La débauche
de Daniel Pennac (Scénario), Jacques Tardi (Dessin)

critiqué par Jean Loup, le 10 avril 2002
(Vaulx en Velin - 51 ans)


La note:  étoiles
Rencontre au sommet qui tourne un peu court
Malgré le titre, ne vous attendez pas à une excursion de Tardi dans le domaine de l'érotisme ou de la luxure ! La débauche dont il est question dans le scénario de Pennac, c'est cette sale petite chose qu'on minimise en cette période de récente - et déjà essoufflée - reprise économique, mais que Michael Moore a bien fustigée au cinéma ("The big one", un chef d'oeuvre). On tourne autour du thème du dégraissage salarial, de la débauche des employés, des puissants qui virent les petits pour s'en mettre toujours plus dans les poches. Sujet alléchant, engagé et peu traité en bande dessinée à ce jour.
Oui mais voilà : cet album ne tient pas ses promesses. Pennac est pourtant un romancier de grand, grand talent. (Re)lisez "La fée carabine" ou "La petite marchande de prose" si vous avez des doutes. Tardi, lui, est un des piliers de la BD contemporaine, au style aussi inimitable que maîtrisé. Je les adore tous deux séparément. Mais ensemble, à mon grand dam, aucun ne semble tirer son épingle du jeu. La peur du talent de l'autre, peut-être. Il y a tout de même de bonnes choses dans le scénario, mais la mayonnaise ne prend pas véritablement. On referme "La débauche" avec un vague sentiment de frustration. Ce n'est pas mauvais, non non. Mais ça n'a rien d'exceptionnel. Et c'est bien pour cela qu'on est déçu par cette rencontre dont on attendait tant.
Entre légèreté et gravité 7 étoiles

Cette BD commence très fort avec ce chômeur qui exhibe sa détresse dans une cage du parc zoologique. Tous les médias s'emparent illico presto de ce nouveau phénomène, symbole du mondialisme à outrance, des délocalisations à la chaîne et victime de DRH un peu trop zélés. L'homme attire les foules jusqu'au jour où on le retrouve pendu. Suicide ou meurtre? A vous de le découvrir dans cette BD signée du duo Pennac et Tardi. J'ai relu récemment cette BD qui m'avait laissé à l'époque de sa sortie un excellent souvenir. Mais, je dois avouer que j'y ai pris un peu moins de plaisir. Pas à cause du dessin de Tardi, dont quelques personnages valent encore le détour. Mais peut-être à cause de cette dénonciation un brin naïve, me semble-t-il, de notre société actuelle. L'histoire en elle-même est assez drôle, avec ses personnages truculents, alors qu'elle vise pourtant à dénoncer des travers de notre temps. Est-ce ce mélange des genres qui m'a dérangé lors de cette énième lecture? Impossible à dire... Il est vrai également qu'en dix ans, les multinationales sont entretemps encore passées à la vitesse supérieure... Rien ne semble avoir changé depuis...

Nothingman - Marche-en- Famenne - 44 ans - 5 janvier 2011