Dernière nuit à Twisted River de John Irving
(Last night in Twisted River)
Catégorie(s) : Littérature => Anglophone
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Les secrets de Maitre Irving
Chaque nouveau roman de John Irving est attendu avec une impatience fébrile frôlant souvent le découragement car ces perles littéraires sont délivrées avec parcimonie au rythme régulier mais immuable d'une tous les 4 ou 5 ans. La révélation est arrivée au tout début des années 80 avec "Le monde selon Garp" qui fut le roman de la reconnaissance internationale. Par bonheur, il ne s' agissait pas d' un premier roman et les amateurs inconditionnels ont pu se délecter de ses premières œuvres à un rythme plus soutenu. Puis, quand tout ce qui avait été écrit fut lu, la difficile attente commença avec une délivrance arrivant lentement mais régulièrement.
2011 voit l'arrivée du 12ème roman de John Irving "Dernière nuit à Twisted River" publié au Seuil et traduit, comme tout ses autres livres, par Josée Kamoun. Comme souvent Irving nous entraine dans une vaste aventure humaine, entre loufoquerie et drame, et qui constitue, de prime abord, la patte littéraire de cet écrivain américain. Cette fois-ci il nous invite à suivre les pérégrinations d' un fils et de son père à travers le Nord-est des Etats-Unis pendant ce dernier demi-siècle. Dominique, le père, est cuisinier dans des camps itinérants de bûcherons du New-Hampshire et il élève seul son fils Daniel âgé d'une douzaine d' années. Cette dernière nuit à Twisted River, croyant son père attaqué par un ours, Daniel tue sa maitresse d'un coup de poêle à frire en pleine tête et déclenche, à travers ce geste de défense paternelle, une fuite longue de 50 ans car cette femme était aussi la maitresse du sheriff ivrogne et violent du comté qui décide alors de vouer sa vie à sa vengeance. Grâce à l'aide indéfectible de Ketchum, un bûcheron issu, pourrait-on croire, du croisement d'un ours et d'un philosophe, Dominique et Daniel passent leur vie à fuir. Ils se retrouvent à Boston, au sein de la communauté italienne, puis dans le Vermont et l'Iowa, changeant de nom et de vie chaque fois que le vengeur, devenu sobre, retrouve leur trace. Dominique reste cuisinier et Daniel, dont le don littéraire se manifeste très tôt, devient un écrivain reconnu. Ces livres traitent, sous forme de fiction, de l'histoire rocambolesque de cette fuite éperdue et inutile. Chacun construit sa vie à sa façon, Daniel a un fils qu'il élève seul lui aussi et qu'il tente à son tour de protéger des dangers de la vie. Père, fils et petit-fils restent unis dans cette aventure dont la fin est connue d'avance sous l'œil et la vigilance tonitruante de Ketchum, protecteur indéfectible et véritable conscience morale de l' Amérique de la seconde moitié du XXème siècle.
Fidèle à son style littéraire, John Irving nous entraine, une fois encore, dans son monde si particulier, nous faisant passer, d'une page à l'autre, du rire aux larmes en maitrisant l' intrigue avec cette maestria qui fait sa marque. Nous retrouvons ses thèmes et figures favoris : la lutte, les ours, les femmes au physique fellinien et à la sexualité dévorante, l'angoisse existentielle du père pour ses enfants, l'absence ou la mort d'un parent. Autour de ce dernier roman, John Irving, nous livre quelques secrets de "fabrication" qui expliquent, par exemple, la longue durée de gestation de chaque livre. Il écrit toujours la fin en premier car l'histoire est déjà totalement maitrisée dans son esprit et, outre l'originalité de celle-ci, ce qui compte est l'intrigue, cette sorte de mystérieuse alchimie faisant que les choses arrivent, inexorablement. John Irving écrit sur ses peurs, sur ce qu'il ne veut pas qu'il arrive à ceux qu'il aime. Quelle meilleure façon d' exorciser ses angoisses que de commencer par la fin! Il s'agit d'une véritable antithèse de la vie: nous en connaissons tous la fin mais nous ne savons pas comment nous allons y parvenir. Irving a choisi le contrepied dans son œuvre : il connait d'abord la fin puis le cheminement et enfin le début, rien d'autre ne peut arriver qu'il n'avait prévu. Une fois encore, la magie opère, nous entrainant irrésistiblement dans ce roman-fleuve en nous laissant pantois, émerveillé et aussi perplexe, contemplant le monde si particulier des hommes. Comme le dit Irving: " On ne peut pas faire réfléchir le lecteur si on ne l'a pas diverti pendant les 300 premières pages." Merci Monsieur Irving de nous divertir de la sorte en nous faisant réfléchir au curieux destin qu'est notre vie.
