Voyage en Avril
de Nicole Avril

critiqué par Isis, le 13 février 2011
(Chaville - 79 ans)


La note:  étoiles
En première ligne…
On reste l’enfant de ses parents tant que ces derniers sont vivants, pour basculer, à la mort du second, dans le statut d’orphelin à vie, et cela, quel que soit son âge ; un changement encore plus bouleversant pour le fils ou la fille unique, qui perd à la fois un amour et les seuls témoins restants de sa jeunesse.
Nicole Avril évoque superbement ce double traumatisme dans ce «voyage», elle qui, à la soixantaine déjà bien sonnée, a perdu son père âgé de 96 ans, après l’avoir entouré au mieux, lors de ses derniers instants.
Elle décrit aussi avec beaucoup de délicatesse la lente plongée de sa mère, décédée trois ans plus tôt, dans les abysses insondables de la démence sénile que l’on baptise aujourd’hui, trop souvent à tort, du vocable fourre-tout de maladie d’Alzheimer.
De ses deux parents disparus, il ne reste plus aujourd’hui, sur une étagère, que deux boules de porcelaine contenant leurs cendres et encadrant le petit réveil blanc qu’Yves Avril a fixé intensément jusqu’à son dernier souffle, où s’inscrivait à jamais l’heure fatale de sa mort.
Après avoir vécu l’inversion des rôles que connaît tout enfant face au grand âge de ses parents, la voilà confrontée au grand vide créé par cette seconde disparition. Car, elle la place désormais en première ligne et l’incite à immortaliser par l’écriture tous les instants de sa jeunesse envolée, avec ses joies ses peines, ses remords ou ses regrets de ne pas avoir toujours su leur dire les mots qu’il fallait. De les avoir souvent peinés et parfois déçus.
Très émouvant, cet hommage au père vient toutefois s’entrecroiser avec des souvenirs personnels beaucoup moins convaincants, tant cette autobiographie est jalonnée de confessions intimes à l’extrême et imprégnées de narcissisme. Un étalage un peu trop complaisant à mon goût, mais aussi – il faut bien le dire - totalement dans l’air du temps !
Ainsi, le lecteur saura tout, depuis les premiers assauts d’un prêtre pédophile (terme totalement inconnu à l’époque…), le premier mariage raté, jusqu’au défilé des amants avant la rencontre ô combien romanesque de l’homme de sa vie, «Jean-Pierre» (tout le monde l’aura reconnu…), en passant par un avortement clandestin en Suisse, l’année du bac…
Autant d’éléments plus ou moins dérangeants qui m’incitent, après avoir refermé ce livre, à un avis plus mitigé que n’auraient pu le laisser augurer les premiers chapitres et, bien sûr, la 4ème de couverture. Dommage !!