Nord
de Frederick Busch

critiqué par BMR & MAM, le 13 février 2011
(Paris - 64 ans)


La note:  étoiles
Polar agricole
On est habitué des flics au lourd passé qui traînent leur mal de vivre tout au long de leurs enquêtes dans les bas-fonds de l'âme humaine.
Mais Jack, le héros de Frederick Busch, détient certainement une palme : son passé pèse des tonnes !
Avec Nord on le découvre un peu tard (1) mais cela rend son histoire encore plus mystérieuse et plus épaisse. Il devenu "le-flic-qui-ne-retrouve-pas-les-enfants" ...
À commencer par sa propre fille qu'il n'a pas su ou pu sauver. Du coup son couple a explosé en vol.
Une autre enquête vient hanter ces nuits, une histoire où il s'est avéré incapable de retrouver une jeune fille (seulement son meurtrier, c'est déjà pas mal).
De flic en shérif puis en gardien de campus, le voici maintenant vigile dans un bar quelconque d'un état du sud. La dégringolade. Et même son chien fidèle, un trop vieux labrador, est en train de le lâcher. La déroute.

[...] Dans un couple, on doit dire son secret. C'est ce que je crois maintenant. Mais j'ai aussi cru que ma femme mourrait du nôtre. Alors je l'ai gardé pour moi. Il n'y a plus eu de couple.

Lorsqu'une belle avocate vient lui proposer de chercher un neveu (encore un grand gosse à retrouver ...) il saisit l'occasion de tout larguer dans le sud et de retourner sur les traces de son passé, dans le Nord, un nord qu'il a perdu depuis de nombreuses années.
Le voici donc revenu près de la frontière canadienne, à la recherche du neveu disparu, rôdant autour de quelques fermes louches dont les champs de maïs pourraient bien cacher des cultures moins fourragères ...
Évidemment il n'est pas vraiment le bienvenu parmi les bouseux du coin, visiblement plus soucieux de protéger le secret de leurs petits trafics.
Heureusement il retrouve son seul et vrai ami, un grand black désormais atteint d'un cancer. Et sa femme Sarah.
Une Sarah dont notre ami Jack fut un peu trop proche à une lointaine époque désormais révolue : quand on vous disait que son passé pesait des tonnes.
Et puis il y a Georgia, la fille d'un notable du coin, une jeune femme qui n'a pas froid aux yeux (et qui n'a pas froid du tout d'ailleurs). Elle se prend pour une journaliste et aimerait bien écrire l'histoire de Jack, ce qui a le don de le mettre en rogne.
Ça c'est du polar, du beau, du vrai, du noir.
Malheureusement, on a vécu un peu le même syndrome qu'avec le récent Signal : une première partie forte, une histoire qui dépote, une écriture qui accroche ... et puis une seconde partie qui s'enlise dans les clichés et les péripéties convenues.
Comme les scènes de cul (2) avec la bombe Georgia qui n'étaient ni faites ni à faire. C'est pas qu'on n'aime pas les histoires de fesses (bien au contraire !) mais là, franchement, qu'est-ce que ça pouvait bien apporter à notre héros (3) ?
Du coup, l'ami Jack tombe dans l'archétype du vrai dur qui ne danse pas, le sombre héros à la John Wayne (d'ailleurs cité), celui qui éructe un “Yes, M'ame !” au comptoir. Bof ...
Les histoires à peine effleurées avec la lointaine avocate ou même avec la mamie qui tient le “diner” en bas de la colline sont quand même d'une toute autre tenue et on aurait aimé que l'ensemble du récit sorte de la même fabrique. Plus grandes sont les attentes, plus grandes sont les déceptions !
Bien dommage que Frederick Busch se soit parfois égaré sur les chemins de campagne, le livre aurait mérité plus de rigueur.
Mais que ces quelques critiques de fine bouche ne vous empêche pas de découvrir un bon polar, un beau, un vrai, un noir. Et le héros qui va avec, viril, sombre et dur.
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(1) : Nord n'est pas son premier roman traduit en français, mais qu'à cela ne tienne, il se lit facilement sans avoir eu connaissance des précédents épisodes, bien au contraire, cela ajoute au mystère et au plaisir de la lecture et de la découverte
(2) : désolé, c'est bien le mot, on dirait du Millenium
(3) : oui évidemment, un peu de satisfaction, on avait compris, et encore, il est plein de remords
Jack, ancien flic, plein de remords et sans boulot, replonge de plein fouet dans son passé en acceptant de travailler pour une avocate. 10 étoiles

Biographie de l'auteur:

Voir les onglets appropriés.