Les éditions
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Dernière nuit à Twisted River [Texte imprimé], roman John Irving traduit de l'anglais (États-Unis) par Josée Kamoun
de Irving, John Kamoun, Josée (Traducteur)
Seuil
ISBN : 9782021012835 ; 17,80 € ; 20/01/2011 ; 561 p. ; Broché -
Dernière nuit à Twisted River [Texte imprimé], roman John Irving traduit de l'anglais (États-Unis) par Josée Kamoun
de Irving, John Kamoun, Josée (Traducteur)
Points / Points (Paris)
ISBN : 9782757837320 ; 9,70 € ; 07/11/2013 ; 704 p. ; Poche
Les livres liés
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Les critiques éclairs (15)
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Un roman particulièrement maîtrisé
Critique de Sundernono (Nice, Inscrit le 21 février 2011, 41 ans) - 28 juin 2016
Pour reprendre certaines critiques il est vrai que dernière nuit à Twisted River tire parfois en longueur, cela est indéniable, que les nombreux détours et digressions rendent le suivi de l’histoire parfois épineux, néanmoins cela ne m’a pas gêné. Honnêtement j’ai déjà lu un tas de romans bien plus complexes dans leur construction que celui-ci.
Plusieurs qualités essentielles m’ont tout particulièrement fait apprécier ce roman, notamment son univers et l’ambiance qui en ressort. Les descriptions du Vermont, du New Hampshire, de Toronto, des grands espaces du Nord Est, l’esprit qui habite ces territoires. On sent tout le vécu d’un auteur qui connaît parfaitement ces lieux. Les personnages particulièrement soignés par le romancier, notamment le fameux Ketchum, collent parfaitement à l’ambiance général du roman. Il est vrai que certains ont un caractère quelque peu effacé mais finalement dans le ton de ces lieux désolés. A cela s’ajoute la construction du roman qui demeure pour moi LE point fort du roman. Que dire de cette fin…
Un bon roman.
Le souffle frais des forêts nord-américaines
Critique de Tistou (, Inscrit le 10 mai 2004, 68 ans) - 21 septembre 2014
Alors on ne va pas y rester dans ces forêts sauvages, à Twisted River. On va aussi évoluer en milieu urbain, vers Boston, dans le Vermont, l’Iowa et au Canada, à Toronto. Et John Irving parle en connaissance de cause puisque, outre le Canada où il passe une partie de sa vie, il y est question d’un écrivain.
Danny, jeune, est élevé par son père, cuisinier, au fin fond des forêts parmi les bûcherons, les « dravers » (ceux qui convoient les trains de troncs au fil de l’eau), à Twisted River. La vie là-bas est peuplée de personnages inénarrables – ou peut-être est-ce le cerveau de John Irving qui est particulièrement fécond ? – et Danny doit fuir tout à coup ce qu’il considérait comme son monde, en compagnie de son père, Dominic Baciagalupo. Il s’est passé quelque chose et le père a choisi, contre toute raison, la fuite. Exit Twisted River, ses troncs, ses ours et ses eaux, bonjour la clandestinité, la fuite toujours plus loin, les changements d’identité. Un ami leur est resté fidèle à Twisted River, Ketchum, un draver comme on n’en fait plus – et plus précisément un personnage comme on est incapable d’en imaginer en Europe, simplement parce que ça n’existe pas chez nous des individus de cette nature ! – qui va les renseigner sur le danger resté à Twisted River et veiller de loin sur eux. Après … c’est beaucoup, beaucoup plus complexe, et ceux qui connaissent et apprécient le style Irving comprendront ce que je veux dire. Les rétifs aussi, probablement. On marche ou ne marche pas mais l’intelligence du propos fondu dans une histoire au si long cours est proprement jouissive pour qui rentre dans le jeu. Le petit Danny devient écrivain – et on assiste ainsi à la naissance d’un … John Irving ? – il devient vieux et l’histoire court, court … Et moi avec !
petit plat un peu noyé dans la sauce...
