aspiré par l’histoire, et l’on consent à accepter ce personnage ambigu pour finalement l’accréditer de la stature imposante de héros mythique. Thor est un barbare, un vrai. Mais Thor possède aussi l’intelligence et la sensibilité qui le dissocient des peuplades hirsutes qu’il finit par combattre. Thor/Véleda nous associe facilement à l’aventure et nous fait (font) oublier rapidement l’a priori du départ.
De la belle écriture, fluide et limpide, dont on se délecte sans demander son reste. L’histoire nous transporte indubitablement et l’on a du mal à refermer le livre. Thor est un guerrier ostrogoth, un « raptor », comme l’aigle, son « juika-bloth », qui l’accompagne au combat. Son chemin, de Burgondie à Constantinople, semé de personnages étonnants, le vieux Wyrd en tête, nous mène à la rencontre de Théodoric, roi des Ostrogoths et tombeur d'Odoacre, empereur de Rome. Mais la quête est semée d’embûches.
Véleda lui vient en secours lorsqu’il le faut. L’épée serpent de notre goth lui suffit pour massacrer son monde. Personnalité duelle, on retient de Thor le combattant, celui des batailles toujours cruelles, comme celui (celle) de l’intime féminin qui n’a rien à envier à notre barbare en conquête.
Le personnage est un étranger, un « barbare » dans tous les sens du terme. La toile de fond, les invasions barbares, est en fait le fil rouge du roman. Une épopée dont les personnages pourraient être de fantaisie, mais sans jamais tomber dans l’extrême de la caricature. Tant ils nous captivent, ils en deviennent quasiment réels.
Mais la véritable force du roman, au-delà du fait qu’il nous passionne, est la rigueur que s’impose l’auteur à décrire, expliquer, jusqu’à nous initier à la « vieille langue », aux consonances linguistiques, aux vocabulaires empruntés. On y croit.
Au fait. Ce livre est une autobiographie. Celle de Thorn le raptor. Gary Jennings pourrait nous le jurer, l’auteur c’est Thorn, et on y croit toujours.
J’ai maintenant hâte de lire le second tome et dévorer ensuite Aztéca et Marco Polo, d’un des meilleurs auteurs de romans historiques que je connaisse, Gary Jennings.
On s'y croierait 8 étoiles

Dans ce premier roman, Jennings nous fait voyager dans l'empire romain, composé de multiples peuples.
Au début du roman, Thorn a 12 ans et est un jeune moine plutôt instruit. A la découverte de son hermaphrodisme, il est banni du monastère et va devoir fuir. Pensant avoir des racines ostrogothes, il va voyager pour rejoindre son peuple. Il s'agit surtout de ce périple qui est raconté dans ce premier tome.
Jennings fait ici preuve d'une grande documentation sur l'époque. Les faits historiques relatés ont l'air vrais (je ne suis pas spécialiste, mais les quelques recherches que j'ai pu faire sur internet confirment l'histoire), et le récit est truffé de langue goth, rendant le tout très réaliste. Le lecteur a vite fait de plonger dans l'ambiance de l'époque. Tout comme dans Azteca, Jennings n'a pas peur de décrire des scènes très crues, parfois peut être un peu trop.
Dans l'ensemble, c'est un roman vraiment très intéressant et malgré son épaisseur, qui se dévore en peu de temps.

PA57 - - 41 ans - 17 août 2012