Quatrième de couverture:

«Voilà Jack, l’ancien flic qui dans Filles enquêtait sur la disparition d’une adolescente, de retour chez lui, dans le nord de l’État de New York. Désormais déchu au rang de vigile dans un complexe hôtelier de la côte de Caroline, il se voit proposer par une avocate qu'il sauve des griffes d’un gigolo un travail du genre de ceux qu'il a autrefois pratiqués : rechercher son jeune neveu parti se mettre au vert sans plus donner de nouvelles dans un coin perdu du nord de l’État. Ce travail pourrait bien donner à Jack un second souffle, mais revenir sur les lieux de son passé et tenter de retrouver les disparus va aussi signifier pour lui affronter le silence et les non-dits qui le rongent depuis tant d’années… Entre polar et drame psychologique, violence et compassion, le récit de cette confrontation avec la part d’obscurité et de souffrance que recèle toute vie humaine donne progressivement à l’enquête la nécessité d’une quête. À la puissance dramatique des évènements, et l’art consommé avec lequel ils sont orchestrés, s’ajoute l’intensité de la langue dans laquelle tout est raconté : cette langue à la fois tenue et immédiate qui est celle de Jack, homme aux aguets mais de peu de mots, tough guy vulnérable et sensible dans la lignée des héros hemingwayiens. Frederick Busch signe ici un dernier roman d’une force rare, qui le place parmi les plus grands.» Stéphanie Levet.

Mon avis:

+: Roman bien écrit, bien traduit et qui se lit vite. Écriture simple et aérée. Histoire policière faite de non dit, de flashback saupoudré d'amourette, d'une lenteur extrême (Ce qui permet au lecteur, au fil des pages, d'apprendre à mieux connaître Jack), mais accrocheuse et passionnante. Belle première de couverture (Voir la photo du livre ci-dessus) et quatrième de couverture bien réalisée et structurée.

-: Roman qui peut dérouter plus d'un lecteur de par sa lenteur extrême, ses non dit et ses flashback à répétition.

En conclusion:

Frederick Busch avec son roman policier "Nord", suite de Filles (on peut lire les deux romans séparément et dans l'ordre que l'on veut.), nous transporte une nouvelle fois au nord de l'état de New York. Son histoire, simple et sans prétention, d'ancien flic, paumé et sans travail qui accepte d'enquêter pour une avocate New-yorkaise, émeut le lecteur de par sa lenteur extrême, ses non dit, ses amourettes et ses nombreux flashback. Au fil des pages, le lecteur rentre au plus profond de la vie de Jack et de ses tracas d'enquêteur privé et apprend à l'aimer ou à le détester.

A Chacun de faire sa propre opinion; On l'aime, on l'apprécie ou on le déteste. Pour ma part je suis rentré au plus profond de son histoire, je me suis mis à l'apprécier et a avoir de la compassion pour cette être blessé au plus profond de sa chair.

Merci à Frederick Busch pour ce magnifique roman et à Stéphanie Levet, pour sa traduction belle et bien réalisée. Merci et encore merci.

Anonyme3 - - - ans - 24 novembre 2012


déception 2 étoiles

Si "fille" était séduisant "Nord" est décevant. Sans doute parce qu'il vaut mieux ne pas recommencer ce qui a plu pour de mauvaises raisons. La première fois on est séduit, la seconde on est fatigué et tout ce qui paraissait inventif la première fois se révèle poncif ou cliché la seconde. C'est ainsi qu'il vaut mieux ne pas revoir ce qui nous a séduit pour de mauvaises raisons (je pense que "filles" est un bricolage efficace et séducteur )

Phineus - Bordeaux - 87 ans - 12 octobre 2011