Critique de Deinos (, Inscrit le 14 février 2009, 62 ans) - 29 juillet 2014
Je ne reviendrai pas sur le fond du roman qui outre d'un discours sur la paternité explore l'art du roman selon Irving... d'où parfois des jugements un peu abrupts... ni sur les thèmes qui transparaissent vu qu'on retrouve les éléments d'un roman irvingien, soit la paternité, le parent absent, les morts brutales, le New Hampshire, Exeter, les ours, la lutte...
Ni sur cette maitrise de conteur qu'a Irving, qui sait nous saisir et nous amener dans un style fluide, avec un langage savoureux là où il le désire...
Mais voilà, justement, j'avais l'impression d'avoir déjà lu ce livre de John Irving... un goût un peu passé... et puis certes Irving n'aime pas l'art de la concision comme il le dit... “I thought, I surely don’t want to become a writer to write sentences as simplistic and short as this guy does … If you want to be an ad writer and write ad copy, OK, short sentences are appealing. But it seemed to me to be a dictum and dulling.” Mais parfois il délaie un peu trop et le plat perd de sa saveur... des digressions parfois un peu longues et ennuyeuses qui sont comme des grincements dysharmonieux sur la mélodie tissée... et puis une sensation de répétitions de faits...
Et je dois l'avouer, au delà de la page 471, je me suis un peu lassé de cette lecture qui s'étirait inutilement et où je me disais que la patte d'Hemingway n'aurait pas été inutile...
donc un roman plaisant mais parfois un peu fade...
Cuisine sans saveur
Critique de Falgo (Lentilly, Inscrit le 30 mai 2008, 85 ans) - 8 juin 2014
A déguster
Critique de Free_s4 (Dans le Sud-Ouest, Inscrit le 18 février 2008, 50 ans) - 12 août 2013
Roman culinaire et littéraire.
Le père cuisinier , le fils écrivain.
La vie de cette famille sur trois générations.
J'ai bien aimé, mais j'ai pris le temps de le lire (plus d'un mois), par petite dose.
C'est du pur John Irving, je recommande.
Un plaisir attendu
Critique de Elko (Niort, Inscrit le 23 mars 2010, 48 ans) - 3 octobre 2012
Je n'ai pas mordu...
Critique de Jules (Bruxelles, Inscrit le 1 décembre 2000, 80 ans) - 1 septembre 2012
Ici les pages défilent et les choses qu'elles m’apprennent c'est comment on prenait et transportait le bois.
Ces descriptions étaient d'une longueur assommante et je ne voyais rien dans toute cette histoire où il voulait nous mener. Pas un personnage pour nous attirer et nous donner envie de poursuivre un livre qui plus est est bien épais.
Peut-être un bon auteur mais je n'y retournerai pas.
Je n'ai pas aimé.
Critique de Isabulle (Lille, Inscrite le 2 décembre 2007, 59 ans) - 29 août 2012
J'adore Irving
Critique de Saabj (, Inscrite le 13 mars 2012, 48 ans) - 27 juillet 2012
Dernière nuit à Twisted River
Critique de Irving/ophille historique (, Inscrite le 30 mai 2012, 74 ans) - 30 mai 2012
Interrogation
Critique de Manouche (, Inscrit le 29 avril 2012, 57 ans) - 29 avril 2012
Et pourtant j'ai calé, me suis perdu dans les dédales de cette histoire, n'ai pas réussi à m'attacher à la destinée pourtant exceptionnelle des protagonistes. J'en étais très inquiet. Etait-ce moi qui perdais la patience de la lecture, la concentration ? Il faut parfois se forcer un peu pour "entrer" dans un bouquin. J'en ai bien lu 200 pages. Je me suis demandé si le traducteur n'était pas nouveau, si ce n'était pas lui qui trahissait le style de John Irving. J'avais le sentiment d'une lecture laborieuse. Et pourtant non, le traducteur était bien le même que pour ces derniers romans. La lecture des critiques dans ce forum me rassure un peu. Elle ne sont pas encourageantes à terminer la lecture du livre. Pourtant je le ferai: trop de travail, d'efforts accumulés par John Irving pour ne pas respectueusement aller au terme de son roman. Je suis pourtant déçu et m'interroge. Une histoire peut ne pas plaire, on peut être en désaccord avec des idées, mais quand c'est le style qui semble être à l'origine du déplaisir à lire, c'est étonnant de la part d'un écrivain dont on a pu tant aimer les oeuvres précédentes.
Déception : la première
Critique de Julio (, Inscrit le 27 janvier 2010, 46 ans) - 2 novembre 2011
Pire encore par moment, Irving nous réchauffe des recettes connues : un bout d'ours, un écrivain en devenir, la relation père-fils. Le père qui n'assume pas, le fils qui n’assume pas non plus d'être père...
Bref, grosse première déception concernant cet auteur mais de taille.
Une nouvelle épopée de John Irving
Critique de MattC7391 (cela a-t-il une importance ?, Inscrit le 16 août 2011, 51 ans) - 6 octobre 2011
Le déroulement est très fluide et on suit avec plaisir l'épopée des 3 personnages centraux. Quelques longueurs qui n'altèrent en rien le déroulement de l'histoire et qui apportent un peu de répit aux personnages.
John Irving intègre sa vision de l'écriture et se transcrit dans un des personnages (tout du moins c'est l'idée que l'on s'en fait).
Un livre qui se lit rapidement et de façon plaisante avec une fin qui ma fois m'a plu.
Les broderies de Maître Irving
Critique de Bidoulet (, Inscrit le 18 octobre 2005, 56 ans) - 24 mars 2011
Après un démarrage poussif et interminable, le récit s’accélère brusquement avec les décès de deux protagonistes. On va alors suivre le parcours de deux témoins directs de ces deux décès. Ces personnages, dont l’un est le meurtrier par accident, s’attellent à fuir et à se débarrasser du corps d’une femme dont l’autre personnage était l’amant. Ils n’éprouvent aucune compassion. Irving ne démontre aucune émotion, aucune humanité de la part de ses personnages, pas plus que s’ils enterraient un rat crevé. Ces scènes sont irréelles. Un décès aurait dû suffire mais la probabilité déjà faible d’un deuxième décès, sans lien d’ailleurs avec le premier, laisse la suspicion sur la vraisemblance de l’histoire et éveille la perplexité sur le comportement lisse des personnages qui sont confrontés à ces drames.
Quant aux nombreuses parenthèses désenchantées, elles entraînent le lecteur vers des plages infinies d’ennui à moins qu’il ne s’intéresse aux travaux d’aménagement d’une cabane au fond des bois, à un chien qui pète ou aux débits de boisson sur la route 69. Il reste quelques ours – et les traces des éléments autobiographiques de l’auteur - et quelques historiettes abracadabrantes dans la veine des précédents comme si John Irving, roman après roman, se jetait dans une surenchère névrotique consistant à bourrer ses écrits de scènes de plus en plus extravagantes. On retiendra pour illustration l’histoire de la parachutiste nue qui atterrit au milieu d’une bauge à cochons.
Peut-être le pavé de trop.
Une grande maîtrise, quelques longueurs...
Critique de Tanneguy (Paris, Inscrit le 21 septembre 2006, 85 ans) - 14 mars 2011
Les épisodes successifs de cette grande saga, qui concernent tous Ketchum, le bûcheron, Dominic, le cuistot et Danny le fils de ce dernier qui deviendra écrivain (l'ombre d'Irving ?) sont de qualité et d'intérêt inégaux, mais toujours passionnants.
J'ai moins aimé les trop longues considérations sur la fabrication d'un roman et les banales réflexions sur la politique américaine aujourd'hui. Irving est meilleur lorsqu'il analyse et commente les moeurs et les comportements de ses personnages. Surtout quand ils se mettent aux fourneaux.
Un excellent roman !
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